Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Étonnant, ce printemps encore endormi. Alors que l’été était l’un des clans à prôner le retour des floraisons et du reste de la flore jaillissante de terre, rien de tout cela ne s’était passé. À la place des parterres infinis de fleurs, la glace éternelle continuait son règne silencieux, n’étant aucunement dérangée par l’inexistant changement de température. La venue de la nouvelle saison se faisant sans aucun souffle, et malgré le contentement de Hjalmar fasse au froid qui perdure, une inquiétude soudaine venait prendre place suite à ce climat anormal.

C’est chez les LibreLunes que la question était sur les babines de tout le monde. Qu’en était l’origine ? Un simple retard environnemental ou tout bonnement une entité aux intentions particulières ? Rien ni personne ne pouvait avoir la réponse sans aller vérifier de leur propre personne. Et c’est ainsi qu’une nouvelle parcourait toutes les bouches à travers les clans qui n’a évidemment pas pu échapper aux LibreLunes : il serait en question d’un « abruti » estival qui aurait fait d’étonnantes découvertes aux larges de son territoire, et très vite, les oreilles du fauve bleu sifflèrent.

Se dirigeant vers la nouvelle antre fraîche de l’Été, le géant LibreLune fut surpris par les paysages environnants. La fonte des neiges étaient lente, voir même inexistante, et le givre recouvrait encore la végétation l’empêchant de se vêtir des rayons bienveillants du soleil printanier. Rien ni personne chez eux n’étaient rassuré de cette absence de changements, et tous trouvait cela « bizarre », « inquiétant ». Hjalmar, recueillant des informations et des témoignages des loups qu’il croisait, se dirigea vers là où la tumulte avait lieu : l’Horizon Lointain. Il était bien rare pour le lion de se retrouver en un pareil lieu, préférant éviter les zones à chaleur. Mais sachant que cette-dernière n’était pas présente pour le coup, le bleu pouvait s’y aventurer sans aucun soucis. Et à vrai dire, ce n’était pas la peur d’étouffer dans son épaisse écharpe qui le préoccupait en cet instant précis.

Une fois arrivé sur la place des évènements, nombreux étaient les individus qui étaient venus observer les phénomènes. De tous les clans, des têtes reconnaissables s’étaient déplacées pour participer à cette enquête bien étonnante. Non loin de là, quelques hivernaux traînaient et le serviteur de la Lune alla à la rencontre de l’un deux : Sullivan. Le bourreau de l’Hiver était connu de Hjalmar par les dires de son fils Fjörd qui contait ses échanges avec le Prince. Ce-dernier avait gagné la confiance du LibreLune qui fut intéressé par la capacité intellectuelle du compagnon de soir de son enfant, et il se dit qu’il ferait un bon compagnon de route. S’approchant du masque doré, il indiqua sa présence par un raclement de gorge, afin de ne pas surprendre l'aveugle.

- Je suis Hjalmar, père du jeune Fjörd qui partage votre clan. Offrierez-vous votre aimable compagnie pour découvrir les méfaits de Mère Nature ? Je dois avouer qu’en dehors de mon rang, je partage un profond intérêt pour ces évènements improbables.

Hjalmar acquiesça au dire de son nouveau compagnon de route, comprenant sincèrement ses paroles. Appréciant ces-dernières, le bleu léonin savourait la manière de parler de son interlocuteur. Il était intéressant et toujours agréable de se trouver auprès d’un intellectuel qui portait attention à ses mots et pensées. Celles de Hjalmar étaient à présent focalisées sur le pont de glace qui se tenaient devant eux. D’une manière plus que curieuse, un passage givré s’était formé vers un banc de terre fixé sur l’horizon. C’était donc ça, leur fameux objectif.

Non sans hâte de partir à l’aventure, les deux s’engagèrent sur la fine couche glissante, le LibreLune en tête. Indiquant à l’Hivernal où mettre les pattes pour ne pas tomber dans l’eau, il prenait soin de ne pas faire prendre plus de risques à l’aveugle. Ce-dernier était tout de même partant malgré son handicap, et cela plu au fauve qui reconnaissait cette détermination hors du commun et il savait qu’il n’avait pas de quiétude à se faire vis-à-vis de son compagnon.

