Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

D’aussi loin que le chaton puisse se souvenir, il n’était jamais venu dans cet endroit. C’était un endroit très mystérieux… Il aimait bien le mystère! Ça avait son charme. Le temple qu’il avait exploré sur le territoire de l’Automne était aussi très mystérieux! Il s’y était plu, même si Hiji un peu moins. Cette fois, il était seul, mais ce n’était pas un temple rempli de piège, c’était juste une forêt. Les forêts, il connaissait bien, en général elles étaient ses amies. Celle-là en tous cas ne semblait pas vouloir faire exception à la règle. C’est donc le pas léger qu’il l’arpentait. Les sons lui parvenaient comme étouffés par la brume épaisse et les détails du décor lui étaient cachés. Chaque foulée amenait une découverte : un arbre, une plate, un trou, une bosse, un petit animal effrayé qui s’enfuyait. En tous cas, pour courir, ici, mieux valait avoir de bons réflexes, ou une très bonne connaissance du terrain.

Malgré tout cela, le chaton n’avait pas peur. Il était dans la forêt, elle était son amie, que pouvait-il donc lui arriver? D’ailleurs, cette atmosphère mystérieuse et magique qui transformait chaque élément du décor en petite découverte intéressante, ou voir même en petit trésor pour les yeux, lui donnait envie de jouer! Il aimait bien jouer. Bon, il était vrai que jouer à deux, c’est mieux, mais comme il était juste un, alors tant pis, il jouerait à un. À moins que… mais si! Il pouvait se créer un ami! Un ami tout en neige!! Tout joyeux, il se trouva un coin assez dégagé, une petite clairière. La neige était si basse ici, à cause de cette brume, il lui faudrait un terrain où il pourrait en accumuler s’il voulait construire un loup en neige! Ou un chat… oui, un chat de neige! En rigolant, le petit guérisseur se mis à la tâche ardue et complexe de se créer un partenaire de jeu. Il était pas très doué, il se doutait bien que ça ressemblerait pas du tout à un chat, mais ce n’était pas grave. La différence, c’est bien, il faut aimer la différence! Maeya en tous cas il l’aimait beaucoup! Il en était un, lui, de différent!

C’est le raclement de gorge qui tira le chaton de son état concentré. Les sons ici étaient si bien étouffé qu’il n’avait même pas entendu arriver… euh… il renifla un peu. Dur à dire si c’était un mâle ou une femelle avec toute cette odeur d’eau qui bloquait le reste. Le félin tourna donc la tête pour regarder qui était là. Un mâle. Définitivement. Il était quand même beau, malgré son air sévère. Il faisait un peu penser à Blailu. Mais Blailu il avait pas un air sévère il avait un air doux et compatissant, même quand il était en train d’agoniser!

« Excusez-moi? Que faites-vous ici? Vous êtes dans le clan des hivernaux, et je dois vous faire sortir d'ici au plus vite. »

Vous?? Confus, le chaton regarda autour de lui. Il n’était pas seul? Mais si, il l’était… il n’y avait personne d’autre! Juste son chaton de neige! Ça ressemblait même pas à un chaton! Il était pas vivant quand même! Et même si Maeya avait été un loup et qu’il avait pu avoir un pouvoir comme celui de donner vie aux bonhommes de neige, jamais il l’aurait fait! Pauvre chaton, ç’aurait été cruel! D’accord, il faut la différence, mais pas obligé de faire souffrir des pauvres petits chatons de neige tout déformés juste pour ça! Perplexe, le petit ramena son regard sur le grand loup.

« Désolé, Monsieur le loup, mais ce bonhomme de neige il est pas vivant, je suis tout seul. T’as pas à avoir peur, je vais pas te faire de mal! Je suis guérisseur, j’aide les gens moi. »

Il espérait avoir été assez convaincant. Quand même, puisque le chaton de neige semblait le mettre mal à l’aise, Maeya le défit soigneusement. La neige n’était peut-être pas vivante mais c’était pas une raison pour être brusque avec. Il se souvenait de la fois qu’il avait enterré Thorin dans la neige… Le souvenir lui tira d’ailleurs un sourire. Ce câlin il avait été bizarre, mais ça lui avait quand même fait du bien. Sa queue se mit à remuer et il laissa échapper un ronronnement. Au tiens, maintenant qu’il y pensait, il n’avait pas répondu à la question que lui avait posé l’Hivernal. Il avait été déconcentré par le « vous »… Il savait que les adultes aiment pas qu’on répondent pas à leurs questions (alors que eux ne répondent jamais aux questions des petits… où était donc la justice?) alors il reprit un air sérieux en déclarant :

