Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Le volcan de Nestariel... Un endroit tellement symbolique et douloureux pour l'Alpha estivale, qui pourtant avait trouvé la force de grimper son flanc. Elle ne savait pas où elle puisait ce soudain courage, ni d'où lui était venue l'envie de revenir par ici, mais le fait était qu'à présent elle montait, montait jusqu'au cratère. Elle n'avait même pas de but, si ce n'est errer en essayant de s'accrocher aux derniers lambeaux du passé, aux derniers souvenirs...

C'est à cet endroit que sa mère lui avait enseigné l'art de diriger un clan, d'y rester fidèle et juste, de devenir une bonne chef, sans avoir peur de l'avenir. Elle se revoyait encore courir vers Bebop, heureuse de la croiser, de la retrouver... Un pincement au coeur d'Akisa lui arracha un soupir. Pourquoi s'imposait-elle un souvenir aussi douloureux ? Peut-être croyait-elle qu'il lui fallait passer par-là, subir cette épreuve pour accomplir son deuil, pour en finir une bonne fois pour toutes avec les larmes et la peine.

Non loin d'ici, son père avait trouvé la mort. La fin d'un monde qui s'était écroulé, sur les ruines duquel il avait fallu tenter de se reconstruire. La jolie estivale espérait que ses premiers pas en tant qu'Alpha, et tout le chemin accompli jusqu'ici allaient toujours dans la bonne direction. Devait-elle s'écarter de la voie parentale, tenter de se faire sa propre vision du règne, ou suivre obstinément celle laissée par les pattes paternelles et maternelles ? Elle ne savait pas. Elle regrettait la perte de son père, elle aurait voulu pouvoir rester avec lui un peu plus, qu'il la voie s'élever, devenir Alpha à sa suite. A présent elle devait tracer son chemin, et se sentait réellement seule...

C'était d'ailleurs à cette place qu'elle avait fait ses preuves en tant que jeune Alpha. Pour cette guerre, cette maudite guerre qui empoisonnait son coeur et ses pensées... Toute tremblante, elle s'était dressée face à son peuple, avait pris les commandes et les décisions, pour le mieux elle osait croire. En tout cas, pour le moment, elle espérait n'avoir commis aucun faux pas. Et il fallait quand même admettre qu'elle se sentait mieux maintenant qu'elle occupait son poste depuis un petit bout de temps ; elle commençait à mieux gérer ses angoisses, et s'était même remplumée. Se rendre compte comme son entourage était rassuré en la voyant aller mieux l'avait quand même fait se demander jusqu'où elle était tombée dans sa petite... dépression.

Le cratère. Akisa s'assit sur le sol gris et caillouteux, et poussa un long soupir. Elle réalisa qu'elle tremblait, que ses joues étaient humides et ses yeux verts noyés de larmes. Quelle idée de venir ici, quelle idée de ressasser tout ça, de remuer encore le couteau dans la plaie, plus profondément... Se sentait-elle vraiment mieux à présent ?? Non, pas vraiment. Elle souffrait juste, encore et encore. Et cette douleur l'énervait, cette faiblesse la mettait hors d'elle-même ; comment pouvait-elle venir perdre son temps à pleurer le passé alors qu'elle avait un avenir à ériger ? Quelle égoïste de répandre ses larmes dans son coin, sur son propre malheur !

L'estivale laissa éclater un sanglot, puis se mordit la lèvre. Que devait-elle faire ? Se reprendre en main tout de suite, ou bien laisser s'écouler le trop plein de peine qu'elle avait renvoyé à la surface ? Elle avait envie de se plaindre, de gémir, de se blottir contre quelqu'un pour se laisser aller aux pleurs et à la souffrance, mais elle ne pouvait pas, elle était seule, elle n'avait personne. Pourtant, son entourage devait bien être quelque part, mais il ne lui suffisait pas, il ne lui suffisait plus. Il lui fallait plus que les chansons de Shine, plus que les grandes ailes d'Eonora, plus que les doux yeux d'Hana et les attentions de Tharro. Elle voulait ses parents, elle voulait les retrouver. Mourir ? Le vide ?

Non. Non elle ne pouvait pas. Son courage se réveillait et se révoltait même contre cette faiblesse, cette facilité... Elle était Alpha, elle avait des responsabilités à assumer, et il était hors de question qu'elle refile lâchement la tâche à quelqu'un d'autre ! C'était son fardeau, elle le porterait jusqu'au bout ! Facile à dire, à penser, mais à appliquer... La louve couleur de sable était toujours recroquevillée sur elle-même, tremblotante, pleurant à côté du gouffre. Elle se faisait pitié, elle se voyait en horreur, elle aurait eu envie de se frapper. Mais ça ne rimait à rien, il fallait juste qu'elle se calme, et que personne... ne la voit dans cet état là.

Toboe avançait. Il ne savait pas où il allait ni pourquoi. Il avançait, tout simplement. Vaille que vaille et coûte que coûte. Il ne pouvait pas se permettre de baisser les pattes. Il le devait à Haru. Haru qu'il avait si lâchement abandonné alors que ce monstre d'Oxymore fondait sur lui. Une larme perla. Elle était à la fois l'expression de sa tristesse mais surtout l'expression de sa haine. De celle qu'il ressentait envers lui même, de celle qu'il ressentait pour l'assassin de son amour, de celle qu'il vouait maintenant au monde. Il était devenu plus ou moins acariâtre, inaccessible pour beaucoup. Seule Sheen et ses parents comptaient encore à ses yeux. Les autres n'étaient plus rien. Rien d'autres que des loups qui ne pouvaient appréhender toute l'étendue de sa douleur. Une petite voix lui soufflait bien que tout cela n'était pas vrai. Qu'il ne pouvait en vouloir ainsi au monde entier pour sa propre bêtise. Mais sans cela il n'était pas certain de pouvoir affronter seul sa propre horreur. Rendre les autres responsables de son malheur était tellement plus simple.

Il continuait son chemin, se laissant guider par ses pas vers un endroit quelconque du territoire. Il n'était pas de service ce matin là et n'avait rien à faire. Il ne surveillait pas les frontières mais n'avait pas non plus envie de voir du monde. Alors il s'éloignait des endroits les plus souvent visités par les siens. Il préférait prendre de la distance pour ne pas s'en prendre injustement à qui que ce soit. C'était que ça lui arrivait assez régulièrement ces derniers temps. Il contrôlait mal ses paroles mais, et cela lui semblait encore pire, aussi ses gestes. Il ne parvenait plus à sourire que trop rarement. Il se souvenait encore de cette belle insouciance qui était la sienne avant tous ces évènements. Jamais il ne pourrait oublier qu'un printanier avait rendu sa vie plus belle. Leur relation avait été tout ce qu'il y avait de platonique mais peu importaient ce genre de détails. Ils s'aimaient et c'était tout ce qui comptait. Mais on le lui avait volé. On lui avait volé son amour, son oxygène, son bonheur et son futur. Il ne lui restait plus que les souvenirs et sa rage. Les larmes ne coulaient même plus. Ses yeux restaient terriblement secs alors que de son cœur brisé gouttait inlassablement des gouttes carmin. C'était du moins l'impression qu'il en avait.

