Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Après des kilomètres et des kilomètres de marche, revenant du territoire estivale après ma rencontre avec cette bouldog irritante et une grosse nouille brune. Me voilà enfin en territoire neutre. Une grande étendue d'herbe s'offrait à moi, grouillant de vie. Il y avait là peut-être, un millier d'insecte qui vivaient paisiblement dans la verdure, sans se soucier des clans, ou de quoi que ce soit. Nous vivions dans le même monde mais bien loin de la même réalité. Peut-être il y avait-il des meutes d'insectes ? Qui montaient les uns contre les autres des guerres incessantes. Je ne comprenais pas pourquoi il y avait quatre clans. C'est vrai, si nous vivions les uns et les autres dans une seule et même meute, il y aurait bien moins de sang versé et de souffrance. Les adultes étaient vraiment stupides. Les alphas l'étaient encore plus. Par un complexe de supériorité, ils se donnaient le droit de gouverner les autres rien qu'avec pour seule excuse les liens du sang. C'est ce qu'on appel l'inégalité des chances. Mais, me demanderiez-vous, que faisais-je donc dans un clan ? C'est vrai, d'autant plus que j'étais de loin, le moins intégré. Il était clair que la vie en communauté était loin d'être faite pour moi. C'est idiot, hein, de rester dans un clan alors qu'on a tout les arguments pour trouver ces principes absurdes. Mais même moi, il m'arrivait de penser au coeur. Oui, au coeur, plus précisément, à ma mère. Elle avait toujours vécue dans le clan hivernale, et serait malheureuse si elle me voyait le quitter. C'est étrange, mais j'étais persuadé que lorsque je rejoindrais le pays des morts, je la retrouverais, et elle aurait suivi toute ma vie jusqu'à la fin. Je voulais qu'elle soit fière de moi. Même si pour le moment, il n'y avait vraiment pas de quoi être fière.

Je fuyais la plus pars du temps l'hiver pour vagabonder entre les territoires, ou alors les terres neutres, ou libre. Celles qui respirait la liberté, à la différence de n'importe quel clans. Personne ne passait régulièrement pour marquer son territoire et mettre son odeur de meute partout.

Un parfum me fis lever la tête et par la même occasion me permettais de marquer une pause à ma réflexion. Non, pas le territoire neutre. Le printemps ! J'étais en territoire printanier, et comme cette verdure ressemblait aux terres abondantes, je m'étais complètement gouré ! Il fallait que je parte le plus vite possible. D'après les adultes, le printemps était en guerre, et la plus pars des loups là bas, étaient de mauvaise humeur et à cause des événements, se montraient agressifs avec n'importe qui. Je ne perdis pas de temps et me retournais pour prendre vite mes pattes à mon cou.

Sauf que, trop tard. Une masse verdâtre qui était loin de ressembler à un simple papillon, qui, poser sur mon museau me donnerait l'impression d'une tache anormale sur le paysage, me fixait de ses petits yeux vicieux. Aie.

Rage était d'excellente humeur. Ouais, excellente. Encore que le mot était p'tête un peu faible, mais après tout il s'en foutait de mettre un mot sur son humeur, y s'contenterait d'la ressentir à fond, et d'en profiter. Bah ouais quoi, c'tait pas tous les quatre matins qu'on avait l'autorisation spéciale du grand chef d'aller mettre le barouf chez les autres ! Alors fallait bien s'réjouir d'la belle occasion...

C'est pour ça qu'le grand vert marchait d'un bon pas, guilleret, dans l'territoire du printemps. Dans un sens, il était pressé d's'y trouver et de commencer les festivités, mais dans un autre, il avait envie d'savourer, d'y aller lent'ment, de se sentir comme la fatalité qui tarderait pas à s'abattre sur les misérables terres de l'été... Hin hin ouais, préparez-vous mes agneaux, le grand méchant loup va v'nir vous secouer les puces.

