Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

De la tanière de maman, on voit très bien le lac gelé.
Depuis qu'on est assez grands, maman nous laisse sortir jouer sur le territoire hivernal. Mais moi, l'endroit que je préfère est ici, au lac gelé. C'est tout beau et il y a de la place pour voler. Les autres endroits sont souvent trop vides ou alors on n'y voit pas assez le ciel. Ici c'est dégagé et y a des poissons sous la glace. Je n'ai pas la patience de pêcher, mais j'adore voler au dessus de la couche de glace.
Je vole de plus en plus haut maintenant. J'ai envie de toucher les nuages, mais on dirait qu'ils font exprès de s'éloigner toujours plus haut pour m'en empêcher. Qu'à cela ne tienne, je les rattraperait quand même.

Je prenait mon élan sur la rive en courant, puis je déployait mes ailes et m'élevait sur une dizaine de mètre avant de redescendre. L'air est moins facile à respirer en hauteur.
Entêtée, je recommencait plusieurs fois, jusqu'à suffoquer. Courir et voler aussi vite accélerais ma respiration et sans air pour combler mon besoin, je finissait par m'épuiser.

Dans un ultime essaie, je fini par perdre la vue quelques secondes. Quand je la retrouva, je réalisa que je tombait. Je repris équilibre, associant mon pouvoir à mes ailes et plana doucement en formant un cercle autour du lac. J'avais des étoiles devant les yeux, alors je secoua la tête. Erreur que je n'aurais pas du faire, car cela changea ma trajectoire et j'atterrit en glissant sur le lac. L'élan me précipita au centre.
La fatigue paralysait mes ailes et mes pattes, j'essayais quand même de bouger, mais je glissais piteusement.

Vexée d'avoir perdu toute la grace que ma descente aérienne m'avait offerte, je plantais mes griffes dans la glace en boudant pour avancer. Mais cela eu pour effet de la fissurer. Ma bouderie se transforma en peur. Je n'osa plus bouger rien d'autre que mes yeux, cherchant frénétiquement une solution autour de moi. Mais j'étais au centre du lac, mes ailes pendaient sur mes flancs et les fissures m'entouraient, menaçant de craquer à tout instant.

Je ne pouvait pas rester là, sinon j'allais tomber dans l'eau glacée du lac et finir congelée. Et même si on venait me sauver, je me ferais sévèrement gronder par papa et je n'aurais plus le droit de venir m'amuser ici.

Reprenant mon courage à deux pattes, je bougea lentement mes ailes pour les élever au dessus de moi, puis je sauta. Je sentit la glace se briser sous mes pattes, mais j'atterit un peu plus loin en planant à quelques centimètres de la surface du lac. Je glica une fois de plus, mais cette fois en direction de la rive que je rejoint avec soulagement.

Je m'étala dans la neige en lançant au lac un regard fier. Je lui avait échappé toute seule comme une grande. Mais maintenant, j'étais complètement vidée par tous ses efforts.

J'entendis un bruit derrière moi et souleva ma tête. Quelqu'un m'avait vu et approchait.

Blue avait en tête de visiter un peu les territoires autres que ceux n'appartenant à personne. Elle risquait de faire des rencontres impromptues mais tant pis il fallait bien qu'elle connaisse un minimum le monde sur lequel elle se trouvait. Elle ne se sentait pas très à l'aise. Au milieu de tout ce blanc sa fourrure sombre était bien trop voyante. La neige ne lui rappelait pas vraiment de bons souvenirs. Elle lui faisait trop penser à un autre monde qu'elle avait quitté par miracle. La louve bleue commençait à avoir froid. A force de rester sur des territoires assez tempérés son poil était devenu moins épais. Ici, le froid était mordant et l'air silencieux. Blue agita les oreilles. Il lui avait semblé entendre un bruit. Elle tourna la tête vers sa gauche. Oui, elle avait bel et bien entendu un craquement sinistre. La louve bleue partie au petit trot dans cette direction.
Après avoir couru sur une centaine de mètres Blue s'arrêta net. Elle avait sous les yeux un immense lac qui devait être recouvert de glace il y avait à peine quelque instants. C'était le bruit de la glace brisée qui l'avait menée ici. Sauf que de la glace, vu la température de l'air ambiant, ne pouvait pas craquer ainsi toute seule. Elle comprit lorsqu'elle vu deux petites ailes colorées dépassées de derrière une congère. La louve ne s'étonna pas de cette particularité. Willy le petit du printemps qu'elle avait rencontré quelque jours plus tôt en possédait aussi. Elle s'avança à pas feutrés. Un loup blessé pouvait se montrer agressif même si on s'avançait avec les meilleures intentions du monde. Elle vit le petite frimousse mi étonnée mi apeurée d'un petit. Le louveteau était tout blanc et seules ses ailes et le bout de ses pattes se détachaient sur la blancheur de la neige et de son pelage. Blue n'aimait pas trop les petits mais ne pouvait pas laisser quelqu'un mourir de froid ici.