« Je joue. Il me fallait une clairière, pour pouvoir rassembler la neige pour me faire un chaton de neige, parce que jouer tout seul c’est ennuyant. Je sais bien que c’est le territoire de l’Hiver, c’est pour ça que je suis ici… la neige, elle est ici, pas en Été! Mais pourquoi est-ce que je dois sortir de la forêt? Il y a quand même pas un feu! Si oui, y’aurait qu’à lui balancer de la neige! Alors où est l’urgence? Je suis en danger? Si c’était le cas, la forêt elle m’aurait prévenue… Les forêts sont mes amies, elles me le disent toujours quand c’est pas sûr pour moi. »

Ayant terminé de donner sa réponse à l’adulte, en faisant de son mieux pour n’omettre aucun détail (parce que ça aussi ils aiment pas… même quand tu fais pas exprès…), le chaton se remit à la tâche de démolir en douceur son ami de neige qui finalement était peut-être mieux mort que vif… il fallait vraiment qu’il s’améliore en bonhommes de neige…

Quand le grand loup ramena son museau à la hauteur de la tête du chaton, ce dernier lui fit un large sourire enjoué, avant de terminer de défaire son bonhomme de neige. Voilà, maintenant il ne restait plus que lui, le canidé ne confondrait plus et n’utiliserais plus le « vous ». Quand l’hivernal vint se placer devant lui, le chaton baissa un peu les oreilles. Il prenait la position sermon. La position qu’ont toujours les adultes avant de te faire des reproches. Mais qu’avait-il fait encore!? Il avait été gentil, il avait défait son bonhomme de neige, il avait été poli, il avait répondu à la question qu’on lui avait posé, alors qu’est-ce qui n’allait pas à la fin?

« La raison n'est pas qu'il y est le feu, la raison est que c'est dans ton intérêt. Si tu étais tombé sur l'un de mes camarades il t'aurait chassé à grand coup de croc. Maintenant suis moi, je vais ta ramener à la frontière, tu es allé beaucoup trop loin à mon goût sur le territoire. »

À grand coups de crocs? Qui oserait s’en prendre ainsi à un enfant? Un souvenir désagréable de sa rencontre avec l’un des guerriers du clan le fit frémir longuement. Tout compte fait, peut-être que oui, certains n’hésiteraient pas… Mais Blailu avait dit que tant qu’il ne s’aventurait pas trop loin, il serait correct! Il n’était pas allé aussi loin que la dernière fois, alors ce devait être bon, non? Il se demanda qui pouvait bien être ce loup. Peut-être que, comme Blailu, c’était un veilleur? Non, ce ne devait pas… Blailu avait dit, lors de leur première rencontre, que s’il l’avait croisé sur le territoire il aurait fait son travail et l’aurait attaqué. Si ce loup avait été un veilleur, il l’aurait alors attaqué, non? Peut-être pas. Son ami avait aussi peur des félins, avant de le croiser. D’ailleurs, s’il n’avait pas été mourant, jamais il n’aurait laissé Maeya le toucher. Alors c’était peut-être aussi pour ça. Intrigué, se posant plein de questions, le chaton ne bougea pas.

« Allons! Dépêche-toi! »

Quand la queue le traîna, le petit retint une moue de protestation. D’accord, d’accord! Là, il se mettait en route! Se dégageant de la queue, il se mit à marcher, suivant le grand loup. Mais qu’est-ce qui pressait tant, à la fin? Cette fois, il se décida à parler.

« Mais qu’est-ce qu’il y a encore? Pourquoi je dois partir? J’ai déjà promis de faire attention aux gros guerriers sadiques comme celui de la dernière fois! Je sais que les clans ils aiment pas les solitaire mais c’est injuste, à la fin! Je fais de mal à personne moi! J’ai sauvé la vie de Blailu! C’est lui qui m’a dit que je pouvais venir! Je veux juste jouer et me faire des amis, moi! C’est pas moi qui ai choisi de pas naître dans un clan et de pas avoir d’odeur! Vous êtes fatiguant, à la fin, à pas me vouloir que je vienne vous voir et vous aider! C’est pas juste! Après je dois rester toujours sur les mêmes territoires et puis je peux pas voir toutes les merveilles qu’il y a un peu partout! Aller quoi, je suis pas dangereux! Demandes à Blailu, il te le dira! »

Jouant très bien son rôle d’indigné (il l’était pour de vrai après tout), le chaton continua tout de même de suivre l’adulte. S’était jamais une bonne idée de décider d’un coup de se planter là tant qu’on a pas de réponse, ça énervait les adultes. Eux ils avaient le droit de le faire, par contre, mais les enfants non. La vie était vraiment trop injuste pour les enfants.