Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

L'après-midi était belle, ensoleillée, comme ils n'en avaient pas eu depuis quelques jours. Daphné, assise, le museau tourné vers le ciel, laissa échapper un petit soupir. Elle était encore loin de l'heure de sa ronde, mais que faire jusque là ? Elle était seule, comme d'habitude, mais ce n'était pas le réel souci, elle pouvait très bien s'occuper seule ! Il fallait juste qu'elle trouve comment... Curieusement, Irina semblait ne pas vouloir donner son opinion là-dessus. En même temps, elles s'étaient tellement disputées sur le sujet, il valait mieux qu'elle se taise, une énième chamaille ne l'aiderait pas à trouver quoi faire... Après tout, puisque le temps s'y prêtait, elle n'avait qu'à aller faire une petite promenade, histoire de profiter des dernières couleurs de l'Automne et du soleil.

La jolie louve marchait donc dans la Forêt Orientale, un des lieux qu'elle aimait le plus, avec sa multitude de sentiers, ses arbres enchevêtrés, ses couleurs... Du moins pendant sa saison, à présent il n'y en avait plus beaucoup, vu que la plupart des feuilles se trouvaient sur le sol. Jetant un regard absent à ce qui l'entourait, Daphné continuait à marcher, s'aventurant au hasard entre les troncs. Ses pensées flottèrent jusqu'à l'idée de cette fameuse guerre qui se préparait, et qu'elle redoutait de voir arriver. Son travail recouvrait une toute nouvelle importance, et elle prenait bien garde à le faire de son mieux, parce qu'il fallait qu'aucun...

Eh, mais c'est une fleur !

- Quoi ??

Sous le coup de la surprise, elle avait parlé à voix haute, et jeta immédiatement un coup d'oeil scrutateur autour d'elle pour vérifier qu'il n'y avait personne. Ouf, aucun signe de vie... La sentinelle poussa un petit soupir soulagé, et regarda ce qui avait attiré l'attention d'Irina, et qu'elle avait seulement survolé.

Mais oui, une fleur... Et il y en a d'autres là-bas !
Des fleurs à cette époque de l'année, c'est impossible... Tu sais comme moi ce que ça veut dire.
Evidemment que je le sais ! Et je vais lui mettre la patte dessus en moins de deux...

Sourcils froncés, Daphné entreprit de suivre la piste des fleurs nouvellement poussées dans sa forêt. Irina avait raison, et elle savait très bien l'origine de ces plantes : elles avaient un visiteur indésirable tout droit venu du printemps. La sentinelle sentait la tension naître dans tous ses muscles, elle avait un membre du clan ennemi numéro un quelque part, et il fallait à tout prix qu'elle le retrouve et le fasse partir. Plus qu'à espérer qu'il ne soit pas nourri de mauvaises intentions et qu'elle puisse s'en débarrasser seule... En cas de danger, elle pouvait toujours se transformer, mais niveau offensif ça n'était pas très impressionnant... Bah, elle aviserait, c'est pas un pauvre crétin du printemps qui allait l'effrayer !

Il y a de plus en plus de fleurs on dirait...
Oui, je vois très bien, Irina !

Daphné s'arrêta, regardant autour d'elle. Leur créateur ne devait plus être très loin à présent... D'ailleurs, elle commençait à sentir les effluves d'odeur laissées à son passage. Quelle puanteur qui venait gâcher le beau paysage automnal ! Une moue irritée sur le visage, la jolie sentinelle reprit sa marche, s'attendant au pire en ce qui concernait son intrus.

Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle aperçut un jeune loup, un peu plus loin, doté d'une incroyable fourrure... Au moment où il se redressait et regarda autour de lui, elle s'aplatit vivement sur le sol, dissimulée derrière une grosse racine et des buissons. Il avait dû la sentir arriver... mais ne l'avait pas encore vue. Elle pouvait en profiter pour l'observer un peu ! Qu'est-ce que c'était que cette dégaine ?? Il avait la langue pendante et une feuille collée dessus... Était-il complètement idiot, ou n'était-ce qu'une façade ? Méfiance. L'apparence n'avait aucune valeur à ses yeux. L'intérieur ne l'intéressait pas forcément non plus d'ailleurs, mais qu'importe.

