Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Ʃkaemp はは

Il n'y croyait pas. Il ne comprenait pas. C'était au-delà de ses forces, au-delà de sa compréhension. Jamais il n'avait vécu cela, jamais il n'avait observé une telle situation. Malgré tous ses millénaires, malgré son expérience et malgré son immense pouvoir, il sut :

Il avait perdu.

Peur était un être fier, un être arrogant. Cruel, oui il l'était. Joueur, il l'était davantage. Mais Peur était également un être intelligent. Il savait reconnaître une défaite lorsqu'il en voyait une, même si les causes de son échec lui échappaient. Comment avait-il pu perdre ? Il était puissant, immortel, et pourtant les loups l'avaient affronté avec une énergie qu'il ne connaissait pas. Il était venu pour détruire, il se retrouvait brisé. Son esprit impuissant contemplait les ravages que l'assurance des loups faisait subir au monde qu'il avait créé : les tombes tombaient en poussière, l'herbe noircie retrouvait sa jeunesse d'antan, le ciel noir s'illuminait d'une douce lueur...Et dans ce paysage de renouveau, Peur se tenait, silencieux, immobile, tentant de comprendre son erreur sans que son esprit divin n'en ait la possibilité.
Peur sentait quelque chose d'étrange l'envahir. Il crut tout d'abord avoir été blessé lors d'un de ses combats avec les insolents habitants de Four Seasons, mais il savait qu'il n'avait aucune blessure. Il crut ensuite ne subir que les contrecoups de la destruction du monde qu'il avait créé sous la conviction des loups, mais il se savait trop puissant pour cela. Non, ce que ressentait Peur allait au-delà de ces sensations. Le triste Sire comprit alors ce qui le paralysait, tandis qu'il sentait les loups l'observer.

C'était de l'angoisse.

Peur avait peur.

Ce n'était pas possible. Ce n'était pas réel. Comment un être comme lui pouvait craindre des êtres comme eux ? Ils étaient faibles, craintifs, mortels et insipides.

Oui, mais ils n'avaient plus peur de lui.

Il leva les yeux vers le ciel et l'observa quelques instants de son regard sans âge. Un son retentit alors dans l'obscurité, un son déchirant, horrible, douloureux. Ce son, Peur l'exhalait sans même réagir, sans même y penser. Son corps se transformait encore et encore, prenant les différentes formes qu'il avait utilisé contre les pathétiques loups : flammes, père décédé, humain, loup aveugle, famille détruite, son corps sans forme ne cessait de se mouvoir, tandis que des lambeaux d'angoisse se détachaient de lui pour chercher une ultime proie. D'innombrables yeux s'ouvraient et se fermaient dans cet amas de formes, tandis que le son retentissait encore et encore :
C'était un hurlement.

"- Ce n'est pas fini. Ce ne sera jamais fini. Je serais toujours là, dans vos cœurs, vous détruisant de l'intérieur, hantant vos nuits et troublant vos jours. Vous pensez avoir gagné une guerre, mais ce n'était même pas une bataille. Un jour ou l'autre, quelque part, vous succomberez à mon pouvoir.
Je suis Peur.
Et ma fête vient de se terminer."

Alors le corps de Peur explosa en des milliers de lambeaux qui pénétrèrent les esprits des loups, tandis que leurs pattes se dérobaient sous eux et que leurs yeux se fermaient dans un sommeil profond.

Quand ils se réveillèrent, dans le monde qui était le leur, il ne restait rien de Peur.

Rien d'autre qu'un sentiment de victoire et d'angoisse entremêlé.

Rien d'autre qu'un souvenir.