- Bonjour, aurais-tu manquer tomber à l'eau ? J'ai entendu la glace se fendre. As-tu besoin que je t'aides ?

De toute façon elle n'avait rien de mieux à faire que d'offrir ses services à quelqu'un qui en avait besoin.

Mon regard croisa celui bleu clair d'une louve toute bleue, mais foncé. Elle me regardait toute entière.
Je commençais à sentir des picottements dû à mes blessures aux pattes quand j'avais enfoncés mes griffes dans la glace dur et gelée. J'étais toute engourdie des ailes.
La louve bleue, je ne la connaissais pas. Mais je ne connaissais que peu de loup sur le territoire hivernal, elle pouvait très bien en être.

"- Bonjour, aurais-tu manquer tomber à l'eau ? J'ai entendu la glace se fendre. As-tu besoin que je t'aides ?"

Elle n'avait pas l'air méchante et proposait de l'aide. Je répondis avec un sourire:

-Merci madame toute bleue. Je voulais toucher les nuages, mais j'ai été trop haut. Ma tête a tournée et j'ai du redescendre mais ...

J'hésitais, honteuse.

-J'me suis loupée et je suis tombée au milieu du lac. J'ai eu très peur.

Par contre, j'étais fière qu'elle voit que je m'étais sortie toute seule de ce mauvais pas.

-Je sens plus mes ailes et mes pattes me pique, finis-je par conclure.

Je me rendais compte de la situation dans laquelle je me trouvais, sans plus pouvoir marcher ni voler. Mais je n'avais pas peur, la louve était là pour s'occuper de moi. Je la regardais avec attention en attendant de voir ce qu'elle comptait faire pour m'aider.

Madame toute bleue ? Ce commentaire fit luire d'amusement dans ses yeux bleus ce qui s'apparentait pour elle à un sourire. Cette petite louve avait eu de la chance d'avoir des ailes. Toucher les nuages, ce serait bien n'empêche. Blue leva la tête vers le ciel comme ci, par ce simple geste, des ailes allaient pousser sur son dos. Elle était impressionnée par le courage de la petite. Sa témérité lui plaisait bien de même que sa sincérité. Elle n'étais pas obligée de lui raconter tout ça. La louve bleue se serait contentée de la dernière phrase. Elle ne voulait pas connaître sa vie.

- Fais moi voir tes pattes s'il te plais ?

La petite s'exécuta et je pus voir que ses coussinets étaient parcourus d'une multitudes de petites coupures. Rien de bien grave mais elle n'allait pas pouvoir marcher dans l'immédiat. Il faudrait qu'elle retourne chez elle. Blue sentit qu'elle allait être de babysitting. Il allait falloir quelqu'un pour la ramener chez elle. Elle espérait que ses parents n'avaient pas une dent contre les solitaires. Déjà il fallait que la petite se lèche les pattes pour enlever les restes de glace pris dans les petites blessures.

- Lèche tes pattes, il faut que les derniers bouts de glace.

La louve restait sur ses gardes. Elle savait que la petite était dans une mauvaise posture. Un animal dans l'incapacité de se déplacer n'était rien d'autre qu'une proie.

La louve bleue me demanda de montrer mes pattes, ce que je fis.

- Lèche tes pattes, il faut que les derniers bouts de glace sur tes pattes.

Je lêchais mes pattes avec précaution, ça piquait et le gout n'était pas bon. Je me mettais un peu de sang sur le museau en passant.
Quand j'en eu terminé, je plongea mon museau rouge dans la neige pour me débarasser du liquide chaud. Le rouge et le blanc vont bien ensemble.
J'essaya de bouger mes ailes, mais rien n'y fit, elle restèrent étalées, l'une sur mon flanc, l'autre dans la neige.
Je m'assit avec difficulté, je devais éviter de poser mes pattes sur le sol avec deux ailes devenues lourdes et inutiles pendant de mes épaules.
La dame bleue surveillait autour de nous. Je ne me posais pas vraiment la question de savoir de quel clan elle venait, ça m'était parfaitement égal. Je n'avais pas d'opinion sur les autres clans, cela ne préoccupait pas le louveteau que j'étais.
Je me contentais d'attendre la suite, posant mon regard attentif et éveillé sur la jolie louve bleue qui avait la gentillesse de s'occuper de moi.