Tout doucement, elle se déplaça derrière les troncs, et vint se poster à la droite du printanier. Elle sentait la colère tambouriner en écho aux battements de son coeur. Elle détestait voir des intrus chez elle, ces malotrus qui se permettaient de venir squatter la mettaient hors d'elle ! Mais elle devait garder son sang-froid, rester zen, calculatrice. Elle émergea de derrière le tronc, en vue du printanier, et fit un pas dans sa direction, se trouvant donc à peine à deux mètres de lui, et d'un gracieux mouvement de tête, chassa sa mèche bleue hors de sa vue. Sa voix résonna claire et impérieuse lorsqu'elle s'adressa au loup touffu.

- Eh, toi là. Tu n'as rien à faire ici je te signale ! Qu'est-ce que tu...

C'est vraiment une feuille qu'il a collée à la langue ! Comment il a fait, tu crois qu'il mange les feuilles ?
Irina, c'est pas le moment !

Daphné ferma un instant les yeux pour calmer son agacement, puis les rouvrit, dardant leur prunelle jaune vif sur l'intrus. Elle craignait de commencer à perdre un peu patience...

- Je peux savoir ce que tu fabriques ??

L'interlocuteur de Daphné s'avisa de la feuille qu'il avait sur la langue et l'enleva, fixant par la suite la sentinelle. Celle-ci se sentait presque gênée de l'examen de ces yeux étranges sur elle, et fronça d'autant plus les sourcils. Quel malotru que cet intrus, de quel droit la dévisageait-il comme ça ?? Il était de toute évidence un de ces crétins de printaniers, mais s'il n'arborait pas de telles couleurs on aurait facilement pu le prendre pour un hivernal. Quel pelage touffu, il était encore plus impressionnant de près ! Du coup, l'Automnale ne savait plus trop quoi penser à propos de son âge...

-Je me suis perdu et j’avais soif, comme il n’y a pas d’eau dans le coin je n’ai eu d’autres choix que de boire sauf qui se trouve sur les feuilles.

Daphné arqua un sourcil, affichant un air à la fois perplexe et agacé. Il avait léché les feuilles pour boire ? Était-il un attardé mental ou juste complètement débile ? Qui avait déjà même pensé à lécher des feuilles pour boire ?? Pas elle en tout cas, et pour le coup Irina était bien d'accord. L'intrus malodorant fit une pause et en profita pour faire pousser une autre fleur, provoquant une grimace de la part de la sentinelle.

-Comme tu as pu le constater j’en ai profité pour faire pousser quelques fleurs, il en manque cruellement sur votre territoire, ça lui donne un côté plus triste et terne…dommage.

Mais qu'est-ce que c'est que cet énergumène !
Aucune idée, mais il commence à me courir sur le haricot...

-…je n’ai aucun ordre à recevoir de toi, si je veux rester ici, je resterai ! Ce n’est pas une futile automnale, bien qu’elle soit très belle, qui va me dire ce que je dois faire…une femelle en plus…

Cette fois, en plus d'une grimace énervée, ce fut un grognement qui échappa à Daphné. D'où sortait ce misérable plouc avec un pet au casque ?? Et pour qui se prenait-il ?? L'Automnale fit un pas dans sa direction, tête haute, et lui jeta un regard des plus méprisants. Il était peut-être plus imposant, mais elle allait lui montrer qu'elle n'était pas le moins du monde effrayée - pour le moment - et qu'elle ne le laisserait pas prendre ses aises chez elle !

- Oh non tu ne vas pas rester ici, l'Automne n'est pas une poubelle à printaniers cinglés qui se sniffent avec leurs fleurs !!

Ne t'énerve pas trop, visiblement il a l'air trop stupide pour y être sensible... Calme-toi et prends-le par la ruse !

Daphné ferma un instant les yeux et soupira. Elle sentait venir une discussion longue et acharnée avec cet idiot de loup avant qu'il ne décolle enfin du territoire automnal. Elle pouvait aussi faire appel à des confrères en poussant un cri d'alarme, mais préférait d'abord tâcher de s'en charger seule. Si la situation dérapait, elle ferait appel aux autres. Et non, ce n'était pas de la fierté.

La sentinelle rouvrit les yeux et posa son regard jaune sur son vis-à-vis. Du calme, de la concentration, du sang-froid. Visiblement ce loup s'imaginait être le roi du monde, et elle n'était à ses yeux qu'une... "futile femelle". Mais elle était belle, c'était déjà ça. Comment allait-elle bien pouvoir le mettre à la porte ? Jouer son jeu peut-être ? Quelle horreur, mais elle pouvait toujours tenter le coup...

