Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Simple chasse au soleil.

Findis et Legolas.

   

Une silhouette se découpa faiblement au milieu de la poudreuse, de loin, elle semblait bien insignifiante et infime, presque invisible dans ce tableau enneigé. Elle semblait frêle et tremblante cette fluette silhouette, la Candide, qu'on la surnommait même la p'tite. On enviait l'insouciance qu'elle avait lorsqu'elle batifolait gaiment dans la neige, son pelage de cristaux se fondant parfaitement dans la poudreuse. L'esquisse d'un sourire éternel était semble-il gravé sous sa petite truffe rose qui relevait un peu son adorable minois blanc. D'un coup de patte, elle envoyait vers les cieux les flocons enroulés au corps au corps qui voletaient un court instant tels des papillons. Soudain, l'animal s'immobilisa et ses longues et douces oreilles s'agitèrent en un soubresaut tandis qu'elle levait légèrement sa truffe vers les cieux. Une fragrance qu'elle seule décelait lui parvint alors et soudain, tout s'accéléra. La poudreuse décolla une nouvelle fois du sol mais cette fois, l'aura de la crainte l'imprégnait de toute part tandis qu'elle s'envolait et retombait brutalement au sol.

La Candide dérapa légèrement dans la neige tandis que ses longues et puissantes pattes allongées glissaient en prenant une battue d'appel. Elle se propulsa tant bien que mal en avant dans un grand bond et poursuivit sa route malgré une réception chaotique. L'esquisse de ce sourire délicatement tracé sous son museau avait disparu dans les abîmes de l'oubli, consumé par la crainte. Les longues oreilles dressées au sommet de son crâne s'agitaient en tout sens en trahissant l'inquiétude qui rongeait son minois délicat. Qu'elle était rapide la Candide quand elle fuyait. Mais elle peinait, ses pattes s'enfonçaient dans la poudreuse qui décollait de plus en plus régulièrement du sol tandis qu'elle accélérait un rythme saccadé et perturbé, retardé par la neige. Mais elle peinait de plus en plus et ses iris noires semblables à deux billes délicatement arrondies trahissaient l'angoisse qui, victorieuse, montait en elle. La fourrure de l'animal était humidifiée par les neiges glacées qui se glissaient dans ce manteau blanc et doux, ses flancs se contractaient de plus en plus violemment et ses pupilles s'arrondissaient de terreur. La Chasseuse s'approchait.

Elle disposait des longues et fines jambes qui manquaient cruellement à l'animal, la poudreuse qui arrivait au poitrail de la Candide n'atteignait que le début des jambes de la silhouette qui la suivait. Des muscles nerveux et développés, qui jouaient sous sa fourrure en actionnant le système fin et calibré qu'était celui de la course. La mèche qui tombait sur ses yeux dissimulait pour le moment son regard mais détrompez-vous y, ce n'était nullement celui d'une tueuse sanguinaire, simplement celui d'une Chasseuse concentrée. La silhouette possédait un pelage brun gonflé en l'occasion pour lutter contre les terribles morsures hivernales qui l'affectaient terriblement. Mais elle continuait la poursuite sans montrer le moindre signe de faiblesse, ses pattes battant la neige dans de longues foulées qui la propulsaient en avant et la faisaient gagner un terrain considérable sur l'animal. La boule de poils blanche jeta un regard pardessus son épaule et un éclat terrorisé voila un peu plus ses iris noires.

La lutte semblait bien inégale, pourtant les deux silhouettes avaient tout deux un désavantage considérable, la taille ne jouait pas en la faveur de la Candide mais le froid glaçait également les muscles de l'estivale que nous avions-là. Pourtant elles continuaient toutes deux et l'animal bondissait de plus en plus haut et loin, retombant dans une neige qui ne cessait de quitter terre sous le passage des deux animaux. Les flocons entremêlés heurtaient brusquement les cristaux qui tombaient également des cieux, accélérant la chute qu'ils entreprenaient tous. L'animal posa brusquement une patte dans la neige, patte qui s'enfonça visiblement dans un trou en entraînant la chute de la lapine blanche qui heurta la neige. Rapidement, elle plongea dans les profondeurs abyssales de la Mort qui envoyait sa Faucheuse auprès du corps de la proie à travers les crocs de la Chasseuse qui s'étaient plantés dans sa nuque. La reine noire encapuchonnée enveloppa l'âme de la boule de poils d'un linceul, l'emportant ensuite dans les hauteurs avant de disparaître. La Chasseuse qui elle était toujours là, souleva le corps de la défunte du sol en le portant entre ses crocs et elle disparut à travers les bosquets gelés, reprenant sa route.