La petite fit ce que Blue lui demanda et essuya son museau dans la neige. Tâche rouge au milieu de l'étendue immaculé. La louve restait attentive. Elle ne savait pas trop quoi faire de la petite qui semblait véritablement exténuée. Elle s'était assise mais se tenait sur la pointe des pattes. Si elle avait pu se mettre sur la pointe de ses griffes pour éviter tout contact avec la neige froide elle l'aurait fait. Il fallait qu'elle rentre chez elle ou que qu'un membre de son clan l'y raccompagne. La louve bleue savait que les clans laissaient en général les solitaires tranquilles mais si elle se ramenait avec un louveteau ensanglanté entre les dents elle aurait toutes les chances de mourir avant même d'avoir pu s'expliquer. Elle orienta son esprit sur une conversation plus inoffensive. Elle avait tout le temps de trouver un moyen de ramener la petitoune chez sa maman.

- Comment t'appelles tu ? Tu fais partie du clan de l'hiver ?

La louve se sentait fondre devant la petite qui se tenait à peu près droite malgré la douleur de ses pattes et la fatigue. Un vent froid s'engouffra dans le pelage de Blue. Elle frissonna. Vraiment sa fourrure n'était plus assez épaisse pour la protéger des rigueurs de l'hiver.

"- Comment t'appelles tu ? Tu fais partie du clan de l'hiver ?"

Je souris, cette question apporterait une réponse que j'adorais donner, je levais la tête avec fierté:

-Je suis Melinya, seconde fille des Alpha Kiba et Herenya du clan de l'hiver.

Je remuais ma queue, oubliant quelques instants ma fatigue. Me rappellant la politesse que maman m'avait apprise avec sévérité, j'ajoutais:

-Et vous madame ?

Je me posais la question, étais-t-elle hivernale ? Je réalisa que si elle ne l'était pas, papa serait surement pas content qu'elle soit ici. Pourtant, elle m'aidais, c'est qu'elle était gentille de toute façon. Mais si c'était une automnale, alors papa serait surement moins sévère. Le grand-automnal-qui-joue-avec-le-feu était un Alpha lui aussi et je l'avais déjà rencontré. J'avais vu que papa et lui s'entendaient bien.
Si la dame n'était ni hivernale, ni automnale, je devrait la prévenir que papa et maman seraientt pas contents de la voir. Mais dans ce cas, comme ferait-elle pour me ramener à la maison ?
Réfléchir à tout ça m'agaçait, les histoires de grands sont vraiment compliquées et pas pratiques.Je me concentra donc sur sa réponse.

La fille des Alphas hivernaux ?! Vraiment il ne manquait plus que ça. La situation de Blue devenait de plus en plus délicate. Elle ne pouvait décidément pas ramener la petite chez elle sans risquer sa peau. Mais elle ne pouvait pas non plus la laisser ici mourir de froid ou être emportée par un rôdeur quelconque.
Pour la première fois, et sûrement la dernière, elle voyait enfin un avantage au monde d'où elle venait. Il n'y avait pas vraiment de clans même si les loups se regroupaient en petites bandes. De toute façon leur nombre réduis ne leur permettait pas de se faire la guerre ou de se préoccuper de questions futiles de territoire. Les territoires n'étaient pas les leur mais ceux des humains qui voulaient les abattre tous. La louve bleue agita les oreilles seul geste montrant son agacement, elle n'aimait pas repenser à cette époque de sa vie et elle répondit donc à la petite plutôt que de se laisser sombrer dans la mélancolie.

- Je suis Blue, solitaire et simplement de passage sur le territoire de l'Hiver.

Ces paroles étaient bien futiles. La petite devait bien savoir qu'elle était une solitaire. Les loups des clans avaient tous l'air de connaître l'odeur des autres clans. Il était donc quasiment inutile de se présenter.
Blue continuait de réfléchir au moyen de ramener Melinya chez elle. Sans se faire tuer par ses parents par la même occasion, cela va de soit. Toute cette histoire commençait sérieusement à l'agacer. Pourquoi avait-il encore fallut qu'elle se porte à la rencontre des ennuis ?

