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Que sont réellement les étoiles à nos yeux de simple mortel ?

Le soleil déclinait déjà derrières les arbres et le vent balaya toute la chaleur de la journée. Voilà deux lunes que Sergueï avait quitté la guilde des Libres Lunes. A vrai dire, il était incapable de retrouver le chemin. Mais même si en avait eu la capacité, jamais il n'y retournerait. Lorsque les premières étoiles apparurent dans le ciel, le loup à la fourrure particulière sorti de sa tanière. Dévalant les collines d'une foulée allongée, Sergueï savourait les plaisirs d'une nuit fraîchement étoilée. La chasse était ouverte ! Même si le jeune adolescent était parfois un peu maladroit, facilement discret, long à la détente et particulièrement impatient, il lui arrivait d'attraper quelques grenouilles. Lorsqu'il apportait à son clan le fruit de ses exploits, il sentait toujours son poitrail se gonflait de fierté. Chassé de nuit était devenu un rituel, non, une obligation entre lui et lui. Traqué du gibier en plein jour n'avait pas révélé un bilan satisfaisant à cause de sa fourrure trop voyante, il faut dire, qu'un prédateur doté d'un pelage aussi semblable à la galaxie, en plein jour ne l'aidait pas. Alors, Sergueï avait décider de chasser de nuit et tout de suite, le résultat était sans appel.

L'adolescent pourchassé un insecte, une sauterelle plus précisément. La plupart des cerfs, lapins, sangliers et tout autre gros animaux de ce genre était assoupi à l'orée de la forêt, pas moyen de s'en approcher. Il le ferait, s'il n'était pas tout seul. Sergueï ne s'était pas totalement intégré à son Clan. Certains regards étaient méfiants, d'autres étaient accusateurs. L'ancien Libre Lune ne pouvait pas vraiment leur en vouloir, si un canidé venu de nulle part avait intégré son clan natal, sa première réaction aurait été la méfiance. L'estival se retrouva bientôt à la lisière d'une frontière ennemie. C'est sa chasse à la sauterelle qui l'avait mené jusqu'ici. Le pelage en sueur et l'envie de braver les interdit le poussa à la franchir.

L'air était beaucoup moins pesant et les feuilles dorées qui ornaient le sol lui donna envie de se rouler dedans. Les effluves de bois humide et de champignon sauvage emplissait ses narines. L'insecte échappa à son cou de patte lorsqu'il laissa son corps se frotter contre les feuilles de couleurs chaudes. Cet endroit était vraiment étonnant. Le caractère audacieux de Sergueï, le poussa à s'aventurer plus loin sur le territoire automnal.

Tous les sens en alerte, le gamin ne baissa pas sa garde. S'il tombait sur un soldat, son premier réflexe serait de l'attaquer pour se défendre, ce n'était pas la meilleure des conduites à adopter pour se faire bien voir aux yeux de son Alpha. Même, si d'ordinaire, l'éternel adolescent ne se préoccupait pas du regard d'autrui. Tandis qu'il pensait encore et toujours, ses pattes le menaient dans un lieu ou la végétation était plus dense. Lorsqu'il leva la tête vers la cime des arbres et qu'il aperçut qu'une partie du ciel, il ne put s'empêcher de juger ce territoire non conforme à ses goûts. Quelle pauvreté visuelle.

Quand Sergueï replaça sa tête, il aperçut soudainement un loup solitaire assiéger sur un grand rocher, contemplant les étoiles. L'estival haussa un sourcil. Il ne se rappelait pas l'avoir vu quand il avait franchi ce chêne. C'est sans se retourner, comme s'il attendait sa présence, que son interlocuteur commença :

« J'aurais dû me douter qu'en cette douce soirée, je ne serais pas le seul à venir en ce lieu. Mon nom est Legolas. »

Si ces premières paroles lancèrent un pic au jeune adolescent, sa voix et son odeur lui rappelait une personne qu'il connaissait. Sergueï inspira fortement, espérant reconnaître ce loup à la fourrure beige. Si sa mémoire n'était ni visuel, ni auditive, elle était olfactive. Pourtant, même en se concentrant de toutes ses forces, l'ancien Libre Lune ne parvenait pas à l'identifier. Legolas... Il l'avait peut-être croisé dans un rêve, ou peut-être pas... Décidé à élucider ce mystère, le canidé s'approcha et répondit d'un ton tout aussi chaleureux, du moins, du mieux qu'il le pouvait :

- Bonsoir, mon nom est Sergueï.

Sans plus attendre, l'adolescent se jette tout de suite à l'eau.

- Il me semble t'avoir déjà vu quelque part, ton odeur ne me dit rien. Tu appartiens à quel Clan ?

L'estival baissa la tête et la pencha sur le côté, se concentrant sur ses pensées. Il était certain de lui avoir déjà adressé la parole.

Son interlocuteur ne répondit pas instantanément. Trop occupé à observer les étoiles. Son attitude flegmatique excéda l'estival. Pour se faire entendre, le gamin dénicha une pierre qu'il fit rouler sous ses coussinets avant de la jeter. Aucune réaction, l'autre restait là, silencieux, à contempler la voûte étoilé. Il soupira bruyamment, se dandinant d'une patte à l'autre, attendant que sa patience atteigne son paroxysme, lorsque Legolas daigna finalement répondre :

- Je n'appartiens à aucun clan. Cela ne me sert à rien, je suis parfaitement bien tel que je suis.