Findis frémit lorsque ses pattes effleurèrent doucement la surface gelée d'une flaque d'eau, poussant un soupire. Malgré son pelage brun gonflé, elle avait l'impression que les fraîcheurs glaciales de la neige se glissaient partout en elle, s'infiltrant au plus profond de ses entrailles sans qu'elle ne parvienne à les déloger. Qu'elle idée, de venir chasser au bord du Fjord par un temps pareil. Heureusement, elle avait attrapé une proie, d'une façon peut réglementaire comme dirait son père puisqu'elle l'avait poursuit un certains temps autour du lac mais qu'importe. L'esquisse d'un sourire se dessina sous le museau de la louve lorsqu'elle repensa aux paroles de son père lorsque celui-ci lui apprenait l'art de la chasse. Il la réprimandait déjà à l'époque pour le soin particulier que la louve mettait à courir après ses proies lorsqu'elles s'échappent en faisant un boucan épouvantable qui devait certainement éveillé tout Four Seasons. Le sourire de la louve disparut bien vite lorsque le glacial Mistral souffla plus brusquement en heurtant son échine.

Décidément, elle avait bien du mal à comprendre comment les Hivernaux pouvait apprécier cette terrible saison qui n'apportait que froid et désolation à ses yeux. Elle posa son regard noisette sur l'animal qu'elle tenait entre ses crocs, les côtes de la bête saillaient terriblement sous sa fourrure blanche en trahissant sa maigreur évidente. Un nouveau soupire s'échappa de la gorge de la louve dont le regard dévia pensivement vers le pendentif solaire qui pendait à son cou. Ce soleil, voilà quelques temps qu'elle le cherche depuis que la mauvaise saison à commencer, mais il semble bien décidé à rester indifférent face aux appels, laissant la saison mener la danse dans les cieux. Les muscles glacés de la louve se forçaient à rouler avec ardeur sous sa fourrure pour ne pas se laisser prendre par les morsures hivernales mais elle ressentait le besoin de faire une pause. Son regard ambré s'attarda alors sur les contours des rochers endormis qui bordaient les eaux paisibles et glacées du lac, rochers qu'elle décida de rejoindre afin de s'assoir sur l'un deux.

Elle posa sa proie à ses pattes et frissonna une nouvelle fois au contact de la roche froide, mais c'était tout de même mieux que la poudreuse blanche. Alors qu'elle levait le museau vers le ciel, la fragrance automnal d'un loup lui parvint et elle se leva immédiatement, plissant légèrement les yeux en scrutant la rive. Elle était certaine qu'elle n'était pas ou tout du moins plus seule, et comme elle ne connaissait pas l'identité de l'Automnal qui approchait, elle restait sur ses gardes.

   © Le Havre

Simple chasse au soleil.

Findis et Legolas.

 

Les bosquets qui encadraient le fjord remuèrent alors légèrement, entraînant la chute de quelques flocons qui maculaient les branches dégarnis en cette saison. La silhouette d'un loup en émergea alors, il n'était pas bien grand et la louve qui posait son regard ambré sur lui en déduit rapidement qu'il s'agissait d'un louveteau. Le loupiot possédait un pelage recouvert d'un pigment brun beige, parsemé sur le dos de rayures courbées tantôt plus claires tantôt plus foncées. Une mèche d'un beige plus clair encore troublé par la présence d'un marron sur le bout. Un tatouage sombre finement dessiné au niveau de l'arrière-main du lupin, représentant la silhouette d'un cerf. Et pour finir le collier au pendentif en forme d'une feuille verte qui pendait au niveau de son poitrail. Même si elle ignorait son nom, elle reconnaissait également le loupiot qui lui faisait désormais face, entrouvrant les crocs afin d'engager la conversation.