- Je suis Blue, solitaire et simplement de passage sur le territoire de l'Hiver.

Ca devait aller alors, si Blue n'avait pas de clan, alors je pensais que papa et maman n'auraient pas à s'inquiéter ou à se facher. Après tout, si elle n'avait pas de clan, alors elle n'était pas leur ennemie. Mais en même temps pas une amie non plus. En fin de compte, cela ne plaira sans doute pas à papa, mais peut-être que maman serait plus calme. Mais en même temps, maman a un pouvoir qui fait très peur et qui est très dangereux et je ne voulais pas que ça fasse de bobo à Madame Blue.

Je soupirais, c'était vraiment bien trop compliqué. Tout ça était bien embetant et je n'aimais pas être embêtée, j'aimais trop la liberté.

J'inspira un profonde bouffée d'air que j'expira en créant un petit tourbillon d'air. Maman avait découvert mon pouvoir quand j'étais bébé. J'avais éternué si fort que j'avais décollé du sol et elle en avait conclut que je pouvais manipuler l'air avec ma bouche. Un peu plus tard, j'avais constaté en planant que je pouvais aussi le faire avec le reste de mon corps, mais je ne le contrôlais pas encore tout à fait. Pour le moment, je le faisait très bien avec ma bouche et un peu moins bien avec mes ailes et mes pattes.
Plongée dans mes réflexions, je dirigea mon cyclone miniature avec le bout de mon museau entre mes pattes. Je sentis mes plumes se soulever légèrement sous le soufle d'air et ça me chatouilla un peu.
Mon éclat de rire interrompit la magie et mon cyclone disparu.

Je releva la tête et croisa le regard de Blue qui me ramena à la réalité.

Blue quêta la réaction de la petite lorsqu'elle dit qu'elle n'appartenait à aucun clan. La petite devait avoir entendu parler des solitaires, elle n'avait pas l'air surprise. Par contre ses yeux reflétaient une grande perplexité. Elle semblait en proie à un dilemme intérieur. La louve bleue se doutait bien qu'elles étaient toutes deux en proie au même problème. Comment ramener la petite chez elle sans se faire étriper. Elle ne pouvait vraiment pas marcher dans la neige glacée vu l'état de ses pattes. Et puis, elle semblait réellement fatiguée.

Sous les yeux ébahis de la louve bleue la petite forma un mini cyclone qui vint s'éteindre entre les pattes de la solitaire. Cette dernière se tendit. Les petits printaniers lui avaient parlé de ces pouvoirs que possédaient les habitants de Four Season. Heureusement parce que sinon elle se serait surement jeté sur la petite. Pas par méchanceté mais par peur. Cette peur de l'inconnu qui la tiraillait depuis qu'elle avait débarqué sur ce monde de fou. Ne pas attaquer, ne pas attaquer. Elle se répéter cette phrase comme un leitmotiv contre la peur qui lui enserrait la gorge. Elle se sentait prise au piège par cette louve qui lui arrivait à peine au poitrail. Elle avait peur parce qu'elle possédait des capacité qui dépassait l'entendement de la louve bleue. Elle se força à se calmer. Elle ne voulait pas effrayer la petite. Elle s'obligea à adopter un ton calme.

- Qu'est-ce que c'est comme pouvoir ?

Elle avait réussi à gommer toute agressivité mais elle sentait qu'il restait un soupçon de peur. Elle espérait que la petite ne relèverait pas. Ferait comme si elle n'avait rien entendu. Blue ne voulait pas qu'elle se rende compte qu'elle n'avait pas de pouvoir. Elle sentait que c'était une sorte de tare ici.

Madame Blue avait un drôle de regard. Je n'arrivais pas trop à comprendre ce que c'était ni pourquoi elle me regardait comme ça.
Elle demanda:

- Qu'est-ce que c'est comme pouvoir ?

Je souris, j'aimais bien mon pouvoir, j'avais toujours eu l'impression d'avoir un ami avec moi. Même s'il était invisible, je le respirait et volait sur ses ailes.

-Je fais bouger le vent, répondis-je. Je sais pas encore très bien le faire, mais j'aime bien ça et maman m'a dit que c'est très utile pour voler. Maman aussi elle a des ailes et mon grand frère aussi, mais lui ne vole pas encore.