Le loup écarlate finit par parvenir sur les pentes du volcan de Nestariel. Ses pensées tournaient en rond. Il aurait voulu les faire taire. Ne plus entendre encore et encore les dernières paroles de Haru. Ne plus se voir fuir le combat à toute allure. Il ferma un instant les paupières, luttant contre la nausée qu'il sentait monter en lui. Il se dégoûtait. Depuis ce jour fatidique il ne parvenait plus à regarder le reflet que l'eau pouvait lui renvoyer. Il ne voyait plus rien que vaille la peine. Il ne voyait que les prunelles sanguines d'un couard et les spirales noires d'un faux ami. Le Veilleur souffla doucement, tentant de se calmer. L'ascension n'était pas si compliquée mais ses émotions étaient plutôt compliquées à gérer. Alors qu'il arrivait au sommet, il perçut des bruit ainsi qu'une odeur. Une odeur qu'il ne connaissait que trop bien. Celle de son Alpha. Chassant momentanément ses noires pensées Toboe fronça les sourcils. Qu'est-ce qu'Akisa pouvait-elle bien faire ici ? Et, surtout, pourquoi semblait-elle si triste ? Parce que, s'il ne rêvait pas, c'était bel et bien des sanglots qu'il entendait. Dans son esprit la mort de Mesphisto et le départ de Bebop revinrent. Ah oui, ça en faisait des raisons de pleurer ... Il ne savait pas trop comment il devait se comporter aussi suivit-il un ancien instinct qui soufflait faiblement dans son esprit, juste assez fort pour qu'il le perçoive encore. Il avait toujours su prendre soin des autres. Il s'avança doucement, tentant de ne pas faire trop de bruit sans toutefois dissimuler totalement sa présence.

Toboe parvint enfin à proximité du vide, tout à côté de sa Chef. Le Veilleur adorait son Alpha. Il la respectait profondément et se plierait volontiers à ses ordres. Il tenait cependant à sa vengeance et il le lui avait dit lors de la réunion. Il effaça ces pensées. Il n'était plus temps de penser à soit. Elle avait besoin du soutient des siens. Il s'approcha encore et murmura doucement son nom. Il aurait voulu croiser les prunelles vertes sans que la moindre lueur de haine ne soit présente dans ses pupilles couleur sang. Il n'était pas certain qu'il y parviendrait. Mais il ferait de son mieux. Pour elle.

- Est-ce que je peux faire quoi que ce soit pour toi ? Ou peut-être préfères-tu que je parte mais, tu sais, il ne fait pas bon rester seul quand on est triste. Il vaut mieux se trouver une oreille attentive.

Un léger sourire plana sur ses babines. Il était un peu incertain, il ne savait pas s'il agissait comme il le fallait ni comment Akisa allait interpréter ses gestes et paroles. Il aurait voulu se serrer contre elle, lui démontrer à quel point leur réalité était palpable. Il ne fallait pas qu'elle se laisse envahir par la tristesse. Lui même se laissait dévorer tout cru par ses démons et on ne pouvait pas franchement dire que le résultats soit des plus glorieux. Désireux de la faire sourire le Veilleur fit soudainement appel à son don. Elle ne percevrait peut-être pas les changements sur son pelage et après tout, il s'en fichait pas mal. Il prit soin de ne pas laisser ses filins de pouvoir toucher l'aura de son Alpha. Il était hors de question qu'il lui fasse le moindre mal. Il créa une fleur volumineuse d'un vert brillant. Cela lui avait pris quinze bonnes secondes. Il reprit calmement la parole, comme s'il savait ce qu'il faisait.

- On peut toujours trouver des raisons de s'émerveiller. Regarde.

D'un petit coup de museau il heurta la fleur qu'il venait tout juste de sortir de son imagination que certains jugeaient trop fertile. Des papillons. Des papillons multicolores s'échappèrent de la corolle maintenant ouverte. Verte, rouge et bleus. Certains étaient même violet, mélange d'énergie marine et d'animaux terrestres. Il voulait faire sourire son Alpha. Les larmes lui allaient bien mal et puis, pour lui, il était peut-être temps de cesser de se soucier seulement de sa petite personne. Ses propres ennuis étaient au vestiaire maintenant qu'il était entièrement tourné vers la louve. Le sourire qu'il lui adressait était simple, tendre et avait presque retrouvé un reflet de son ancienne innocence.

Akisa se sentait humiliée. Elle avait honte de sa faiblesse, mais ne pouvait retenir ses larmes et ses sanglots. Elle avait vraiment une allure pitoyable, mais rien de ce qu'elle essayait de tenter pour se ressaisir n'aboutissait ; c'était comme si son cerveau assistait, impuissant, à toute la détresse à laquelle pouvait se livrer son corps. Les pensées positives qui venaient d'effleurer sa conscience n'avaient plus d'effets, elle ne voyait même plus de sens aux mots. Commençait-elle une dépression ? Serait-elle capable de se sortir de cette peine un jour ? Enfin quoi, d'autres étaient bien plus malheureux qu'elle, et c'était son devoir de leur montrer que si elle pouvait vaincre la douleur, ils le pouvaient aussi ! Le petit discours se formait dans sa tête, mais ses pleurs faisaient la sourde oreille. Elle ne parvenait pas à se raccrocher à son courage... Elle n'y arriverait jamais seule...

Seule ? Était-elle réellement seule ? Son ouïe était restée relativement attentive, et des pas se firent entendre. Ce n'était plus la peine d'essayer de faire bonne mine, il était trop tard. Tout ce que la jeune Alpha était capable de faire à présent, c'était de rester figée, misérable gargouille perchée au bord du volcan. Elle ne cherchait même pas à voir qui arrivait, déjà presque mortifiée de honte et de colère envers sa faiblesse. Et soudain, elle entendit son nom, prononcé tout doucement, et un peu de chaleur vint picoter son coeur endolori. Elle connaissait cette voix. Elle se souvenait de cette odeur. C'était Toboe... Finalement, ç'aurait pu être bien pire. Lentement, les yeux verts, attirés par la douceur de la voix du Veilleur, se relevèrent, et croisèrent les prunelles carmin. Sur le coup, Akisa fut quelque peu déstabilisée par la colère qui se noyait encore dans le regard du loup rouge, mais elle y décela bien vite autre chose, quelque chose de plus tendre, plus réconfortant...

- Est-ce que je peux faire quoi que ce soit pour toi ? Ou peut-être préfères-tu que je parte mais, tu sais, il ne fait pas bon rester seul quand on est triste. Il vaut mieux se trouver une oreille attentive.

Il avait tellement raison. Si la jolie estivale avait complètement perdu la sienne, elle se serait certainement jetée dans ses pattes. Mais il y avait quand même des limites à ne pas dépasser. Savoir que déjà, quelqu'un était à côté d'elle et pouvait comprendre sa peine, c'était ne plus être seule. C'était retrouver un peu de lumière. A replonger dans les vieux souvenirs douloureux, elle avait sombré dans les ténèbres, et se trouvait effrayée de ne plus pouvoir en sortir, immobile de chagrin. Elle avait même peur de retourner dans la lumière, et si c'était encore plus douloureux ? Quoi qu'il en soit, elle avait du mal à desserrer les mâchoires, et se sentait à vrai dire à peine prête pour parler. Elle sentait les sanglots au fond de sa gorge prêts à s'évader, relancer ses pleurs... Mais il fallait qu'elle parle, qu'elle réponde à Toboe, qu'il ne parte surtout pas...

- Je... je p-préfèrerais que tu restes.

Akisa se sentit encore plus honteuse, à peine quelques mots qu'elle ne parvenait même pas à bredouiller correctement, elle avait l'air d'une loupiote terrorisée par un affreux cauchemar... La jeune Alpha baissa la tête un instant, laissant échapper un long soupir tremblotant, les yeux fermés. Deux larmes s'échappèrent et vinrent rouler sur ses joues, le long de son museau, avant de tomber à ses pieds. Elle avait envie de rester comme ça. De faire l'aveugle, de rester tranquille, et qu'on ne vienne plus la voir pour des problèmes à gérer.

- On peut toujours trouver des raisons de s'émerveiller. Regarde.