Après quelques pas timides sur le parterre surnaturel, de dangereux bruits sonnèrent aux oreilles du grand sage. S’arrêtant doucement, il ne doutait pas une seconde que l’autre avait entendu la même chose que lui, ayant sûrement l’ouïe plus aiguisée. Aux aguets, le Porteur de pierre ne douta pas une seconde que c’était le chemin sous ses pattes qui les menaçait d’un danger iminent, et posant sereinement ses puissantes griffes sur cette couche transparente, elle se mit à craqueler de plus en plus agressivement. Prit au dépourvu, le LibreLune ne s’attendait pas à une route aussi vulnérable et n’avait pas la moindre intention de faire demi-tour, maintenant engagé sur l’aventure. Celle-ci se verra cependant prudente et dangereuse, vu la tournure que prenait le premier obstacle. Voulant à tout prix aussi de tomber dans l’eau pour ne pas faire prendre de risques inutiles au cécité, il prit la peine de ralentir nettement la cadence et rassura son partenaire :

-Prenez garde, la glace menace. Soyons vigilent dès à présent, le risque est à notre portée, ne le provoquons pas plus.

Le blanc restait parfaitement serein en cette situation de risque, ce qui impressionna Hjalmar sans le surprendre. L’hivernal devait être habitué à ce genre de situation, et à se mettre en danger en gardant tout contrôle. Le LibreLune écouta les paroles du sage avec attention et hocha négativement la tête :

- Non, cela ne sert à rien d’abandonner de si tôt. Le pont nous supportera jusqu’à notre objectif. Persévérons et nous serons récompensés bien plus vite que vous ne le pensez.

Avançant à tâtons sur la frêle glace, la plage était de toute évidence trop lointaine derrière pour la regagner et les risques seraient tout aussi grands. Au moins, il était possible que certains loups derrière eux soient tout aussi victimes du même obstacle. Cependant, il n’y avait aucune raison de baisser les bras et Hjalmar fit la promesse au bourreau que tout se passera bien, et que la terre promise sera bientôt atteinte. La détermination, voilà ce qui guidait les deux compagnons en cette quête de tous les dangers.

Le sage Librelune grommela dans sa barbe à la vue des fissures qui continuaient de s'étendre jusqu'au large de l'île la plus proche. Il n'était pas agacé, mais le voyage n'était pas agréable. Hjalmar n'était pas un loup pressé, mais il n'était pas capable d'acquérir la même souplesse que son congénère quant à rester en équilibre sur une plaque glissante qui pourrait craquer à tout instant. De plus, l'eau gelée ne s'avérait pas plus accueillante que la terre inconnue droit devant eux.

Il n'en avait que faire d'être le premier à cette course stupide, tout ce qu'il espérait en tant que membre de la guilde, c'était que les nouveaux territoires ne tombent pas entre de mauvaises pattes. Et cela était malheureusement fort possible.

-Nous n'avons pas d'intérêt particulier à posséder ces îles, bourreau, mais au nom de la Guilde il m'est favorable d'assurer que ces terres ne soient pas utilisées pour de mauvaises intentions.

Sur ces mots, Hjalmar sourit à peine, hâtif d'en avoir fini avec cette banquise du malheur.

Un bruit de glissement parvint aux oreilles de Hjalmar, qui directement le transféra à son cœur. Se retournant rapidement, manquant de glisser à ton tour, il s’assura que son partenaire allait bien et qu’il reprenait correctement son équilibre. En un souffle, il lui fit comprendre sa quiétude et questionna son état. Une fois les choses rentrées en ordre, les deux compagnons se rendirent compte que l’objectif n’était plus très loin et qu’il n’y avait plus que quelques pas à faire.

Le dernier morceau de banquise n’était plus aussi fissuré qu’avant, et la voie semblait claire. Sourires aux babines, Hjalmar fit signe au bourreau qu’ils pouvaient assurer une cadence plus rythmée. Une chose était sûre : l’île était déjà occupée mais au moins, ils étaient arrivés sains et saufs. Non pas sans embûche, mais si le premier obstacle avait bien failli les mettre dans de beaux draps, alors qu’en sera-t-il du reste à suivre ?

-Nous sommes arrivés, bourreau Sullivan.