Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Papas n'avaient pas accordé le droit de sortir faire la fête...Mais voilà que le petit Fjörd n'en avait qu'à sa tête, une fois de plus. Complètement déboussolé, il avait entendu d'autres enfants de son âge se diriger vers un endroit bien curieux, dont la légende racontait qu'il n'apparaissait qu'une fois par an. Intrigué par un phénomène aussi spécial, il avait décidé de s'y rendre seul. Bien entendu, il en avait fait part à sa sœur Aspjah, mais lui faisant promettre de ne rien dire. Après, ce n'est plus qu'une question de temps avant que ses parents ne le retrouve, totalement affolés, ce qui amusa intérieurement l'Hivernal en pensant à leurs têtes. Après tout, ce n'est pas comme s'il allait jouer avec le feu, une ballade ce n'est pas bien méchant et ça n'a jamais fait de mal à personne. Après tout, Papa Hjalmar il en faisait bien et il lui arrivait des ennuis dans ses histoires ! Le petit blanc espéra ne pas devoir se confronter à ce genre de magouilles à son tour...

Mais plus l'enfant errant avançait, plus la noirceur des lieux s'assombrissait. Il ne vit presque plus rien de par la brume spectrale qui engourdissait sa vision. Perçant l'obscurité de ses yeux si limpides, il débarqua dans un endroit bien étrange à son goût. Se fondant avec le terne parterre, un lac aux profondeurs abyssales tranchait dans l'unique contraste de la pénombre. Les eaux du charbon et du corbeau semblait vouloir engloutir quiconque risquait à s'approcher trop près. Chaque mouvement du liquide épais et ténébreux semblait enchanté, voir fantastique.

Alors que l'hivernal se rapprochait de plus en plus du lac sans fond, son petit cœur se mit à battre de plus en plus vite. De l'appréhension ? De la crainte ? Il fallait vaincre tout cela, se disait-il. Il ne voulait pas être le petit pleurnichard craintif, il valait mieux que ça. Il prit une grande inspiration, le faciès toujours neutre, ignorant le tremblement de ses pattes et de sa minuscule truffe rose bonbon.

Son pelage blanc si immaculé était comme une tâche dans ce paysage si lugubre.  Fjörd s'était décidé à marcher le long de la berge. Cette fois oui, il jouait avec le feu. Mais sans le savoir. Contemplant les eaux de son regard brillant, il ne vint pas à apercevoir son si pur reflet. Quel gâchis, se dit-il.

Aucun des enfants n'était venu dans ces parages. Sûrement trop inquiétant pour eux, ces peureux... Au moins, il était bien content d'être seul et loin de tous ces trouillards. Lui au moins, il n'était pas comme son père le lion à faire le fière avant de hurler comme une fillette au moindre bruissement de feuille ! Le blanc se dit qu'il avait plus le caractère posé de son autre papa, même s'il se trouvait bien plus brave que les deux réunis. Cependant, c'est ce qu'il se forçait à dire à répétition, avant qu'une mauvaise surprise pourrait survenir à tout moment...

Alors que l'anodin immaculé s'était penché plus proche de l'eau aux reflets de nuits, il entendit un bruit sourd non loin, comme un cri aiguë. Il se redressait furtivement, tous les sens aux aguets et chercha de ses limpides saphirs la provenance de cette souillure auditive. Se mettant à flairer l'air de sa truffe bonbon, il reconnu l'odeur qu'il pu assimiler à la Solitaire croisée quelques jours plus tôt sur son propre territoire.

Cependant, il n'aperçut rien. À part un curieux mouvement vers les arbres faiblards qui tendaient leurs tentaculaires branches vers la nuit, comme pour cueillir les étoiles. Ignorant sa peur et son appréhension, il prit la peine de voir ce qu'il se tramait, après s'être décalé de la rive par pur précaution. Savant pertinemment que ce choix n'était que pure folie, il se dit que ses pères seraient peut-être fiers de sa tentative. Même si, dénué de tout bon sens, c'était surtout son intense curiosité qui menaient sa petite bouille vers l'endroit si sombre.

Se rapprochant de plus en plus de la source du hurlement inattendu, il perçu de plus en plus une silhouette grelottante derrière l'un des arbres cadavériques. De ses perçant yeux de lumière, il jaugea la vue présentée devant lui. C'était une louve, d'environ son âge à en juger par sa taille naine. D'une part, le limpide fut rassuré. D'autre part, il aurait souhaité faire face à quelque chose de plus mâture, de plus...intéressant à percer.

Mais l'étrangère avait un air bien étrange sur son visage. Sa bouche d'une taille incommensurable en était déjà un, mais son regard pétrifié plaqué sur son visage crispé donnait comme une vision d'horreur à Fjörd qui se mit à s'inquiéter. Qu'avait-elle vu de si effrayant pour être mise dans un état aussi excessif ?

Il se mit à la trouver ridicule, pleurnicharde même à avoir abandonner si vite dans ces lieux de terreur. Emplit d'un orgueil soudain, Fjörd se sentit ainsi plus adulte à ne pas avoir peur contrairement à la louvette. Cependant, rien ne pu la faire cesser et peut-être que les deux courraient un grave danger. De sa petite frimousse, il décida alors de lui parler :

-T'es qui ? T'as vu un fantôme pour faire la chochotte comme ça ?