Son ton empestait le mensonge improvisé. Sergueï avait toujours eu le don, hormis ses pouvoirs, pour détecter les simulacres de ses interlocuteurs. Bien entendu, il arrivait parfois de juger trop vite et son sixième sens était remis en question. Cependant, dans la situation actuelle, il était convaincu par son ressentit premier. D'autant plus que sa réaction était basée la défensive. Lui-même, agissait de cette manière, lorsque ses nouveaux camarades se permettait de lui poser des questions auxquelles il ne voulait répondre. L'estival s'avança de quelques pas, indigné, les traits de son visage se renforcèrent, exposant son authentique pensée. Toutefois, il s'efforça à demeurer calme pour répondre d'un ton égal :

- Pourquoi est-ce que tu mens ?

Le mystère suscite la curiosité et, avec tant de pressentiment entre ses pattes, le jeune adolescent ne pouvait laisser filer l'opportunité d'en savoir plus. Il se leva, puis s'approcha, lentement, la queue en panache. Au fond de lui, Sergueï avait déjà planifier la suite des événements. Legolas répondrait par la négative, alors qu'il s'avancerait davantage et n'aurait qu'à l'effleurer pour connaître des brides de son histoire. Il ne lui restait plus qu'à savoir si le jeu en valait réellement la chandelle. Et, même si ce n'était pas le cas, l'enjeu était simulant, dangereux voir, carrément irréfléchi. C'est pourtant ses caractéristiques spécifiques qui alimentèrent le gamin, celui-ci ne fonctionnant qu'avec ce type de carburant.

Le regard klein rencontra le gris pinchard, formant une vague polaire qui se déversa sur le pelage de l'adolescent, lorsque l'ancien descendit de son promontoire. Les oreilles plaquées en l'arrière, Sergueï lutta avec ses émotions pour ne pas laisser transparaître un comportement agressif, victime d'un stress ascensionnel. Toutefois, le fait que la commissure des babines de son interlocuteur bourlingue le long de son visage de manière agacé, démontra qu'il n'était pas tout à fait à l'aise avec son interrogation précédente. En relâchant ses muscles, l'estival sonda le moindre ses gestes. À commencer par une démarche lente, lui donnant un faux air d'estime de soi. Quand une feuille morte s'accrocha à sa pelisse et qu'il l'a dégagea d'un coup de patte, Sergueï en conclut que le vieux canidé, n'était pas d'un naturel fataliste.

- Pourquoi te mentirais-je ? J'ai répondu à ta question. Je te répète, je ne fais partie d'aucun clan, cependant cela ne veut pas signifier que je ne fais pas partie d'une bande ou autre chose, après tout qui c'est ce que je suis réellement ? Moi même je l'ignore.

L'estival plissa les paupières. Le fait de répondre à une question pour une autre question signifiait qu'un événement voulait être dissimulé par un masque destiné à couvrir la figure de son auteur. Son interlocuteur tentait la persuasion par la technique du méli-mélo. Méthodique roublarde, bien que trop courante. D'autant plus que d'amener la vérité subtilement pour la brûler ensuite était une preuve suffisante pour savoir que Legolas lui mentait. Alors qu'il ouvrit ses mâchoires pour répondre au quart de tour, l'ancien poursuit :

- Dit moi, pourquoi cherches-tu à m'approchais ? Habituellement les loups ne souhaitent ni me parler ni me toucher, hors toi, tu cherches à faire les deux. Aurais-tu un intérêt caché derrière tout ceci ?

Face à une opportunité trop bénéfique pour ses propres souvenirs, Sergueï changea de tactique, choisissant une ruse aux antipodes de la première. Sa queue se balançant dans la mesure du respectable, tandis qu'il laissa sa langue pendre de manière discourtoise le long de sa joue. Des gouttes de salive vinrent alimenté le sol sec, tandis qu'il rétorqua sans perdre son ton audacieux :

- Je voulais seulement jouer moi !

Il jalonna entre les chênes allégoriques du territoire automnal, explorant le territoire, la queue en panache. À proximité, une masse de pierre se dessina entre les branches entremêlés. L'édifice happa sa curiosité, si bien qu'il s'y enfonça en faisant signe de le suivre, d'un geste ample de la queue. Se frayant un passage parmi les buissons à feuilles persistantes et les multiples roncières, l'estival put sentir une sensation différente sous ses pattes. L'herbe rase céda sa place à de petits cailloux qui se plantèrent dans ses coussinets épais. Le gamin s'ébroua, découvrant les ruines d'un temple ancien qui se matérialisa à quelques longueurs de queue. L'estival proposa spontanément une exploration prolongée à son interlocuteur. Si cette petite visite n'avait rien d'anodine, Sergueï ne tarda pas à réduire la distance de sécurité qui séparait les deux canidés, comme un louveteau, voulant se dérider avec ses nourrices.