Sauf qu'en passant dans la clairière d'azur, une odeur le stoppa net dans sa marche. Tiens ? Mais c'est qu'ça sentait l'hivernal par ici ! Pas très fort, mais quand même, y r'connaissait cette senteur fraîche et piquante. Ho ho ho, mais c'est qu'le hasard avait envie qu'il s'amuse aujourd'hui ! Aller, fallait qu'il aille voir quel taré d'l'hiver leur f'sait l'honneur de sa visite.

Il eut pas à marcher très loin, en fait l'intrus s'trouvait juste un peu plus loin, lui tournant d'abord le dos. T-t-t-t-t-t ! Depuis quand on s'montre impoli comme ça ? Il l'avait même pas remarqué alors qu'il était grand et lourd ? Bon, lui non plus l'avait pas capté, mais il était riquiqui en même temps. Et il avait la tête ailleurs.

L'hivernal finit par se retourner à toutes pompes, mais c'tait trop tard pour lui. Le soldat lui barrait déjà la route de toute sa hauteur, dardant sur lui ses prunelles acérées, un sourire malsain aux babines. Qu'est-ce que c'était que ce mioche ? Il avait une dégaine bizarre, en tout cas il avait plein d'objets sur lui ; mis à part Acédie, Rage avait jamais vu un loup avec autant d'breloques. Tsss, ces jeunes...

- R'gardez moi cet avorton, on dirait qu'y s'est perdu. Le printanier pencha légèrement la tête vers l'intrus, son sourire s'accentuant. Ben alors mon p'tit père, t'as paumé ton ch'min ?

Le v'là qui s'trouvait encore à faire la police à la place des sentinelles, n'importe quoi, c'territoire était une vraie passoire... Mais bon, au moins ça lui donnait l'occasion d's'amuser un peu avec le gosse perdu... P'tête même qu'y pourrait retourner en chouinant chez lui, racontant qu'un loup vert terrorisait les loups sous la bannière du printemps... Enfin, faudrait voir s'il lui laissait la chance de r'partir ou pas.

Le choc me fis reculer malgré moi, enfin malgré moi.... malgré le semblant de courage dont je faisais preuve chaque jours ! Hrum... bref, toujours est-il que j'étais loin de penser qu'une tel succession d’événement pouvait se passer dans la même seconde : Truc verdâtre qui sourit, truc verdâtre qui commence à causer. Voix tellement enrouée et pleine de je ne sais quoi qui me plaisait pas du tout me fis sursauté, reculé d'un bon, glissé sur un petit gravier, retrouvé le menton au sol, la queue et les postérieurs en l'air. Dans un grognement, je me remis sur mes pattes, relevais la tête et croisant le regarde du truc verdâtre,  et tentait de me remémorer les dernières paroles de ce dernier.

- R'gardez moi cet avorton, on dirait qu'y s'est perdu. Ben alors mon p'tit père, t'as paumé ton ch'min ?

Il avait une manière de parler si surprenante qu'elle m'avait fait sursauter... et me casser la figure par la même occasion, mais ça, c'était vraiment pas fûte fûte. Tout en croisant le regard d'un doré éclatant du truc verdatre, j'essayais d'élaborer une strategie pour récupérer de serait-ce un semblant de dignité. Je sais pas moi, balancer une phrase percutante !

- Je... ou-ouais je suis perdu.. lançais-je d'une voix hésitante.

Bha ça c'est sur, à fond dans l'honneur et la virilité... pff je crois bien que je suis foutu. Un vrai cas irrécupérable. Qu'est-ce que j’espérais franchement, là tout de suite ? Bhah... qu'il me prenne pour un loup courageux ? Je crois qu'on est tous d'accord pour dire qu'un loup qui sursaute pour une simple voix et qui se retrouve les fesses à l'air, il y a rien de plus courageux. Non je crois que ce dont je devrais m'inquiéter le plus actuellement c'est.... de rester en vie. Parce que ce truc verdâtre me regardait vraiment d'un oeil inquiétant, et de plus... c'était une vrai montagne de muscle ! Et ses griffes... brrr j'aimerais vraiment pas qu'il les utilise sur moi... Bon, peut-être qu'en essayant la fuite discrète...