- Tiens, je te reconnais. Comment va ton cou depuis que ce neutre ta menacé avec son épée ?

La question eut le mérite de dessiner un sourire amusé sous le museau de la chasseresse dont les pensées s'orientaient vers cette rencontre mouvementée et peuplée ! Neutres, automnaux, estivaux, printaniers, hivernaux ... Peut-être même Libres Lune qui sait. Oui, on pouvait le dire, il y avait eu du monde dans la vieille bâtisse à cet instant là et pas forcément que de bonnes rencontres. La louve pensait surtout à ce solitaire à l'épée aiguisée qui lui avait bondit dessus dès lors qu'elle avait posé une patte sur le vieux et poussiéreux parquet grinçant. Peut-être qu'il considérait la bâtisse comme son territoire mais cette réaction avait été relativement excessive et l'avait plongé un instant dans une situation périlleuse dont elle s'était tirée grâce à l'intervention des autres loups oui. Peut-être n'étaient ils pas du même clan mais à cet instant ils avaient tous simplement réagi comme des loups faisant bloc pour se défendre face à une menace commune. Les rivalités claniques resteraient à jamais présentes, mais la chasseresse n'oublierait pas les visages des canins.

- Il va bien, c'est gentil de ta part de t'en inquiéter, lui répondit-elle en conservant ce sourire amusé.

En temps normal, la louve n'était pas bien bavarde avec les loups de clans rivaux, elle s'arrangeait pour ne pas en croiser régulièrement et cela lui convenait très bien. Mais elle doutait sincèrement avoir à craindre quelque chose du loupiot qui lui semblait tout à fait ouvert et disposé à converser. De plus, elle pensait qu'elle finirait vraiment par geler sur place si elle restait encore un peu plus longtemps immobile et silencieuse à tenir compagnie au vent. C'est pourquoi elle poursuivit.

- Je te reconnais également jeune loup, mais je crois ne pas encore connaître ton nom ?

  © Le Havre

Simple chasse au soleil.

Findis et Legolas.

 

L'estivale observait calmement le jeune canin tandis qu'elle attendait sa réponse. La fragrance qui se dégageait de lui était surtout automnale oui, mais en réalité lorsqu'on se concentrait bien on se rendait qu'elle était beaucoup plus faible qu'elle ne devrait l'être ... Il portait avec lui un parfum différent, que l'on n'associait ni aux solitaires ni à un clan même s'il était évident qu'il se rapprochait plus de celui des solitaires. Il était assez difficile de définir l'origine de cette fragrance, mais quoi qu'il en soit le canin passait visiblement peu de temps au sein de son clan pour apporter avec lui une odeur si effacée. C'était assez surprenant en réalité, il était vrai que les louveteaux vagabondaient souvent un peu partout et c'était bien normal, elle même le faisait, mais il semblait qu'il passait vraiment la plupart de son temps à l'extérieur des terres automnales. Il n'était pas non plus un nouveau-né mais il restait assez jeune de ce que voyait la chasseresse et cela la surprenait quelque peu. Enfin elle même à cet âge se promenait beaucoup hors de son territoire mais au final elle se rendait compte qu'elle était bien mieux là-bas, dans ces paysages estivaux qui lui convenaient mieux que n'importe quel autre lieu. Il fallait dire aussi que de cette innocence et insouciance il ne restait plus qu'une vague curiosité qui subsistait encore un peu parfois, mais le reste s'était envolé bien loin, emporté avec le vent qu'on nomme « passé ».

