Mon âme s'en est allée avec toi
Melda avait disparu depuis trois jours. Des jours interminables qui semblaient le ronger. Qu'était-il arrivé à l'automnale ? Il ne savait pas et même en visitant le Puits de Lune il n'avait trouvé nulle trace de sa très chère compagne. Il avait laissé en plan ses obligation pour la Guilde pour la première fois. Il rattraperait bien son retard plu tard, ça n'avait aucune importance. Du moins ça n'en avait plus. Jamais elle ne l'avait laissé sans nouvelles plus d'une journée. Et puis, surtout, elle n'aurait pas abandonné ses enfants. Une boule d'angoisse était venue se loger dans sa gorge, l'empêchant presque de respirer. Son estomac se tordait douloureusement. Jamais il n'avait été aussi inquiet. Il parcourait les terres automnales à sa recherche. Son sombre pressentiment courant sur ses pas, ne le quittant pas d'une semelle. Une odeur l'alerta. Une odeur métallique. Une odeur de panique. L'odeur du sang qui cristallisait toutes ses craintes. Tsume se mit à courir plus vite qu'il ne l'avait jamais fait. Son cœur battait trop fort. Son souffle était court. Ses pattes le brûlaient. L'odeur du sang se faisait de plus en plus forte, le prenant à la gorge. Lorsqu'il parvint à la source il écarquilla les yeux et hurla. Dans ce cri il y avait toute sa surprise et son horreur. Il avait retrouvé Melda. Mais de sa belle compagne pleine de vie il ne restait qu'un cadavre ensanglanté. Il se précipita dans sa direction, les larmes coulant sans qu'il ne parvienne à s'arrêter ou à se raisonner. Tout ce qu'il voyait était le corps de sa belle. Elle était couverte de son propre sang. Tsume resta prostré pendant ce qui lui sembla être des heures. Lorsqu'il parvint enfin à se calmer il nota que cela était le fait d'un loup. Un loup dont l'odeur s'accrochait encore légèrement aux poils de Melda. Une odeur sucrée d'estival mais pas seulement. elle se mêlait à quelque chose de plus malsain. Le LibreLune savait que jamais il ne l'oublierait et qu'un jour il se vengerait. Une froide détermination s'était emparée de lui, tentant de faire taire la douleur sans nom qui prenait peu à peu possession de son âme. Il commença à lécher le pelage crème, ôtant avec une infinie délicatesse le liquide carmin qui le souillait. Il devait apprendre la terrible nouvelle à ses enfants et il était hors de question qu'ils voient leur mère dans cet état. Il ne pourrait refermer les plaies béantes mais il pouvait au moins la rendre plus présentable. Les larmes coulaient sans s'arrêter, laissant deux sillons plus foncés sur le pelage gris fer. Le soleil baissait déjà lorsqu'il partit en direction du Labyrinthe criant, l'ancienne Guérisseuse placée sur son dos. Il avançait à pas précautionneux, l'air grave. Tsume s'était replié sur lui même, tentant de tenir la douleur au loin, de ne pas penser à la douleur que ressentiraient Elwyn, Takeo et Liya.
Quand ils le virent arriver leur réaction déchira une nouvelle fois le cœur déjà en lambeaux du LibreLune. Il serra ses enfants contre lui, tentant de les rassurer comme il le pouvait. Ils se soutiendraient, avanceraient tous ensemble dans la même direction. Ensemble ils parviendraient à surmonter ce drame. Le pelage du grand loup gris luisait maintenant d'une douce lueur argentée. La Lune était haute dans le ciel, presque pleine. elle nimbait la scène d'une lueur presque macabre. Tsume se détacha des siens et se mit à creuser sous l'arbre, juste à côté de la marre, juste là où Melda aimait à se reposer. Là où il lui avait déclaré sa flamme. La terre était meuble et facile à déplacer. La tombe de sa compagne fut rapidement creusée et, avec l'aide d'Elwyn, il déposa le corps à cet emplacement. Melda avait l'air sereine. On aurait pu croire qu'elle dormait s'il n'y avait eu les traces rouges qui barraient son flanc. Le LibreLune pencha la tête vers l'arrière et poussa un long hurllement, expression de sa peine alors même qu'il ne parvenait plus à verser la moindre larme. Il sentit petit à petit une grande chaleur l'irradier. Son pelage brillait de plus en plus fort jusqu'à prendre une couleur laiteuse. Une couleur de Lune. Les rayons lunaires semblaient l'entourer et ne faire qu'un avec lui. Lorsqu'il déposa un dernier baiser à sa belle son corps à elle aussi se mit à luire et la tombe se combla progressivement d'un cristal pur. Si pur qu'on pouvait continuer de contempler l'automnale. C'était là le dernier présent qu'il pouvait lui faire.
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