Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Un mois, déjà un mois entier venait de s'écouler dans cette nouvelle vie qu'était la leur. La plupart des loups semblaient vivre comme-ci de rien n'était, alors qu'au fond tout le monde avait été impacté. Que ce soit la perte de ses terres, de ses proches, ou même le sacrifice que représentait le fait de vivre avec d'anciens ennemis, aucun survivant ne pouvait clamer un total bonheur, c'était impossible. Kuma faisait partie de ceux dont on pouvait aisément discerner le changement. Loin d’être devenu infecte, il s’était contenté de se refermer sur lui-même. Gardant ses émotions pour lui la plupart du temps et ne parlant que peu avec ses nouveaux camarades d’infortune.

Ce jour-là était un jour sans, et ces jours se faisaient de plus en plus fréquents. Il n’y avait pas encore énormément de travail pour l’éducateur, les louveteaux étant peu nombreux et encore bien trop jeunes, trop fragiles aussi, pour se lancer dans un quelconque entraînement. Le blanc aurait pu aller rendre service, mais il se trouvait pris dans un combat intérieur : seul contre ses tristes pensées. Alors il restait là, debout dans un coin du campement à observer les autres s’afférer à leurs tâches. Le lieu ressemblait dans ces moments à une fourmilière où chacun travaillait pour le bien commun, c’était épuisant de voir et d’entendre tout ce mouvement lorsque le moral n’était pas présent.

Alors, armé d’une nonchalance peu habituelle pour ses anciens compagnons, il se dirigea vers un coin plus calme. Ses pas le menèrent vers la clairière, qui s’avérait être vide pour une fois. Un battement de queue vint frôler quelques fleurs avant que le loup ne décide de l’endroit idéal pour poser ses vieux os. Son choix se porta, sans grande surprise, vers l’immense rocher qui trônait au milieu de toutes ces fleurs. Il n’y avait pas meilleur endroit pour s’asseoir face à l’horizon et profiter de la vue en toute sérénité.

Bien sûr, Kuma ne resta pas assis très longtemps et commença à étirer ses pattes vers l'avant jusqu'à simplement laisser tomber son corps sur la pierre. Le temps était agréable. Un ciel ensoleillé avec une légère brise qui venait s'écraser dans l'épaisse fourrure du blanc, lui permettant d'éviter la surchauffe. Tellement agréable qu'il se laissa aller à fermer les yeux, jusqu'à ce qu'il remarque l'arrivée d'un compagnon aussi calme et silencieux que lui.

Bien que sa solitude s'apprêtait à disparaître, le blanc savait que la tranquillité serait toujours de mise. Avant même que son camarade n'ouvre la gueule, son odeur était venue chatouiller les narines du vieux loup qui le reconnu aussitôt. Il s'agissait de Sköll, un chasseur du groupe qui était très clairement le loup le plus facile à vivre de tout ceux qui avaient survécu aux événements. Bien sûr, il fallait apprendre à le connaître un peu, sinon on avait vite fait de le prendre pour un mâle qui se foutait pas mal des autres. Ce qui n'était pas vraiment le cas, Kuma le savait bien. Le brun était plutôt du genre à participer au bien commun sans en vouloir les louanges, ni n'avoir à faire de grand discours. Il avait bien raison, au fond.

La voix du chasseur retentit et le blanc tourna enfin la tête vers lui. Il lui avait déjà dit une fois de ne pas le vouvoyer une fois, mais soit il n'avait pas fait attention à cette demande, soit il était trop poli pour se permettre de le tutoyer. Quoi qu'il en soit, Kuma ne relèverait pas une nouvelle fois. Leur amitié était basée sur la simplicité et la brièveté de leurs discussions. « Bien sûr, je t'en prie. » dit-il simplement en pointant du museau tout l'espace à côté de lui, qu'il n'occupait pas. Comme pour lui signaler qu'il avait largement le choix d'où se placer pour profiter du silence.

Cependant, avant de regagner son mutisme, le blanc souhaitait discuter un tout petit peu. Si son compagnon souhaitait développer, il le ferait, sinon il n'aurait qu'à faire une réponse courte qui voudrait tout dire. Après tout, l'ancien LibreLune était bien placé pour comprendre qu'on veuille parler le moins possible. « Tu fuis aussi le troupeau ? » lança-t-il comme une évidence avant de reposer sa tête sur ses pattes, yeux dirigés vers le brun en attendant sa réponse.

Bien sûr, il n'attendait pas beaucoup plus qu'un "oui" pour réponse et cela lui suffirait bien. Fuir le groupe pour rejoindre le calme était légitime et Kuma ne se permettrait pas de perturber, ni d'empêcher son ami d'en profiter comme il le faisait lui-même. Après tout, ils avaient tous des raisons de vouloir s'isoler un peu.