L'estivale ouvrit un oeil, et l'autre suivit rapidement la manoeuvre lorsque son regard tomba sur une fleur merveilleuse, apparue comme par magie. Une fois de plus, tout comme un louveteau, elle ne put cacher sa surprise et fixa l'apparition avec de grands yeux brillants. Toboe donna un léger coup de museau dessus, et en sortirent alors une multitude de papillons colorés ! Le rendu était magnifique, et en les suivant des yeux, Akisa sentit ses soucis s'envoler uns à uns. Le loup rouge avait raison... Elle ne devait plus se lamenter et se haïr pour sa faiblesse, mais passer à autre chose, concrètement ! Alors que son regard se reposait sur le Veilleur, elle vit son sourire, le sourire qui autrefois le qualifiait, et esquissa elle-même une mine un peu plus joyeuse.

- Tu as bien raison... Comme on peut être aveugle quand on est triste... Alors qu'en y regardant mieux, on peut trouver des raisons de-de sécher ses larmes.

En parlant de larmes, voilà encore un sanglot tardif qui venait gâcher son élocution... Mais tant pis, après tout elle avait quand même pleuré un moment, il fallait bien un temps pour se ressaisir pleinement. Levant les yeux au ciel pour apercevoir les derniers papillons, l'Alpha réfléchissait à la situation. Elle admirait Toboe, qui avait connu une peine aussi déchirante que la sienne, voir peut-être plus, mais qui parvenait à surmonter son chagrin pour l'aider à se redresser. Elle se sentait tellement reconnaissante envers lui ! Elle se doutait que quitter le monde des souvenirs ne serait pas aussi simple, mais elle ferait de son mieux pour ne pas refaire une crise aussi intense que celle-ci... Après un léger soupir, la jeune louve couleur de sable plongea à nouveau ses prunelles vertes dans celles du Veilleur.

- Je te dois beaucoup, Toboe. Merci de m'avoir, en quelque sorte, rem-mise sur les rails. Saleté de sanglot, dépêche-toi de disparaître du fond de ma gorge... J'ai bien cru que je ne pourrais jamais me remettre de ce... cette... douleur.

Son regard dévia lentement vers le cratère, et se fit plus vague, tandis que son sourire perdait de son éclat. Cette douleur... Elle la sentait encore si présente, bien que son coeur se soit ressaisi... En même temps, c'était comme une partie d'elle-même, elle ne pouvait l'amputer aussi facilement. Si elle ne faisait pas attention, la moindre chose, le moindre détail pourrait l'y ramener... C'était quand même dur de devoir se battre continuellement pour résister, rester heureuse. Y avait-il un moment où la lutte cessait ?

Spoiler:

Toboe se laissait aller à sourire comme il le faisait auparavant, avant la mort de Haru. Cette pensée ne le quittait jamais totalement même si, pour l'instant, seule Akisa comptait réellement. Il était heureux d'avoir pu lui montrer que tout n'était pas si noir. D'ailleurs il ferait bien d'en prendre un peu de la graine. Il n'était pas vraiment un modèle à suivre en matière de deuil. Dans un sens il ne se sentait pas vraiment le droit de donner des conseils qu'il n'était même pas capable de suivre mais son Alpha avait l'air si désemparée ... Il n'avait pas pu la laisser seule dans cet état. Personne ne méritait de rester seul lorsqu'il venait de vivre des choses aussi terribles que la louve couleur sable. Il surprit même cette dernière à sourire, lui réchauffant le cœur.

- Tu as bien raison... Comme on peut être aveugle quand on est triste... Alors qu'en y regardant mieux, on peut trouver des raisons de-de sécher ses larmes.

Oh, encore quelques sanglots se cachaient par là. Toboe fit comme s'il n'avait rien entendu, respectant trop sa supérieure pour faire une quelconque remarque. Le sourire du Veilleur était moins large mais toujours présent malgré tout tandis que les prunelles vertes se détournaient pour suivre ses papillons. Il avait eu là une bonne idée. Il avait souhaité la distraire de ses pleurs et de ses peines et il fallait croire qu'il y était parvenu. C'était la plus belle des récompenses. Faire plaisir à ceux qu'il aimait grâce à son don lui avait toujours plu. A un moment donné s'était même son but principal, il ne vivait que pour les autres. L'apparition de Haru dans sa vie l'avait aidé à prendre conscience de lui même, qu'il avait le droit de s'occuper de lui de temps à autre. Sa perte était une terrible et inacceptable injustice mais le loup écarlate préférait se concentrer sur les bons moments qu'ils avaient vécu. C'était le plus important n'est-ce pas ? Il chassa ces pensées avant de se mettre à pleurer lui même. La voix d'Akisa le sortit de sa presque torpeur.

- Je te dois beaucoup, Toboe. Merci de m'avoir, en quelque sorte, rem-mise sur les rails. J'ai bien cru que je ne pourrais jamais me remettre de ce... cette... douleur.

Si son poil n'avait pas déjà été écarlate on aurait pu voir une rougeur lui monter aux joues. Il était heureux de pouvoir lui rendre service. Il l'aimait à sa façon. Ce ne serait jamais de l'amour au sens le plus propre du terme mais c'était tout de même quelque chose d'approchant, le tout se teintant d'un profond respect. Parce que c'était encore ce sentiment qui prédominait. Elle avait su mettre des mots justes sur son envie d'aller au devant du danger lors de la dernière Assemblée du Clan. Elle avait compris sa haine et n'avait pas cherché à le retenir. Pour cela elle la remerciait du plus profond de son cœur.

- Tu ne me dois absolument rien. Je suis là pour toi, comme tout loup proche de toi doit l'être. Il ne faut jamais se croire si seul que plus rien ne compte. Il y a toujours des loups pour croire en nous, pour espérer qu'on se remette rapidement, pour se battre à nos côté. Tu n'es pas seule Akisa, tu as tout un Clan derrière toi. Il laissa passer un léger silence, le temps de rassembler ses mots pour que tout sorte exactement comme il le voulait. Parfois il parlait trop vite en s'emmêlait les pinceaux. Tu ne peux pas être très proche de chacun d'eux mais, même s'ils ne sont pas tous tes meilleurs amis, ils sont prêts à beaucoup pour que tu retrouves le sourire.

Il espérait qu'Akisa pensait du bien de lui et ne se méprendrait pas sur ses paroles. Il comprenait sa douleur et, même s'il n'abordait pas directement le sujet, il espérait parvenir à lui redonner espoir et courage. Ces deux variantes l'avaient toujours caractérisée et il n'imaginait pas qu'elle ne retrouve pas son énergie et l'engagement qu'elle avait envers les siens. Les estivaux avaient de la chance d'avoir à leur tête une telle monarque. Jugeant les autres avec respect l'injustice n'était nullement présentes sous le soleil de l’Été. Toboe s'avança vers la louve couleur sable et s'assit avec légèreté tout à côté d'elle. Il ne le touchait pas totalement mais le vent qui soufflait entremêlait quelques poils de leur pelage. Rouge et sable. Le mélange était quelque peu improbable mais pourtant assez joli. Les estivaux portaient sur eux toutes les couleurs possibles de toute manière, ce n'était pas une nouvelle. Ils avaient les loups les plus colorés et les plus beaux de tout Four Seasons de l'avis du Veilleur si attaché à son Clan.

- Je ne pense pas que notre douleur puisse un jour disparaître totalement mais il faut puiser en elle pour qu'elle nous rende plus forts, pour qu'elle nous permette d'avancer et d'être meilleur. Il faut transformer ce qui te semble une faiblesse en force. Nos vies font de nous ce que nous sommes.