Son ton était peut-être moqueur, mais au fond de lui il craignait vraiment qu'un monstre surdimensionné surgisse derrière son être...

Fjörd ne saisit toujours pas la situation et le comportement de la louve. Elle avait l'air encore plus paralysée lorsque l'enfant se rapprocha d'elle. De ses grands yeux curieux, il fixa avec étonnement les moindres faits et gestes de l'individu. Il commença même à douter de l'existence de la Solitaire. Peut-être n'était-elle qu'un fantôme ou un fruit de son imagination manipulé par les Terres d'Halloween. Peut-être que ce n'était que sa propre conscience qui lui jouait des tours à force de refouler ses peurs.

La louvette posa sa patte sur le doux et limpide pelage de Fjörd. Très vite, une expression de dégoût le submergea. Il ne trouvait pas la louve très propre au départ, il la jugea même sale, squelettique, comme si elle ne s'occupait pas d'elle-même. De puis, son sourire interminable lui donnait un air dépravé qui faisait douter quiconque d'un esprit sain. Se reculant par pitié, il rejeta la patte de la louve rapidement, de peur que sa parfaite robe ne soit tâchée des saletés des coussinets de l'individu.

Il l'écouta déverser ses paroles comme un torrent de rapides. Le petit blanc avait du mal à suivre, de part à la vitesse dont elle déferlait les mots mais aussi par le non sens de ses dires. De quoi parlait-elle ? C'est vrai qu'il n'avait rien à faire ici, mais comment elle le savait ? Savait-elle qui il était ? Et puis, n'était-elle pas un enfant aussi après tout ? Seulement, sa manière de parler pouvait faire douter de la dernière question rhétorique.

Il la dévisagea une dernière fois, ne sachant pas quoi faire. Il aurait bien aimé s'amuser à l'effrayer un peu plus, mais il était trop confus par la situation pour tenter quoi que ce soit. Ça se trouve, tout ça n'était qu'un jeu, rien de plus. Mais cette hypothèse était bien trop étrange pour que ce soit le cas.

Enfin, après un court moment d'incompréhension, il lui répondit.

-Tu sais pas qui je suis, et je sais pas qui t'es non plus. Toi aussi t'es qu'une enfant alors j'ai le droit d'être là aussi c'est pas chez toi ! Et si j'ai mes papas mais ils savent pas que je suis là...Enfin plus pour longtemps.

En effet, ses parents ont bien du se rendre compte de sa disparition et s'affoler comme pas permis. De plus, si ils souhaitaient le retrouver, ça ne devait pas être bien compliqué puisque les Terres d'Halloween vendait du rêve à tous les enfants du coin. Et puis, ils n'avaient qu'à faire leur magie bizarre avec leur patron pour savoir où il se trouvait...

L'hivernal se rendit compte que la Solitaire noyait ses yeux dans l'effroi. La terreur avait tellement prit son emprise sur elle qu'elle fut submergé par des frissons dont des larmes menaçaient d'en découler. L'immaculé trouva cela étonnant et écarquilla ses yeux, se demandant bien ce qu'il se tramait d'aussi grave pour qu'un tourment d'émotions la prennent autant.

La louve lui avait férocement craché ses paroles à son doux visage, comme si elle restait sur ses gardes. Le jeune loup en fut presque offensé d'être traité d'une telle manière, toujours aussi confus par la situation présente.  Il n'avait pourtant rien dit ni fait de particulier, et pourtant elle avait bien l'air prête à bondir à tout instant. Ou plutôt, fuir à tout instant.

Il la fixa silencieusement pendant un moment encore, espérant qu'elle se calme. Sauf que cette dernière avait le cœur qui battait fort et Fjörd arrivait à le percevoir tant elle tremblait sur le haut de ses pattes frêles. Il fut encore trop jeune pour pouvoir se moquer d'elle, cela aurait été d'une immense cruauté que de tirer moquerie de son cas aussi fragile. Et puis, l'hivernal ne comprit toujours rien à la situation.

En revanche, il ressentit une profonde pitié à son égard. Pas assez pour en avoir lui aussi les larmes aux yeux, mais assez pour savoir que de nombreux tourments l'habitaient. Au final, la Solitaire ne lui apporterait rien. Elle n'avait pas l'air de se remettre de tous ses états et répétait les mêmes choses insensées depuis un moment déjà, et Fjörd en eut rapidement sa claque.

Il se mit à prendre un regard plus menaçant, qui aurait pu être bien ridicule du haut de ses quelques centimètres de bambin, mais il savait que montrer un peu ses minuscules émailles lisses pourraient réussir à maîtriser la brune.

-Arrête de parler, tu fais trop de bruits c'est énervant. Calme toi, t'es qu'une gamine. Moi je dis que c'est toi qui a peur ici, je suis tout seul mais je m'en fiche mais toi par contre tu te mets à chouiner pour rien du tout. Tu devrais d'abord dire ce que tu me dis à toi-même.

Ainsi ses paroles venimeuses dites, il passa devant l'interlocutrice en balanyant la poussière du sol de sa queue. Il partit dans son nuage de fumée, fière de ses propos alors qu'il n'avait pas à l'être. L'immaculé comptait bien poursuivre son chemin, sans qu'un stupide enfant ne vienne l'embêter encore une fois. Et puis, il veut vivre des péripéties intéressantes, pas devoir se confronter à une gamine incapable de se calmer.