En repensant à maman, je me décida à parler de son pouvoir à Madame Blue, pour la prévenir.

-Maman, elle a un pouvoir qui fait peur. Elle peut changer les gens dans leur corps. Elle a dit... ADN, je crois. Elle peut faire du bien, mais aussi beaucoup de mal. Papa, il fait des choses avec la glace.

J'essayais de réfléchir à d'autres loups hivernaux qui auraient des pouvoirs moins dangereux pour Blue. Mais je ne trouvais pas, je ne connaissais pas encore beaucoup de monde.
Je me demandais aussi quel pouvoir pouvait avoir Madame Blue, mais je n'osais pas demander, c'était peut-être impolis.

L'insouciance de la petite lorsqu'elle lui parla de sa famille fit fondre comme neige au soleil la suspicion de la louve bleue. Cette petite n'était pas méchante pour deux sous mais par contre le pouvoir de sa mère lui faisait monter des frissons tout le long de son échine. Ce devait être bien pratique dans certaines situations mais dans le cas de Blue ramenant sa fille blessée ça serait pas pratique ça serait douloureux. D'un coup elle avait encore moins envie de se pointer à la tanière de la petite. Elle sentait la crainte que les loups avaient inspirés de là où elle venait. Ils se fondaient tellement bien dans le paysage qu'on ne les trouvaient qu'au dernier moment. Cette impression d'infériorité que l'on ne pouvait combler lui plaçait un bloc d'appréhension dans le ventre. Elle s'efforça de penser à autre chose afin de se calmer. Mais penser à quoi ? Son passé n'était pas heureux et, en plus, il était plein de trous. Elle s'était rendue compte que tout son passé proche lui échappait.

Elle ne pouvait dire si avant d'arriver ici elle était seule ou était dans un groupe. Elle n'arrivait pas à remettre la patte sur ce passé. De temps en temps elle revoyait une image et elle pensait avoir retrouvé sa mémoire mais non. L'image s'évanouissait et ses souvenirs restaient aux abonnés absents. Chassant ces pensées de son esprit Blue se reconcentra sur son problème présent. A savoir une petite louve aux ailes bleues qui maitrisait le vent mais qui avait les pattes en sang.

- Il va falloir que tu rentres chez toi. Tes parents vont s'inquiéter. Penses-tu pouvoir marcher ? Sinon il faudra que je te porte. Tes parents risquent-ils de m'attaquer ?

La louve avait décidé d'interroger la principale concernée plutôt que de se fatiguer à retourner ses pensées dans tous les sens. La petite était la plus à même à connaitre la réaction de ses parents.

"Il va falloir que tu rentres chez toi. Tes parents vont s'inquiéter. Penses-tu pouvoir marcher ? Sinon il faudra que je te porte. Tes parents risquent-ils de m'attaquer ?"

Il était certain que je ne pouvais pas marcher. Quand à la réaction de mes parents...

-Papa est occupé, il ne sera pas là. Maman est à sa tanière qui est tout près d'ici, elle attend qu'on rentre. Avec nous elle est tout le temps gentille, même si des fois elle est sévère. Je sais pas trop comment elle est avec les gens qu'elle connait pas...

Je fit un effort pour essayer de deviner ce que maman ferait.

-Maman n'attaque jamais sans raison, il faut avoir été méchant ou faire partie des printanniers, je sais pas trop pourquoi d'ailleur. Si elle voit que j'ai des bobos, elle aura peur et elle va peut-être t'attaquer. Il faudrait lui faire comprendre que tu n'es pas méchante dès qu'elle te voit.

J'essayais à présent de trouver un moyen de montrer que Blue est gentille. De nouveau, je créais un petit cyclone et l'envoyais loin devant moi, sur le lac. A distance, je controlais plutôt bien mon jouet.

-Ou alors, cacher mes bobos, dis-je distrètement.

Une fois de plus, la parole dispersa l'air du cyclone qui disparut.

La petite regarda ses pattes en faisant la moue. Blue interpréta ceci comme un "Non, mais t'as vu mes pattes espèce de débile comme veux-tu que je marche comme ça ?!" mais Melinya ne semblait pas s'offusquer de ma question, au contraire. Elle semblait réellement vouloir aider la louve bleue. En même temps si elle ne l'aidait pas ses chances de rentrer chez elle, et donc de survie, étaient bien minces.