Il n'avait pas pris conscience de ce fait il y avait longtemps, c'était tout nouveau pour lui et il tentait de s'y fier. Mais, ce qu'il ne disait pas à son Alpha, c'était que sa soif de vengeance ne s'était pas encore éteinte. De toute manière, même s'il l'avait voulu il n'aurait pu arrêter ce qu'il avait mis en branle. Il avait fait une promesse aux énergie. Il ne pouvait que la tenir ou mourir. Il sourit à Akisa, tentant de dissimuler ses doutes et sa crainte de la guerre à venir. Tout comme il ne pouvait rien contre les énergies la louve se devait de suivre ce qu'il se passait à l'échelle de leur monde. Quoi qu'il puisse leur en coûter.

- Tu ne me dois absolument rien. Je suis là pour toi, comme tout loup proche de toi doit l'être. Il ne faut jamais se croire si seul que plus rien ne compte. Il y a toujours des loups pour croire en nous, pour espérer qu'on se remette rapidement, pour se battre à nos côté. Tu n'es pas seule Akisa, tu as tout un Clan derrière toi.

Entendre Toboe parler était comme inspirer profondément, remplir ses poumons d'un air nouveau, un air pur et bienfaisant. La jeune Alpha ferma un instant les yeux, respirant, oubliant le cratère que son regard fixait bêtement à l'instant. Elle se sentait devenir petit à petit plus légère, plus sereine, guidée par la voix du Veilleur, qui reprit après un court silence :

- Tu ne peux pas être très proche de chacun d'eux mais, même s'ils ne sont pas tous tes meilleurs amis, ils sont prêts à beaucoup pour que tu retrouves le sourire.

La tête redressée mais les yeux toujours clos, Akisa réfléchissait, laissait ses pensées s'entortiller autour des mots que ses oreilles venaient de percevoir, et se sentait envahie lentement par la paix. Une fois de plus, elle devait reconnaître la justesse des propos du loup carmin, et bien que l'idée ait pu trotter quelque part dans son inconscient, l'entendre de vive voix la rendait plus réelle. Oui, être à la tête d'un clan supposait de lourdes responsabilités, mais aussi des liens forts, du soutien. Enfin, tant qu'elle n'était pas un tyran, elle devrait être soutenue... Et comme elle n'avait aucunement l'intention de le devenir, cela ne devrait pas poser problèmes.

Un soupir plus assuré s'échappa de ses lèvres lorsqu'elle expira. Les yeux verts se rouvrirent, encore brillants mais moins tourmentés, et vinrent se poser sur Toboe. Il se pouvait qu'on manque terriblement de loups comme lui, sensibles, à l'écoute des autres, prêts à tout pour le bonheur d'autrui en dépit de leurs propres souffrances. Les lèvres d'Akisa esquissèrent un léger sourire ; elle était heureuse et rassurée de savoir que quelqu'un comme le loup rouge prenait soin de son bonheur et se montrait présent quand elle était en difficulté. Ce réconfort lui donnait envie de sortir une bonne fois pour toutes de cette torpeur douloureuse, et surtout de se montrer digne de l'attention qu'elle avait reçue. Elle serait forte, plus rien ne pourrait la faire flancher !

- Tu as un don pour dire exactement ce que les autres ont besoin d'entendre, on dirait... J'apprécie énormément cette qualité et ce dévouement que tu présentes, Toboe. Ça me touche, grâce à toi je reprends  peu à peu espoir... Tout semble moins sombre.

Et c'est vrai qu'elle regardait le ciel, et le trouvait comme lavé, arborant des couleurs rafraîchies, encore plus belles qu'auparavant. Le nez levé, l'Alpha se perdait dans sa contemplation, et entendit le Veilleur venir s'asseoir à côté d'elle. Sa présence lui était bénéfique, elle sentait son coeur reprendre un rythme moins douloureux, et les nuages noirs qui hantaient ses pensées s'effilochaient déjà, se dispersant en lambeaux cotonneux au loin.

- Je ne pense pas que notre douleur puisse un jour disparaître totalement mais il faut puiser en elle pour qu'elle nous rende plus forts, pour qu'elle nous permette d'avancer et d'être meilleur. Il faut transformer ce qui te semble une faiblesse en force. Nos vies font de nous ce que nous sommes.

Lentement, Akisa hocha la tête. Son sourire ne flottait plus sur ses lèvres, le sérieux ayant repris le dessus, mais elle arborait un air plutôt calme et serein. Elle avait l'impression d'avoir grandi en quelques instants, d'abord par son effondrement dans la tristesse, puis son redressement grâce au loup rouge. Il avait entièrement raison, cette douleur devait être sa force ; les souvenirs la rendaient mélancoliques, mais désormais c'était en leur honneur qu'elle se battrait, qu'elle serait droite et fière. Il était inutile de pleurer sur le passé, mais elle pouvait s'appuyer dessus pour aller de l'avant. Elle ne décevrait pas ses parents, elle continuerait sa route dignement, et mènerait le clan Estival aussi loin que possible ! Déjà, le regard de la louve couleur de sable se faisait plus déterminé, plus perçant. Fini de larmoyer sur son propre sort, elle avait celui d'une meute entre les pattes, et se devait de leur montrer l'exemple, d'être une Alpha digne et forte. Son propre exemple serait ses parents, d'une part, mais aussi Toboe, qui était parvenu à se relever d'une terrible perte, et pouvait maintenant en tirer de l'expérience pour l'aider.

La jolie estivale se tourna vers le Veilleur, retrouvant un sourire un peu plus sûr pour répondre au sien. Elle put voir qu'une fois de plus, il disait la vérité, puisque sa propre douleur et ce qu'elle entraînait le hantait toujours, elle pouvait le voir dans le trouble de ses yeux carmins. Mais il surpassait tout ça pour elle, et elle l'en remerciait énormément. Elle aussi, malgré l'assurance qu'elle retrouvait, devait encore laisser paraître de la crainte vis-à-vis de la guerre qui s'approchait, mais puisqu'elle n'était plus seule, elle savait qu'elle devait être confiante.

- Même si tu penses qu'il est normal de venir en aide à ceux qu'on aime, je tiens à te remercier pour... tout. Tes paroles, ta présence... Ça compte beaucoup pour moi. Je me sens plus forte qu'auparavant, prête à tourner une nouvelle page de mon histoire et de celle de l’Été !

Un léger soupir s'échappa de nouveau tandis que les yeux verts virevoltaient un instant sur les environs. Elle se sentait rassérénée, mais quand même, elle n'était pas encore invincible. C'était bien de se sentir prête à soulever des montagnes, le mental était primordial, mais elle ne devait pas oublier non plus que son corps était encore fatigué de toute l'angoisse qu'elle subissait. Enfin, autant rester positive pour le moment... Le regard sur l'horizon, qui présentait ici le territoire estival du haut du volcan, Akisa conserva son petit sourire, prononçant quelques mots d'une voix plus basse, un peu rêveuse.

- Quand je vois un magnifique paysage comme celui-là... Je me dis que les moments durs comme cette guerre ne peuvent pas durer. Quoi qu'il arrive, il y a toujours quelque chose de plus beau qui surviendra...

Son coeur se serra un instant ; elle repensa aux mots de Toboe lors de l'Assemblée, à ce que l'avenir lui réservait peut-être... A son sacrifice pour venger la mort de son amour. Mais cela ne changeait rien à ce qu'elle disait. Peut-être qu'après la vie, on pouvait accéder à un autre monde, là où attendent ceux qui précèdent... Encore un peu plus bas, la jeune louve répéta quelques mots.

- Quoi qu'il arrive...