- Je veux dire... ce n'est pas l'endroit idéal pour faire pousser des fleurs, elles ne vont pas vivre ici... C'est fort regrettable, je ne te le fais pas dire...

Si déjà il mordait à cet hameçon, elle pourrait essayait de s'en sortir en le promenant, avant de le conduire chez lui. Elle était épuisée d'avance à cette idée, mais prête à aller jusqu'au bout pour se débarrasser de ce parasite... Et puis après tout, tous les moyens étaient bons.

- Sinon, si tu as soif, ce n'est pas ici que tu trouveras de l'eau... Mais je connais une source pas très loin, si jamais tu veux plus te désaltérer... qu'avec des feuilles.

Elle avait encore du mal à réaliser qu'il avait léché des feuilles pour boire. La sentinelle se demandait comment ça devait fonctionner là-haut pour que naissent de telles idées... Mais bon, là n'était pas la question. Elle lui parlait d'une voix neutre, pas trop ferme, sans paraître trop mielleuse, et espérait qu'il ne se braque pas, sinon elle lui hurlerait dessus une bonne fois pour toutes. Et si ça ne fonctionnait toujours pas, et bien elle n'aurait qu'à reléguer ça aux soldats...

J'espère qu'il te trouve assez jolie pour te suivre !
J'espère aussi, sinon c'est qu'il a vraiment très mauvais goût, ce crétin de printanier.

- La licorne de tout à l’heure ne m’a jamais parlé d’une source dans les environ…

Est-ce que... Est-ce qu'il vient bien de parler d'une licorne..?
Hmm, je crois bien que oui, malheureusement.
Ce printanier est encore plus fou qu'il n'y paraît...

Daphné avait dû tendre l'oreille pour percevoir un peu du murmure de l'intrus, l'air de rien, et le peu qu'elle avait perçu - dont "licorne" - ne l'avait pas encouragée à en découvrir plus. Il se parlait à lui-même, les dieux seuls savaient quelle idée folklorique il avait pu encore sortir. Tant que ce n'était pas contre sa propre personne, il pouvait bien dire ce qu'il voulait après tout... En tout cas, elle devait prendre à garde à ne rien laisser transparaître de ses pensées assassines envers son vis-à-vis, parce que celui-ci avait son regard dardé sur elle... Puis, il eut un coup d'oeil pour les feuilles mortes, et la Sentinelle supposa que le débat devait faire rage dans sa petite cervelle de printanier : lui faire confiance ou pas ? La suivre ou pas ? Pourvu qu'il la croie, qu'elle l'emmène boire, et elle trouverait bien un moyen de se débarrasser de lui dans la foulée... Enfin, en théorie. Mais ce loup avait l'air tellement imprévisible qu'elle s'attendait au pire...

Daphné était tellement plongée dans ses spéculations qu'elle ne put retenir une expression de surprise lorsque le printanier se rapprocha d'elle, faisant un pas dans sa direction, sa grosse tête affleurant d'un peu trop près les environs de celle de la demoiselle à son goût. Elle eut un léger mouvement de recul, espérant qu'il passerait pour de la surprise plutôt que pour le dégoût réel qui l'avait provoqué... Mais c'était un peu tard pour s'interroger.

- Elle est où cette source ? Si tu me la montre je partirai peut-être de là.

Alléluia, enfin une parole sensée ! Ravie de la tournure de la discussion, la jolie Automnale eut moins de mal à simuler un charmant sourire en direction de son interlocuteur. Avec un peu de chance, ce serait plus facile que ce qu'elle pensait... Mais non, mieux valait garder les pattes sur terre. Quand on a un boulet en face de soi, il faut tout prévoir.

- N’essaye pas de me rouler dans la farine, futile automnale…. Je ne voudrai être dans l'obligation de te neutraliser.

D'autant plus que ce boulet là était encore méfiant - quoi que toujours aussi idiot - et pouvait peut-être même se révéler dangereux. Prudence, prudence, la « futile automnale » ne voulait pas d'embrouilles, surtout pas avec lui. Elle ne savait rien de son éventuel pouvoir, mais du point de vue carrure, elle ne faisait pas le poids. Son seul avantage face à lui pouvait être la ruse, et, éventuellement, sa qualité de jolie femelle. Mais ça, elle ne préférait pas trop y penser, ça lui fichait des frissons d'horreur.