"-Papa est occupé, il ne sera pas là."

Ca c'était un bon point. Un seul parent valait bien mieux que deux si elle devait leur ramener leur fille à moitié esquintée. Ceci dit la suite était bien moins rassurante quand à l'espérance de vie de Blue.

"- Maman est à sa tanière qui est tout près d'ici, elle attend qu'on rentre. Avec nous elle est tout le temps gentille, même si des fois elle est sévère. Je sais pas trop comment elle est avec les gens qu'elle connait pas... Maman n'attaque jamais sans raison, il faut avoir été méchant ou faire partie des printanniers, je sais pas trop pourquoi d'ailleurs. Si elle voit que j'ai des bobos, elle aura peur et elle va peut-être t'attaquer. Il faudrait lui faire comprendre que tu n'es pas méchante dès qu'elle te voit."

La louve bleue entreprit de traduire les paroles de la petite à sa manière. Sa mère était une bonne mère mais aussi une louve ultra protectrice qui lui sauterais dessus sans la moindre hésitation dès qu'elle verrait les pattes de sa fille couverte de son sang. Elle attaquerait et poserait les questions ensuite. Ce qui, en soit, était très mauvais pour la santé de Blue qui risquait de ne jamais pouvoir répondre.

"-Ou alors, cacher mes bobos."

La petite interrompit ses pensées. Elle parlait comme si ce n'était pas important mais cette idée fit dresser l'oreille à Blue. Cacher ses blessures ? En voilà une idée qu'elle était bonne ! Mais comment faire ... Blue ne savait vraiment pas comment s'y prendre. Mais peut-être que ...

- Tu penses que tu pourrais laisser pendre tes ailes devant tes pattes ? Après je pourrais te prendre par le cou ou même tu prendre sur mon dos. C'est comme tu préfères.

Ce devait être relativement faisable. Enfin elle le pensait. Après entre ses idées et la réalité il y avait souvent un peu de marge.

"Tu penses que tu pourrais laisser pendre tes ailes devant tes pattes ? Après je pourrais te prendre par le cou ou même tu prendre sur mon dos. C'est comme tu préfères."

Je n'eu pas besoin de réfléchir longtemps. Je savais que si on me tenais par la peau de cou, mes ailes pendaient et bougeaient dans tous les sens quand on marchait. En revanche sur le dos de Blue, mes ailes pendraient autour de moi, il me suffirait de déplacer un peu mes pattes avant sous mes ailes.

-C'est possible sur ton dos, répondis-je.

Jamais je n'aurais cru mes quelques mots lâchés en l'air aussi serieusement utiles. J'étais surprise et heureuse.
Madame Blue s'allongea pour que je monte sur son dos. Au prix de quelques petits efforts, je me hissais sur elle et elle se leva.
Je me sentais plus grande sur son dos et je regardais autour de moi avec curiosité en découvrant la vie sous un nouvel angle. Un hochement de tête de Blue me ramena à la réalité et je calais mes pattes sous mes ailes. Ce n'était pas très confortable, mais de toute façon on serait vite arrivée à la tanière de maman.
Je n'avais plus qu'à guider Madame Blue à travers les arbres.

La petite lui dit que c'était possible si elle montait sur le dos de la louve bleue. Cette dernière se coucha dans la neige afin que Melinya puisse grimper sur son dos. Ce qui ne se fit pas sans difficultés. Ses pattes étaient toujours douloureuse et même couchée Blue restait relativement grande. Après contorsions et quelques chutes supplémentaire la petite fut perchée sur le dos de la plus vieille venue à son secours. La louve fit une signe de tête à la petite, la prévenant ainsi qu'elle allait se relever mais aussi qu'il était temps qu'elle cache ses petites pattes blessées. Blue la sentit s'agiter sur son dos et en déduisit qu'elle s'était exécutée.

Elle se laissa guider par la petite voix venant de derrière ses oreilles. Ce n'était pas du tout agréable. Elle avait l'impression d'entendre des voix et de devenir folle. Elle ne savait pas du tout à quoi elle devait s'attendre de la part de la mère de la casse cou. C'est donc un petit convoi tendu qui se dirigeait vers la tanière des alphas hivernaux. Blue prenait garde de ne pas faire de geste trop brusques et laissait ses pattes glisser sur le sol avec légèreté pour que Melinya ne soit pas trop secouée, elle avait eu suffisamment de sensations fortes pour aujourd'hui.