Toboe garda le silence tandis que son Alpha se perdait dans un silence contemplatif. Il n'aurait su dire à quoi elle pensait mais ce devait être important pour qu'elle semble aussi déterminée. Ses yeux verts étaient fixés sur l'horizon et le Veilleur avait peur de la déranger. Il serait bien parti sur la pointe des pattes mais il ne parvenait pas à s'y résoudre. Il attendait il ne savait trop quoi de la part de la Reine de l’Été. En fait il espérait seulement que sa présence la réconfortait et qu'elle avait encore besoin de lui. Car c'était là l'une des plus grandes peurs du Veilleur : devenir inutile et être mis au banc de la société. Il enfouit ses inquiétudes derrière la bonne humeur et les belles paroles qu'il venait de servir à Akisa. Il y croyait mais ne parvenait pas tout à fait à le mettre en pratique. La femelle se retourna vers lui, un sourire plus sûr et plus vrai étirait maintenant ses babines. Celui de Toboe, heureux d'avoir pu l'aider, fit écho au sien alors qu'elle le remerciait.

- Je me sens plus forte qu'auparavant, prête à tourner une nouvelle page de mon histoire et de celle de l’Été !

Le Veilleur sourit de plus belle et hocha la tête. Akisa faisait une bonne Alpha. Peut-être même meilleure que ses parents. Elle avait la tête sur les épaules et elle ne manquait pas de courage. C'étaient des qualités indispensables pour faire un dirigeant digne de confiance. Et puis, ce n'était pas comme si elle semblait ravie de tous les envoyer à la mort. Elle se faisait du soucis pour eux. La louve soupira sans que cela ne fasse sens aux yeux du Toboe. Que se passait-il ? Continuait-elle de douter du bien fondé de ses actions ? Il ne fallait pas. Un ami était là pour aider mais aussi pour rassurer. Il le lui avait déjà dit mais était prêt à le répéter autant de fois que nécessaire, jusqu'à ce qu'elle en ait pleinement conscience.

- Nous sommes ta famille et c'est ce qui nous rend plus fort. Jamais tu n'ignores nos besoins ou nos désirs, cherchant toujours à faire au mieux. Tu es déjà quelqu'un de très bien mais, avec ça, tu vas devenir une Alpha formidable.

Ses paroles étaient sincères, il les pensait réellement. On sentait cette honnêteté presque enfantine dans sa voix. Il ne mentait pas. Outre le fait qu'il mentait très mal, jamais il ne se permettrait de ne pas dire toute la vérité à sa supérieure. Il la respectait bien trop pour se laisser aller à ce genre de basses méthodes. La voix de la louve s'éleva encore dans l'air, le tirant de ses pensées.

- Quand je vois un magnifique paysage comme celui-là... Je me dis que les moments durs comme cette guerre ne peuvent pas durer. Quoi qu'il arrive, il y a toujours quelque chose de plus beau qui surviendra...

Il aurait voulu pouvoir lui assurer que ce n'était rien. Que la guerre n'était qu'un vague mirage qui allait bientot se dissiper. Tous pourraient en rire et se dire qu'ils avaient été idiots de croire en une telle farce. Sauf que ce n'était pas vrai. Il ne pouvait lui dire ça parce qu'ils savaient tous deux pertinemment que ce n'était pas ce qui se passerait. La guerre aurait lieu. Il y aurait des morts, de chaque côté. Le gagnant serait celui qui perdrait le moins d'êtres chers. On murmurait que des alliances étaient en passe de se créer entre l'Automne et l'Hiver. Mais avec qui les estivaux pouvaient-ils bien pactiser ? Le cœur du loup se serra à cette pensée. Il devait se reprendre, ne pas laisser ces sombres pensées prendre possession de son âme. Il ne voulait pas re-sombrer de nouveau. Il avait eu trop de mal à se tirer des ténèbres pour les laisse l'engloutir sans rien dire.

- Tu as raison. De bonnes choses peuvent toujours finir par arriver. Le tout c'est d'y croire. On n'obtient pas toujours ce que l'on veut mais l'espoir nous aide à atteindre des objectifs qui nous semblaient inatteignables à la base. Il ne faut jamais baisser les pattes. Temps que nous sommes en vie le bonheur reste accessible.

Parce que le bonheur c'était pas que tout soit parfait chaque jour qui passait. Ce n'était qu'une somme de bons moments passés avec ceux qu'on aime. C'étaient les jeux de louveteaux avec Sheen. C'étaient les moments passés avec Haru. C'étaient des bains de soleil. C'étaient des rencontres. C'était le vent qui soufflait doucement dans leurs fourrures. C'était un tout. C'étaient des évènements qu'on ne pouvait oublier.

- Tu es en droit de te faire du soucis pour la guerre mais ne t'en fais pas. Nous réussirons à être forts. Et d'ailleurs, tu n'es pas obligée de te battre. Dirige nous depuis l'arrière. Ne met pas ta vie en danger pour un couple assoiffé de pouvoir. Ils ne peuvent pas gagner contre trois clans, même avec l'aide des neutres.

C'était à son tour de s'inquiéter. Il ne fallait pas que leur Reine s'en aille à la mort alors qu'elle venait de reprendre espoir. Elle ne pouvait pas mourir maintenant qu'elle avait comprit de quelle manière elle devait mener les siens. Non pas qu'elle n'eut pas su le faire auparavant mais elle ne possédait pas encore cette force et cette maturité qu'on lisait maintenant au fond de ses prunelles.

- Je ne dis pas que tu n'en serais pas capable. Seulement je ne sais pas comment nous ferions sans toi...

La question se posait réellement. Akisa n'avait pas d'enfants et n'avait pas encore désigné de loup pour prendre sa succession. Qui les estivaux pourraient-ils mettre sur le trône de l’Été si Akisa venait à disparaître ? Il n'osait penser à la débâcle que cela occasionnerait. Et puis, il avait déjà perdu trop de monde autour de lui. Il ne supporterait pas une nouvelle perte alors que leur amitié était naissante.

- Nous sommes ta famille et c'est ce qui nous rend plus fort. Jamais tu n'ignores nos besoins ou nos désirs, cherchant toujours à faire au mieux. Tu es déjà quelqu'un de très bien mais, avec ça, tu vas devenir une Alpha formidable.

Comment le coeur d'Akisa pouvait-il rester compressé alors que tant de gentillesse s'écoulait en lui à travers les paroles de Toboe ? Parler avec lui était comme appliquer un onguent bienfaisant sur une vilaine plaie, la douleur était apaisée et ça guérissait lentement, mais sûrement. Petit à petit, la jolie louve trouvait sur quoi prendre appui pour retrouver son courage, affronter ses peurs, et sentait son esprit se fortifier, prendre de l'assurance. Comme quoi elle ne pouvait pas devenir plus mature toute seule, comme le Veilleur le soulignait avec beaucoup de justesse, elle avait besoin de soutien, d'appui, d'êtres qu'elle aimait et qui l'aimaient aussi. Et comme c'était bon de se sentir entourée, c'était peut-être sa plus grande richesse !

Seule l'ombre de la guerre venait ébranler ce trésor dont elle commençait à prendre conscience et auquel elle tenait déjà beaucoup. Ses prunelles vertes regardaient Toboe et cherchaient du réconfort, un écho de ses pensées, la moindre chose à laquelle elle pourrait se raccrocher pour reprendre espoir et oublier ce cauchemar dans lequel tout le monde semblait plongé, à différentes doses...

- Tu as raison. De bonnes choses peuvent toujours finir par arriver. Le tout c'est d'y croire. On n'obtient pas toujours ce que l'on veut mais l'espoir nous aide à atteindre des objectifs qui nous semblaient inatteignables à la base. Il ne faut jamais baisser les pattes. Temps que nous sommes en vie le bonheur reste accessible.