Toujours aussi souriante, la Sentinelle cligna de ses beaux yeux, retrouvant une voix mielleuse et apparemment dénuée de mauvaises intentions. Une parfaite voix de cruche inoffensive, n'est-ce pas, monsieur le printanier ?

- Oh, loin de moi cette idée, je ne voudrais pas non plus m'attirer d'ennuis. Elle fit un pas en arrière, se détourna, et poursuivit un bout de chemin avant de se retourner vers lui. La source est par ici.

Allez, bouge tes grosses fesses espèce de crétin, j'ai pas envie d'y passer la journée.
Prends garde !
Il lit pas dans ma tête, aux dernières nouvelles ?!
Non, mais ça pourrait se refléter dans ton expression...

Daphné eut envie de rire, mais resta imperturbable. C'était peut-être une erreur de sous-estimer ce gros tas de poils, mais elle se refusait à croire qu'il puisse interpréter les petites lueurs de haine qui pourraient briller dans ses yeux. Bien sûr, Irina avait raison - c'était évident de toute façon - il valait mieux être prudente, mais ça elle le savait, et elle ne courrait pas de risques insensés. Bon, il était temps de se mettre en marche à présent...

Une fois certaine que le printanier lui emboîterait le pas, l'Automnale se mit en route, exagérant à peine sa démarche chaloupée. Autant jouer le jeu à fond, non ? Enfin, c'était peut-être jouer avec le feu, mais tant pis, c'était un risque à prendre s'il pouvait susciter la confiance de l'intrus. C'est qu'elle savait soigner les détails ! Et si elle en faisait trop, elle n'aurait qu'à continuer à jouer le jeu, mais sur un autre ton, rien de plus simple...

Tu vas te concentrer, un peu ?
Non, j'essaie justement de penser à autre chose.

Savoir que l'ennemi marchait là, derrière elle, qu'elle avait son dos à sa merci, la glaçait littéralement d'horreur. Chose qu'elle tâchait de dissimuler dans sa démarche, mais que trahissait de temps à autres une légère grimace à la commissure de ses babines. Quelle situation épouvantable, quelle honte même, jouer les guides pour un abruti de printanier... Du calme, du calme, bientôt elle en serait débarrassée. Si seulement le temps pouvait passer plus vite...

Après ce qui lui sembla une éternité de marche, la source fut en vue, à son grand soulagement. Voilà qui l'aiderait à remplir son rôle enjoué ! S'arrêtant, la jolie Sentinelle se tourna à demi vers le loup vert, souriant toujours, presque avec sérénité.

- Voilà, la source est là-bas.

En effet, plus loin, au creux d'un arbre, dans un petit renfoncement du sol, se trouvait une mare. Ce n'était pas grand-chose et l'eau n'était peut-être pas de la meilleure qualité, mais quand on avait très soif, c'était vachement pratique. Alors elle espérait que son visiteur en soit satisfait, sinon elle n'était pas au bout du rouleau...

" Oh, loin de moi cette idée, je ne voudrais pas non plus m'attirer d'ennuis. ...La source est par ici."

Ah elle avait comprit qui était le maître ici... Eh eh eh..
Le loup regarda la femelle s'éloigner de quelques pas et finis par la suivre surveillant ses moindres fais et gestes. Elle avait une étrange démarche. Devait-il la neutraliser maintenant à l'aide de sa nouvelle technique d'attaque japonaise ? Hum hum...
Il restait derrière la louve, restant tout de même sur ses gardes. Quelle drôle de scène, une automnale escortant un printanier jusqu'à un point d'eau, cela méritait une photo. Kaïne trainait légèrement des pattes et écrasait les feuilles mortes d'un pas lourd, moins discret que lui n'existait pas.
Après quelques minutes qui lui parurent assez courtes la louve s'arrêta, souriante.

"Voilà, la source est là-bas."

Le printanier regarda devant lui. Il plissa les yeux, au loin, près d'un arbre, se trouvait un sorte de grosse flaque d'eau un peu boueuse. Alors c'est ça que les automnaux réservaient à leurs invités ? De l'eau non potable susceptible de les empoisonner ? Hum..lécher des feuilles mortes couvertes de glace était certainement meilleur pour la santé.

-C'est pas bien propre ici.. Tu aurais pu trouver mieux !