- Bon, hum... je crois que je me suis gouré de chemin...hein... comme vous le dites. Alors, bha euuh... bha je vais prendre... tiens celui-ci ! je crois qu'il va en territoire neutre ! héhé... bon j'vais pas vous embêtez plus longtemps hein...je vais vous laissez. A plus tard  !

Et c'est ainsi que je tourne les talons vers l'autre chemin en essayant de me faire tout petit.

Eh ben, Rage pensait connaître son potentiel charismatique, mais là il avait atteint des sommets avec la réaction d'l'intrus. Il avait presque l'impression de revoir l'automnal du labyrinthe, sauf que là c'tait un hivernal qu'il avait sous les yeux. Et dans une position plutôt comique, fallait l'avouer, le popotin au garde-à-vous... Même si l'soldat avait du pain sur la planche en c'qui concernait les estivaux, il allait pas laisser filer son nouvel ami de sitôt. Après tout, venir fouiner, consciemment ou non, chez les printaniers en plein temps d'guerre... Y pouvait pas s'permettre de le laisser r'partir comme ça, y'avait une réputation à tenir.

- Je... ou-ouais je suis perdu..

Rage se retint d'éclater d'rire, affichant à la place un grand, grand sourire ravi. C'tait trop beau, il était vraiment tombé sur une perle c'coup-ci, encore mieux qu'l'automnal ! Décidément, c'tait une vraie belle journée qu'cette journée-ci... Dire qu'au début y s'ennuyait ! Pis il avait fait la rencontre honorable d'Oxymore, qui lui avait r'filé une mission sympa, et maint'nant il se dégotait un espèce de minable qui allait divertir un peu le reste de son après-midi... Que demander de plus ? Mais avec tout ça, il en oublierait presque sa victime, ce s'rait dommage qu'il file à l'anglaise quand même...

- Bon, hum... je crois que je me suis gouré de chemin...hein... comme vous le dites. Alors, bha euuh... bha je vais prendre... tiens celui-ci ! je crois qu'il va en territoire neutre ! héhé... bon j'vais pas vous embêtez plus longtemps hein...je vais vous laissez. A plus tard !

Toujours souriant, le soldat lui laissa quelques secondes pour croire qu'il allait s'en sortir, secouant la tête lentement. Aaaah ces pauvres petits esprits craintifs, ils croient vraiment pouvoir se faufiler discrétos comme ça... Que nenni mon p'tit, maintenant que Rage t'es tombé d'ssus, il va t'écraser jusqu'à c'que t'étouffes, pas avant.

Deux, trois, quatre, cinq mètres... Aller, c'est parti. En deux trois bonds de géant, étonnamment agiles pour la corpulence du grand vert - oui mais il était en pleine forme et d'bonne humeur - il fut de nouveau face à son nouvel ami du froid. Son sourire grimaçant s'accentua, dévoilant au passage quelques crocs, et il pencha la tête vers l'intrus trouillard.

- T-t-t-t-t. On fausse pas compagnie aux gens comme ça ! C'est plutôt malpoli, tu sais... Il fit un pas en direction de sa proie, s'avançant dangereusement au-dessus de lui. J'ai pas du tout l'intention de t'laisser filer mon pote, en fait.

Par quoi allait-il commencer ? Un peu d'torture psychologique tiens, son chef approuverait et apprécierait sûr'ment l'attention. Et fallait admettre que c'tait une idée sympa aussi, savoir qu'on pouvait manipuler et faire mal même avant d'avoir posé griffe ou croc sur l'autre... Une délicieuse sensation de puissance, en somme. Les yeux dorés vinrent se river au seul oeil visible du loup, l'autre étant caché par sa mèche, et Rage mit toute sa cruauté dans l'intensité d'ses prunelles.

- Tu sais c'qu'on fait aux hivernaux trop curieux qui laissent traîner leurs pattes là où y faut pas ? C'pas joli joli, mais c'est mérité, particulièrement en ces temps d'guerre...