La paix revint quelques peu dans l'esprit agitée de la jeune Alpha, et ses babines retrouvèrent la fine courbe d'un sourire naissant. Elle était soulagée de voir qu'il pensait comme elle, car peut-être que si tout le monde pensait de la sorte, l'idée même de la guerre finirait vraiment par s'évanouir... Mais non, elle devait rester rationnelle, et faire face. Tant que nous sommes en vie... Mais qui resterait en vie ? Lui, serait-il toujours là après cette guerre ? Son coeur aurait tellement souhaité répondre "oui" à cette question, mais elle savait que son destin était tracé. Elle ignorait comment et pourquoi, mais quelque chose lui soufflait que c'était déjà écrit, et cette pensée serra une nouvelle fois son coeur, bien qu'elle tâche de ne pas se laisser entraîner au désespoir à nouveau. Elle ne devait penser qu'à ce dont elle pouvait être riche et qui l'aiderait : l'espoir et son entourage.

- Tu es en droit de te faire du soucis pour la guerre mais ne t'en fais pas. Nous réussirons à être forts. Et d'ailleurs, tu n'es pas obligée de te battre. Dirige nous depuis l'arrière. Ne met pas ta vie en danger pour un couple assoiffé de pouvoir. Ils ne peuvent pas gagner contre trois clans, même avec l'aide des neutres.

Les yeux verts clignèrent et se firent plus déterminés. Rester en retrait ? Derrière, à l'abri derrière les siens qui se mourraient sous ses yeux ? Non, c'était impossible. Elle était consciente de la peur qu'elle éprouvait à l'idée de combattre, et savait l'enjeu qu'une telle bataille faisait planer sur sa tête comme sur celle de tous les autres loups, mais elle savait aussi qu'elle ne pourrait se résoudre à rester en arrière. Sa place était au milieu des autres, avec eux, pour les épauler, leur redonner courage, et se sentir elle aussi rassurée. Malgré l'inquiétude qu'elle voyait dans les prunelles couleur de sang de Toboe et qu'elle ressentait aussi, elle ne pouvait imaginer une autre solution que celle-ci.

- Je ne dis pas que tu n'en serais pas capable. Seulement je ne sais pas comment nous ferions sans toi...

La jolie Estivale baissa un instant les yeux, un frisson lui parcourant l'échine. C'est vrai, elle devait songer à ça aussi. Mais rien n'y faisait, malgré tous les arguments qui pesaient contre cette décision de se battre au front, elle ne pouvait changer d'avis. Elle y était résolue, et rien ne pouvait venir ébranler cette décision, même pas sa peur du combat et de la mort ; elle avait la ferme conviction que sa place était là-bas, au milieu de son peuple, et elle ne pouvait lutter contre ce que lui soufflait son instinct.

- Je comprends ce que tu veux dire, et pour le moment il est plutôt vrai que j'en serais incapable... Mais Toboe, je ne compte pas rester derrière. Ça, j'en serais réellement incapable. Non, je m'entraînerai pour pouvoir me tenir fièrement parmi mes soldats et mes tueurs, face à l'ennemi.

Akisa se redressa et porta son regard sur l'horizon, fière et droite sur le bord du volcan. Elle se sentait tout à coup bien plus légère et forte que ce qu'elle avait été depuis la mort de ses parents. C'était comme une renaissance, à présent elle se sentait réellement prête à devenir une Alpha digne de confiance.

- Ce n'est pas une question d'orgueil, ou de fierté. C'est ce que je ressens, et je ne peux pas lutter contre cette idée. J'ai la profonde conviction que ma place est avec mon peuple, au combat, et je travaillerai dur pour être à la hauteur, je te le promets !

La voilà qui était à présent remontée comme une pendule, la tête pleine de pensées qui se croisaient et s'entremêlaient. Néanmoins, elle gardait les pattes sur terre, et c'est en baissant les yeux vers ces-dites pattes qu'elle jugea qu'il lui faudrait effectivement un bon entraînement. Quotidien, et acharné sûrement, mais elle ne faiblirait pas. Elle devait retrouver une bonne santé, se muscler, et maîtriser parfaitement ses pouvoirs, sans quoi elle se ferait déchiqueter en moins de deux. Mais elle n'avait pas peur de l'effort, elle avait toujours appris à travailler dur pour récolter ce qu'elle désirait, et elle suivrait cette idée ! Après, il faudrait quand-même qu'elle réfléchisse à ce qu'il convenait de faire si jamais elle disparaissait... Se mettant à faire les cent pas, elle songeait à voix haute.

- Je tiens fermement à être parmi les combattants, mais je ne suis pas une insensée. Je vais prendre mes précautions, que ce soit pour la bataille ou... ou bien si je ne survis pas à la bataille. Elle déglutit difficilement, cette idée étant quand même plutôt effrayante, et secoua la tête pour passer à autre chose. Je vais réfléchir à tout ça. A mon successeur. A la tournure que pourrait prendre l’Été si je devais disparaître. Je ne vous laisserai pas tomber comme ça !

La jeune Alpha poussa un léger soupir, et son visage était plus souriant lorsqu'elle le releva vers le Veilleur. Elle avait encore une longue route à faire avant d'être réellement prête, mais à présent elle se sentait d'attaque pour prendre cette route et se lancer dans son avenir. Et savoir qu'elle était bien entourée sur le chemin l'aidait vraiment, aussi elle remerciait chaleureusement le loup rouge de se trouver là en son for intérieur.

- Je ferai attention, dans la mesure du possible. Je donnerai le meilleur de moi-même, parce que je sais que c'est ce que ferons les Estivaux, et je ne veux pas être en reste. Alors ne perdons pas la foi et ne laissons pas l'inquiétude nous étreindre encore, nous avons du boulot !

Elle se sentait réellement légère, presque sereine, soulagée ! Les tâches à accomplir étaient toujours là, devant elle, mais elles étaient maintenant dévoilées, nommées, ordonnées, et Akisa savait dans quel sens organiser tout ça, alors elle en était moins effrayée. Elle voulait à présent que Toboe ne s'inquiète plus, qu'elle cesse elle aussi de s'inquiéter, et que tous deux se tournent vers ce futur, ce futur qu'ils allaient peut-être explorer ensemble pendant un temps.

L'idée de trouver un nouvel ami en la personne du loup rouge réjouissait réellement le coeur de la jeune Alpha, qui se sentait comme si elle venait de dénicher un magnifique trésor.

Elle était belle son Alpha. Belle et fière, elle avait l'allure d'une guerrière alors que les doux rayons du soleil faisaient luire sa fourrure. Le cœur du Veilleur se serra malgré tout. Comment feraient-ils si leur dirigeante venait à perdre la vie ? Il ne savait pas. Personne ne savait d'ailleurs bien qu'Akisa assurât qu'elle allait trouver une solution. Elle allait certainement nommer un loup pour lui succéder. Un de ses Bêta sans nulle doute puisqu'elle était sans héritiers directs. Le loup écarlate se demandait bien quelle serait sa réaction à lui à l'annonce du nom du successeur de l'Alpha estivale. Certainement mauvaise. Il ne voyait pas quel loup aurait la prestance pour assumer ce rôle. Nul n'avait ce port naturellement altier. Il retint un soupir. Il ne devait pas montrer ses doutes à Akisa. Elle avait besoin de soutient et il lui en offrirait. Elle était toujours tournée vers l'horizon et Toboe ne put s'empêcher d'esquisser un sourire. C'était peut-être la première femelle qu'il parvenait à trouver jolie. C'était une première pour lui et ce n'était pas désagréable même si ce n'était rien de comparable à la sensation qu'il avait pu ressentir en voyant Haru pour la première fois. La pensée du loup vert étreignit encore son cœur. Il ne pouvait penser à lui sans éprouver remord, tristesse et colère. Il aurait voulu y parvenir afin de ne pas souiller sa mémoire mais c'était comme impossible.

- Je donnerai le meilleur de moi-même, parce que je sais que c'est ce que ferons les Estivaux, et je ne veux pas être en reste. Alors ne perdons pas la foi et ne laissons pas l'inquiétude nous étreindre encore, nous avons du boulot !