Kaïne s'approcha lentement de 'l'eau', montrant un air dégouté et regarda son reflet, ou ce qu'il pouvait voir de son reflet. Il fit un grand sourire.

-Aaaah je suis beau.

Il s'admira quelques instant dans le liquide crasseux et finit par en boire quelques gorgées. Elle n'était pas trop dégueulasse même si elle avait un arrière goût de terre. Cela lui suffit tout de même pour se désaltérer. Il se retourna vers l'automnale et fit un sourire de mongol, sa langue pendant de nouveau sur le côté. Il étira longuement son échine.

-Je ferai bien une bonne sieste maintenant, ya pas des grottes où je pourrais être tranquille chez vous ?

Il fit quelques pas vers la louve et s'assit.
-Dis moi futile automnale, je ne connais toujours pas ton nom.

Du coin de l'oeil, Daphné observait le printanier. Celui-ci inspecta un petit instant la mare qu'elle lui présentait, et elle devina à son expression qu'il devait s'attendre à mieux. Et zut, il n'allait pas lui pomper l'azote pendant trois lunes, celui-là ! Il pourrait au contraire se montrer reconnaissant qu'elle daigne s'occuper de son cas et répondre à son besoin...

Il a l'air trop mégalomane pour réaliser tout ça.

Comme si elle n'avait pas remarqué...

- C'est pas bien propre ici.. Tu aurais pu trouver mieux !

Tandis qu'il s'approchait du point d'eau, elle ne put s'empêcher de faire une grimace impatiente dans son dos. Bon sang, qu'il boive et qu'elle en soit débarrassé, c'était tout ce qu'elle demandait, vraiment tout ! Alors si les dieux pouvaient lui donner un petit coup de pouce... Non, c'était idiot. Elle était parfaitement capable d'en venir à bout toute seule. Il lui faudrait seulement...

- Aaaah je suis beau.

... beaucoup, beaucoup de patience pour le supporter. Blasée, la sentinelle jeta un coup d'oeil à l'intrus qui se mirait dans l'eau, un grand sourire d'imbécile heureux aux babines. Il avait l'air malin, tiens... Une envie folle de le pousser dans la mare la prit, juste pour casser son délire, mais c'était vain et futile. Et qui sait, elle pourrait s'attirer d'autres ennuis. Le voilà qui buvait, puis se redressait, se tournant de nouveau vers elle. Vite, reprendre un sourire niais et accommodant !

Bizarre, je le sens mal, je suis sûre qu'il va squatter plus longtemps...
Ne nous porte pas malheur, Irina !
Regarde ce sourire de crétin, c'est obligé !

Effectivement, plus que jamais, le printanier avait un air d'abruti fini. Son sourire béat avec la langue pendouillant ne lui inspirait guère confiance, comme si il avait encore une idée saugrenue derrière son crâne de piaf. D'ailleurs, son étirement n'indiquait rien de bon lui non plus, à moins qu'il ne se prépare à lever le camp..?

- Je ferai bien une bonne sieste maintenant, y'a pas des grottes où je pourrais être tranquille chez vous ?

Eh merde, il n'en avait pas du tout l'intention, ce fichu printanier. Non seulement il venait se perdre ici du haut de toute son inutilité doublée d'idiotie, mais voilà qu'il voulait à présent piquer un petit roupillon ! En Automne, chez elle ! Quel mufle, si ça continuait, elle allait franchement perdre patience, quelles qu'en soient les conséquences.

- Une grotte, pour faire une sieste...

Le ton était plus froid que ce qu'elle espérait, et malgré son sourire qui persistait, c'est d'un oeil plutôt mauvais qu'elle regarda le loup vert s'approcher puis s'asseoir à côté d'elle.

- Dis moi futile automnale, je ne connais toujours pas ton nom.

Qu'allait-elle faire de ce boulet... Daphné poussa un long soupir exaspéré, fermant un instant les yeux. Lorsqu'elle les rouvrit, elle n'affichait plus du tout de sourire, seulement un air courroucé. Ses prunelles jaunes dardées sur le printanier, elle tâchait de trouver un autre moyen de le faire partir, puisque visiblement, la méthode douce ne fonctionnait pas.

- Tu n'as pas à connaître mon nom, stupide printanier. Tu peux même continuer à m'appeler 'futile automnale', si ça te chante, je m'en moque. La belle fit un pas en direction de l'intrus, malgré son dégoût de sa personne. Il n'y a pas d'endroits en Automne pour les siestes des printaniers... Maintenant que tu as bu, tu n'as qu'une chose à faire : partir d'ici.