Grand vent qu'il était, on a l'impression qu'il emporte strictement tout sous son passage mais en réalité il n'emporte que ce qu'on lui offre et une chose est certaine : il ne revient jamais et rien n'est ramené. Seuls les souvenirs qui persistent se baladent de temps en temps, vagabondant dans les esprits, errant comme des âmes vagabondes, des promeneurs qui évoluent dans le parc de nos esprits. Aujourd'hui la brise qui souffle est celle appelée « présent », demain ce sera le vent « futur ». Le présent deviendra passé, le futur deviendra présent. En réalité, il n'y a peut-être qu'un seul vent dans cette ronde calibrée et fixée, mais on a décidé qu'on changeait son appellation suivant les jours ... Était-ce une bonne ou une mauvaise idée ? Si il n'y avait qu'un temps, peut-être qu'on ne regretterait pas le passé, qu'on ne dénigrerait pas le présent et qu'on ne craindrait pas le futur, mais le futur ne nous apporterait pas son espoir, le présent ne nous donnerait pas ses joies et le passé ne nous offrirait pas tous ces beaux souvenirs. Alors dans un sens, le cycle de la vie est bien ainsi aussi. D'un geste, Findis chassa délicatement sa mèche que le vent agitait doucement, la laissant parfois tomber en voilant ses prunelles ambrées. Elle observa toujours aussi calmement et silencieusement le jeune lupin qui semblait serrer les crocs pour une raison qui échappait à l'estivale.

Il ne tarda pas ensuite à lécher une coupure qui barrait légèrement une de ses pattes, mais il reposa subitement celle-ci au sol, un peu trop brusquement. Il y avait quelque chose d'anormal oui, mais quoi ? Elle l'ignorait encore et elle n'avait pas le don de lire dans les pensées, et à vrai dire ça ne lui manquait absolument pas. Il y avait des choses qui étaient mieux lorsqu'elles restaient secrètes. Le jeune lupin soupira alors lorsqu'elle lui demanda son nom, visiblement c'était une question beaucoup posée, en même temps elle était souvent à l'origine de toutes les rencontres.

- On m'a nommé Legolas ce qui signifie "Petit Arbre" dans une langue étrangère d'après ce que m'a expliqué ma mère. Et toi on t'a nommé comment à ta naissance ?

Il s'exprimait bien, c'est la première chose qui traversa l'esprit de la louve. Mais comme il lui retournait la question comme elle le pensait, elle ne tarda pas bien longtemps et répondit alors à son tour, d'un ton neutre :

- C'est un joli nom, commença-t-elle en conservant une esquisse de sourire. Mon nom est Findis, il est moins original que le tient puisqu'il n'a aucune signification particulière.

Peut-être qu'il en avait une en réalité, sa mère ne l'avait certainement pas nommé ainsi au hasard non plus, mais c'était l'un des sujets qu'elle n'avait jamais eu l'occasion d'aborder avec elle parce qu'elle n'y avait jamais pensé ... En réalité, il y a beaucoup de conversations qu'elle regrette aujourd'hui même si elle s'efforce de ne pas y penser. Peut-être qu'elle pensait que le temps était devant elle, qu'elle n'avait nullement le besoin de profiter de la moindre seconde avec sa génitrice comme si cela serait la dernière ... Elle pensait que la vie était devant et que le reste apparaîtrait bien après, en réalité elle s'était trompée sur toute la ligne, elle avait sous-estimé la faucheuse et elle avait réalisé bien trop tard si tard que le sable s'était complètement écoulé dans son sablier. Elle regrettait tellement de choses lorsqu'elle y pensait, de l'évènement le plus anodin jusqu'aux conversations les plus importantes et sérieuses qu'elle n'aura jamais eu l'occasion de partager avec elle. C'était peut-être ainsi, écrit quelque part dans une page de son destin, comme disait-on parfois « c'est la vie ». Mais il n'était certainement pas prévu que cela se produise si tôt, sa mère pouvait vivre encore de bien nombreuses années, mais quelqu'un avait clôturé ce livre en écrivant ce dernier chapitre bien trop tôt. Findis rejeta ses pensées dans les abîmes les plus profondes et s'efforça de conserver cette apparence calme. Elle n'avait pas particulièrement relancé la conversation puisqu'il semblait visiblement que le jeune louveteau n'aimait pas vraiment parler de lui ou tout du moins, il n'aimerait pas lui donner une explication pour justifier sa présence ici.

 © Le Havre