La voix de son Alpha le fit redescendre sur terre tandis qu'il retenait les larmes qui montaient à ses paupières. Il ne devait pas pleurer. Il avait déjà trop versé de larmes. Pour Haru, pour Sheen, pour Aerin, pour Canaan qu'il avait si peu connu mais qui les avait tous sauvé, pour lui même aussi. Trop de larmes et pas assez de sourires alors qu'il aimait tant cette joie de vivre qui l'avait animé pendant des années durant. Il voulait redevenir louveteau. Ne plus penser à la guerre, aux morts et à toutes ces choses désagréables. Il voulait retrouver son innocence perdue. Les mots d'Akisa trouvaient un écho inattendu dans son âme. Ne pas perdre la foi. Depuis quand l'avait-il égarée ? Semée aux quatre vents pour ne plus penser ? Il ne se souvenait plus. Il n'avait pas vraiment envie de se souvenir en fait.

- Je serai honoré de t'aide à t'entraîner si besoin est. Je sais bien que le Clan comporte un certain nombre de loups plus confirmés que moi pour ça mais on ne sait jamais.

Il laissa un petit sourire fleurir sur ses babines. Il n'en avait pas vraiment envie mais il savait que rien n'appelait mieux la joie que la joie que l'on pouvait provoquer. Parfois il fallait cesser d'attendre que le bonheur nous arrive tout cuit et se lancer, le forcer à venir jusqu'à nous. Les autres pouvaient bien rire de lui et de son optimisme peu lui importait. Il voulait le retrouver, plus que tout. Et cela commençait par des actions aussi simple qu'un petit plissement des babines.

- Et puis même si c'est juste pour papoter ou aller marcher sur la plage je ne doute pas que tu saches où me trouver. Bien des loups sont là pour toi et je peux t'assurer que j'en fais parti. Je n'hésiterai pas à faire ce qu'il faut pour que ce sourire qui te va si bien reste sur tes babines. Le bonheur est éphémère, il faut savoir le saisir pour en profiter avant qu'il ne s'envole.

Encore une fois il faisait référence au bonheur. A ce sentiment qui semblait le fuir depuis que son âme était déchirée. Mais son propre état lui importait peu. Il avait trouvé un nouvel objectif. Il espérait, comme par besoin de se raccrocher à quelqu'un, qu'il deviendrait quelqu'un d'important pour Akisa. Il avait besoin de quelqu'un à aider, à soutenir. Comme pour se prouver à lui même qu'il en était encore capable.

- Je serai honoré de t'aide à t'entraîner si besoin est. Je sais bien que le Clan comporte un certain nombre de loups plus confirmés que moi pour ça mais on ne sait jamais.

Akisa sourit, à nouveau, un sourire doux comme elle n'en avait pas offert depuis trop longtemps. Avant aujourd'hui en tout cas, mais à présent elle se sentait renaître, et espérait que sourire deviendrait bientôt plus facile, même si ce ne serait jamais aussi spontané que chez un louveteau ! En tout cas, la proposition de Toboe lui faisait chaud au coeur ; il est vrai qu'on pouvait trouver des combattants plus expérimentés dans le clan, mais elle faisait confiance au Veilleur, et tout ce qu'elle pourrait apprendre de lui, en combat ou autre, serait déjà très bien. Le seul fait de passer du temps en sa compagnie la détendrait, et ça c'était vraiment quelque chose dont elle avait besoin, il était donc le bienvenu.

- Et puis même si c'est juste pour papoter ou aller marcher sur la plage je ne doute pas que tu saches où me trouver. Bien des loups sont là pour toi et je peux t'assurer que j'en fais parti. Je n'hésiterai pas à faire ce qu'il faut pour que ce sourire qui te va si bien reste sur tes babines. Le bonheur est éphémère, il faut savoir le saisir pour en profiter avant qu'il ne s'envole.

La jeune Alpha se sentit rougir légèrement au compliment, mais garda ses yeux verts posés sur le loup carmin. Elle était contente d'avoir des loups comme lui auprès d'elle ; plus que contente même, soulagée. Quoi que c'était peut-être même plus fort que ça, mais elle ne parvenait pas à poser de mot dessus, face à tout ce que ça lui apportait. Qu'importe, ce qui comptait c'était de le ressentir et d'être consciente de la chance qu'elle avait ! Elle répondit au sourire de son vis-à-vis, encore timide, espérant le raviver.

- Ce serait réellement avec grand plaisir, que ce soit pour combattre, discuter ou se promener ! Ton aide sera la bienvenue, car parler, simplement être en ta compagnie... ça me redonne du courage, et puis ça me repose aussi ! C'est vraiment une bouffée d'air frais, et les dieux savent si j'en ai besoin... Autant maintenant qu'à l'avenir.

Elle resta silencieuse un instant, perdue dans ses pensées. Dire qu'il y avait encore des loups qu'elle ne connaissait que de nom en Été... Peut-être y aurait-il d'autres belles rencontres à faire ! En tout cas, elle ne regrettait pas que Toboe soit venu apaiser son chagrin ; elle ne le connaissait pas spécialement avant ça, quoi qu'elle lui ait déjà adressé la parole, mais elle ne soupçonnait pas la profondeur de sa gentillesse et de son attention, malgré les rumeurs qui circulaient déjà sur lui à propos de son optimisme débordant. Seulement, se révélaient aussi sa tristesse et sa douleur, elle en était consciente... Elle pouvait le voir dans ses yeux, malgré les sourires qu'il lui adressait et le bonheur qu'il rappelait à eux par tous les moyens ; elle avait vu les larmes manquer de couler à peine un peu plus tôt. Sous cette joie qu'il tâchait d'apporter à ceux qui l'entourait, il y avait aussi son propre gouffre, ses propres ténèbres... Il lui avait apporté tellement de soulagement et de sérénité, Akisa voulait en faire de même ; ses yeux verts se rivant aux prunelles rouges du Sentinelle, elle se fit la promesse silencieuse de tout faire pour donner autant qu'elle recevait, afin que tous deux soient guéris de leurs maux, autant que faire se peut. Leur souffrance n'était pas réellement comparable, mais tant pis, tant qu'elle pourrait lui apporter joie et bonheur, elle serait elle-même heureuse.

- Je regrette de n'avoir pu profiter de ta présence plus tôt, mais enfin, ce qui est passé est passé, inutile de s’appesantir là-dessus. Je compte bien faire appel à toi plus souvent à l'avenir, si tu permets que je te réquisitionne régulièrement !

Son sourire se fit plus affirmé, plus affectueux. Elle sentait qu'elle aurait certainement besoin de l'attention et de l'affection de ce loup à l'avenir, autant qu'elle voudrait le réconforter elle aussi. Si elle en croyait la chaleur qui commençait à s'épanouir dans son coeur, et se répandait dans tout son être, elle avait aujourd'hui trouvé un ami précieux, et comptait bien le garder auprès d'elle le plus longtemps possible, aussi longtemps que leurs destinées le permettraient.

Toboe sentit ses joues rosirent aux compliments de la louve sable bien que cela ne se vit pas sous son pelage. Il était une bouffée d'air frais, cette dénomination lui plaisait beaucoup. Il avait un peu l'impression de retrouver celui qu'il avait été jadis. Celui qu'il avait été avant la mort de Haru, avant les problèmes que pouvait rencontrer Sheen. Il chassa ces soucis de son esprit au moins pour quelques minutes. Maintenant qu'Akisa lui accordait sa confiance il devait s'en montrer digne. Les prunelles vertes n'étaient plus emplies de larmes et c'était là le plus beau cadeau qu'elle eut pu lui faire. Il aimait voir les autres heureux autour de lui. Le bonheur était quelque chose de communicatif, quelque chose qui se partageait.