Fièrement dressée, tête haute, Daphné gardait ses yeux rivés dans ceux du loup vert-brun. Hors de question qu'elle se laisse impressionner, et qu'elle permette que ce gros déchet du printemps reste ici. Elle ferait tout pour qu'il parte, même si elle devait livrer un combat contre lui, ou pire, même si elle devait faire appel aux autres veilleurs.

- T'as compris, le gros ? Bouge tes fesses et va-t'en.

Tu vas trop loin, il va s'énerver, je te rappelle qu'on ne connaît pas son pouvoir, et si... !
Du calme, je gère.

Il y avait une part de vrai dans ce que disait Irina, et la louve aux cheveux bleus en était consciente, mais elle préférait l'ignorer. Tant pis si elle s'en mordait les pattes plus tard. Tout ce qu'elle voulait c'est qu'il réagisse, qu'il perde ce sourire crétin qui la mettait hors d'elle. Après, évidemment, le mieux serait qu'il s'en aille sans discuter, mais elle avait comme un doute à ce sujet...

L'arrière train sur le sol tapis de feuille morte, la face à l'air cinglé et débile, Kaïne lâcha un long bâillement dévoilant ses crocs blancs. Il dormirait bien deux ou trois heures avant de repartir chez lui, cela ne lui ferait pas de mal. Il avait besoin de se reposer après avoir marché "longtemps" pour de l'eau boueuse. Hum.. un bon lit fait d'herbe toute douce parsemé de fleurs multicolores. La voix de l'automnale le sortit de ses pensée, le faisant presque sursauter.

"Tu n'as pas à connaître mon nom, stupide printanier. Tu peux même continuer à m'appeler 'futile automnale', si ça te chante, je m'en moque. Il n'y a pas d'endroits en Automne pour les siestes des printaniers... Maintenant que tu as bu, tu n'as qu'une chose à faire : partir d'ici."

Ouuuh, la femelle faisait peur quand elle s'énervait. Dressée devant le mâle printanier, elle le transperçait du regard. Mon dieu qu'elle avait de beaux yeux, bien sûr ça ne valait pas les siens mais il fallait avouer qu'elle avait la classe.

" T'as compris, le gros ? Bouge tes fesses et va-t'en."

"Le gros" ? Ressemblait-il a un hippopotame pour être traité de gros ?  Il observa ses pattes ainsi que son poitrail pendant quelques instants.. Hum... il était toujours aussi beau gosse. La louve devait avoir des problèmes de vue, elle devait se faire vacciner contre la myopie !
Kaïne se redressa et se leva. Il regarda la femelle droit dans les yeux et fit quelques pas vers elle pour la renifler.

-Oooh tu sens le caramel ! Comme c'est drôle. Ma licorne sent presque pareil que toi, je te la présenterai un jour si tu veux ! Ses crins sont tout roses. Tu dois attirer les abeilles avec un tel parfum, dit-il d'un ton sérieux.

Il regarda les alentours et reprit :
-Je ne sais même pas où se trouve le chemin pour rentrer chez moi ah ah ! Je préfèrerai quand même dormir un peu avant de partir, j'ai besoin de digérer l'eau correctement avant de me mettre en route, tu comprends ? Après ça provoque des ballonnements.

Il fit quelques pas en arrière et regarda le sol. Plusieurs fleurs apparurent sur le sol. Il tourna en rond tel un chien prêt à se coucher, et s'allongea de ton son long, lâchant de nouveau un bâillement.

-Ce lieu fera l'affaire, réveilles moi dans deux heures, ça devrait suffire. Monte la garde à coté de moi on sait jamais, et puis si tu pouvais me faire un peut d'air de temps en temps histoire de m'enlever l'odeur des feuilles mortes que j'ai dans la truffe ça serait cool. Merci !

Il posa sa tête sur le sol et ferma les yeux ....

Furieuse, Daphné attendait que le printanier réagisse ; elle s'attendait à tout, à ce qu'il s'énerve, à ce qu'il râle, à ce qu'il rigole même... Mais pour l'instant, il se contentait de la regarder de ses yeux vairons, puis jeta un coup d'oeil sur ses pattes et son poitrail. A quoi jouait-il donc ?? Est-ce qu'il comprenait seulement ce qu'elle avait dit ?! Elle commençait à avoir un doute, et gardait ses yeux jaunes dardés sur lui, l'inondant de tout le mépris qu'elle ressentait à son égard. Finalement, il se redressa ; une multitude de plans, d'hypothèses et de stratégies sur ce qui pouvait venir par la suite s'échafauda dans la tête de la Sentinelle, mais le gros se contenta de s'approcher et de...