- Je regrette de n'avoir pu profiter de ta présence plus tôt, mais enfin, ce qui est passé est passé, inutile de s’appesantir là-dessus. Je compte bien faire appel à toi plus souvent à l'avenir, si tu permets que je te réquisitionne régulièrement !

Le loup écarlate lui renvoya l'un des sourires éclatants dont il avait le secret. Le premier réel sourire. Le premier contenant réellement de la joie et un brin de son ancien optimisme depuis des lustres. Il était si heureux de ces paroles. Elle était son Alpha mais il sentait que le gouffre entre leurs rangs respectifs n'importait que peu, voir même qu'il ne comptait pas. Ils étaient deux êtres et non pas deux rangs. Ils étaient seulement là pour panser leurs blessures au contact de quelqu'un qui avait autant besoin d'eux qu'eux avaient besoin de l'autre. Peut-être était-ce un peu embrouillé dans son esprit mais le principe était clair. Akisa avait besoin de lui et lui avait besoin d'elle. Il avait besoin de se raccrocher à quelqu'un. De se sentir utile pour faire fuir cette culpabilité dévorante et ces ombres qui envahissaient chaque jour un peu plus son cœur.

- Tu peux me faire appeler dès que tu en as envie. Juste il faudrait tout de même éviter de laisser les frontières sans surveillance. Bien que je puisse toujours laisser mes petits amis à l'affût.

Tandis qu'il prononçait ces paroles Toboe se projeta une fois encore dans le monde des énergies, puissant dans les herbes qui les entouraient pour faire jaillir un oiseau argenté devant les yeux d'Akisa. Il le fit voleter dans le ciel, de ci de là, au dessus de leurs têtes.

- Ils peuvent être mes yeux si je le désire. Ce n'est pas la technique la plus au point que je puisse posséder mais ce sera l'occasion de m'améliorer.

D'une simple pensée il fit disparaître le volatile en une multitude de particules argentées. Comme s'il pleuvait de la poussière d'étoiles. Il avait un don chouette quand même...

Les yeux verts d'Akisa étaient plongés dans les prunelles carmins du Veilleur, et lorsque celui-ci lui offrit son sourire en réponse à sa proposition, elle sut que c'était un de ceux d'avant, ceux qui devenaient trop rares aujourd'hui, ceux qui faisaient réellement du bien, aux autres mais aussi à soi-même. Recevoir ce sourire lui fit chaud au coeur, et le sien se fit plus éclatant. En cet instant, elle se sentit incroyablement proche de Toboe, sur la même longueur d'ondes ; comme deux âmes en peine qui se retrouveraient pour se soulager de leurs peines. Dans un sens, c'étaient ce qui se rapprochait le plus de leur situation actuelle... Mais jamais la jeune Alpha n'aurait pensé possible de se sentir autant apaisée, autant en phase avec quelqu'un qu'au final, elle ne connaissait pas tant que ça. Mais elle se dit que c'était peut-être parce que le connaître n'était pas le plus important ; ce qui comptait, c'était de se comprendre, et de se soutenir pour l'avenir. Et en cela, elle savait qu'ils pourraient vraiment compter l'un sur l'autre.

- Tu peux me faire appeler dès que tu en as envie. Juste il faudrait tout de même éviter de laisser les frontières sans surveillance. Bien que je puisse toujours laisser mes petits amis à l'affût.

Ah, c'est vrai que laisser vide les frontières de son territoire pouvait être problématique... Mais bon, on pouvait s'arranger, d'autres Sentinelles avaient des rondes à faire, ce n'était pas un problème ! Et puis elle tâcherait de ne pas abuser en le gardant sans arrêt auprès d'elle... Tombée dans ses pensées pour résoudre le point de surveillance des frontières, la jeune Alpha ne put réprimer un sursaut lorsqu'une forme argentée passa sous son nez.

- Qu'est-ce que..??

Levant le museau, elle suivit la silhouette des yeux, et se rendit compte qu'elle devait être de la même substance que les papillons un peu plus tôt, donc de l'oeuvre du loup rouge. Akisa lui jeta un coup d'oeil, son sourire revenant pétiller sur son visage, puis reporta son attention sur ce qu'elle identifia comme un oiseau.

- Quelle merveille !

- Ils peuvent être mes yeux si je le désire. Ce n'est pas la technique la plus au point que je puisse posséder mais ce sera l'occasion de m'améliorer.

Après avoir voleté au-dessus d'eux un instant, l'oiseau se dématérialisa, retombant en une fine poussière argentée, brillant dans les rayons du soleil. Toujours émerveillée, la jeune Alpha resta encore un moment la truffe en l'air, les yeux brillants comme ceux des louveteaux. Quelle beauté, Toboe pouvait vraiment faire apparaître de petites merveilles ! Les yeux verts de la louve à la tresse bleue se reposèrent sur son ami, et elle le gratifia d'un sourire ravi.

- C'est un don formidable que tu as là, vraiment ! A la fois simple et magique, tellement beau et pur... Et pratique, avec ça, si tu peux l'utiliser pour surveiller !

La jolie estivale était réellement charmée par cette capacité à faire apparaître et contrôler ces petites entités, tellement belles et divertissantes... Leur vue suffisait déjà à soulager les peines ! Si en plus elles pouvaient servir d'espions... Que demander d'autre ! Bon, du coup ce pouvait être une autre solution au kidnapping qu'elle ferait de Toboe. L'idée la fit sourire un peu plus et elle secoua la tête, portant son regard sur les environs.

- Je tâcherai d'être raisonnable tout de même, nous aurons certainement tous deux du pain sur la planche. Les prunelles vertes se retournèrent vers le loup carmin, accompagnées d'un sourire radieux. Mais je compte bien garder du temps pour qu'on puisse se retrouver, pour parler, ou simplement pour être là. Ta seule présence me ferait du bien, je pense.

Parce qu'elle savait que le Veilleur la soutiendrait quoi qu'il arrive, mais cela se passait de mots, alors elle se contenta de le regarder en souriant. Et dire qu'elle était venue ici en pleurant toutes les larmes de son corps... Cela faisait un bien fou de voir le chemin parcouru en quelques heures à peine, et de sentir à nouveau plus sereine, et surtout plus forte.

- Je tiens à te remercier encore. Sans toi je n'en serai pas là, à me projeter avec plus d'assurance dans l'avenir. Alors merci encore, Toboe...

Son regard se fit plus doux, et légèrement plus... humide. Ah, non, il ne fallait pas qu'elle se remette à pleurer ! D'ailleurs, maintenant qu'elle n'était plus une pauvre loque désespérée, elle devait avoir quelques tâches de chef à accomplir... La perspective de s'y atteler ne lui plaisait pas plus que ça, mais elle irait quand même d'un pas plus sûr et la tête haute, et ça, c'était pas négligeable !

- Bon, je pense qu'il est temps de retrouver la réalité, et de se remettre aux choses sérieuses. J'ai tendance à l'oublier, mais j'ai un clan à diriger à présent ! L'Alpha eut un petit rire, et se remit sur ses pattes, bien d'aplomb sur le bord du cratère. De toute façon, je te dis à bientôt, je pense ! Jusque là, porte-toi bien, Toboe.

Son sourire illuminait son visage, pur, vrai, radieux. Sa voix s'était faite douce et sincère, et ses yeux verts se plongèrent une dernière fois dans les prunelles rouges. Puis, la demoiselle se détourna et entama la descente du volcan ; haut les coeurs, l’Été avait besoin d'une tête forte pour la diriger, et elle serait digne de cette tâche ! Elle serait digne de l'amitié et l'affection que lui portaient ses proches, elle leur montrerait que grâce à eux, elle était invincible, et que sa saison resterait la plus belle de toutes.

HRP :