... Il nous renifle, là ?!

- Oooh tu sens le caramel ! Comme c'est drôle. Ma licorne sent presque pareil que toi, je te la présenterai un jour si tu veux ! Ses crins sont tout roses. Tu dois attirer les abeilles avec un tel parfum.

Daphné resta interdite, incapable d'exprimer encore sa colère. Elle était juste scotchée par les paroles du printanier ; effectivement, il était soit complètement débile, soit sérieusement atteint. Ou peut-être les deux, mais quoi qu'il en soit, c'était grave. Trèèès grave.

- Oui, il nous renifle...

Encore hébétée des idioties proférées par son vis-à-vis, c'est à peine si la jolie Automnale réalisa qu'elle avait parlé à voix haute. Enfin, elle avait prononcé ces mots sur un ton plutôt bas, donc peut-être n'avait-il pas entendu... Et puis de toute façon, par rapport au gros, on pouvait difficilement la traiter de folle, il remportait haut la patte la palme d'or ! Daphné se remettait à peine de la licorne aux crins roses que l'autre poursuivait sur sa lancée, regardant autour d'eux.

- Je ne sais même pas où se trouve le chemin pour rentrer chez moi ah ah ! Je préfèrerai quand même dormir un peu avant de partir, j'ai besoin de digérer l'eau correctement avant de me mettre en route, tu comprends ? Après ça provoque des ballonnements.

Ah d'accord, donc maintenant il nous fait la conversation.
Tu crois qu'il a une voix pénible qui lui parle dans la tête, lui aussi ?
Haha, très drôle...

Bon, c'est vrai, cette situation était surréaliste. Voilà que le gros parlait de ballonnements, Daphné sentait qu'elle avait touché le fond. Elle ne se sentait même plus assez en colère pour lui lancer une remarque acerbe, à quoi bon s'énerver de toute façon, ça lui passait au-dessus de la tête ! Et puis elle n'avait plus de quoi l'impressionner, son pouvoir n'était pas vraiment efficace de ce côté-là.

Alors quoi, on va le laisser gentiment ici ?
Eh bien...

- Ce lieu fera l'affaire, réveilles moi dans deux heures, ça devrait suffire. Monte la garde à coté de moi on sait jamais, et puis si tu pouvais me faire un peut d'air de temps en temps histoire de m'enlever l'odeur des feuilles mortes que j'ai dans la truffe ça serait cool. Merci !

Cette fois-ci, la Sentinelle ouvrit de grands yeux effarés. Mais c'est que... C'est qu'il était sérieux en plus ! Il s'était couché sur un espèce de tapis de fleurs fraîchement écloses, et voilà qu'il avait réellement l'intention de piquer un somme !! Les yeux fermés, prêt à faire un bon gros dodo avec son amie la licorne, pour éviter d'être ballonné...

- Non mais ça va, oui ?!

La Sentinelle avait crié, sa voix se muant en un éclat strident ; il se croyait où cet abruti de printanier ?! Hors d'elle, la louve aux cheveux bleus s'approcha vivement du gros vert, et lui donna un coup de patte sur la tête. Cette fois, elle se moquait vraiment de le mettre en colère ou pas, il avait dépassé les bornes !

Heu, tu es sûre quand même..?
De toute façon, c'est fait !

Debout à côté de lui, elle se pencha pour pouvoir lui hurler dans les oreilles. Cet idiot ne savait pas à qui il avait affaire, maintenant il allait se grouiller de se casser, avec ses visions de licornes et ses stupides fleurs !

- Je t'ai dit de bouger tes fesses, gros lard ! Alors tu bouges, pigé ?! Sinon je décapite ta stupide licorne et je te crève les yeux avec !!

La belle vociférait, proférant ses menaces tout en continuant de crier. Non mais ce printanier allait partir d'ici, promis ! Peut-être devrait-elle lui mordre l'arrière-train pour le faire avancer jusqu'à la frontière, mais il allait disparaître des terres Automnales, elle y mettrait un point d'honneur ! Quitte à y perdre des plumes au passage...

HRP :