Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Que faisait-elle encore sur les terres neutres alors qu'on était maintenant en plein été ? C'était une excellente question. Enfin, elle aurait bien une idée mais ... Mais il lui était assez désagréable de l'évoquer. Elle se demandait si elle n'allait pas rendre visite à Melinya. Sauf qu'elle ne s'en sentait pas le courage. Elle avait bien rencontré son neveu. Mais de là à aller voir directement la mère du loupiot il y avait un monde. Un monde qu'elle ne parvenait pas à se résoudre à franchir. Il y avait un monde de décisions, d'obligations, d'anciennes blessures, de non-dits. Trop de choses pour elle. La jeune louve poussa un léger soupir. Elle pouvait bien se laisser aller à cette petite faiblesse. Elle était seule. Ses pas la menaient. Elle ne savait pas trop où à vrai dire et c'était un peu le cadet de ses soucis. Ce ne serait pas la première fois qu'elle s'égarerait ici. Elle connaissait parfaitement le chemin pour rentrer jusque sur les terres hivernales. Elle n'avait pas un sens de l'orientation qui soit infaillible mais il n'était pas mauvais.

Elle finit par atterrir sur les Terres Abondantes. Son ventre trouva qu'il était très à propos de gronder lorsqu'un lièvre eut l'outrecuidance de passer juste sous son museau. A croire que les proies n'avaient plus peur des loups. Non mais vraiment, le monde se déréglait totalement. Cependant, elle n'était pas d'humeur à chasser. Il aurait été plus sage qu'elle le fasse. Le gibier abondait ici, pas comme sur les terres hivernales. Mais peu lui importait. Elle n'était pas venue là pour ça et savait qu'elle ne parviendrait guère à avaler plus de quelques bouchées tant son estomac était serré. Elle ne parvenait pas à prendre de décision. Elle continua donc de déambuler dans la plaine. Des fois qu'une telle marche lui apporte une réponse simple et rapide à son problème. Tsss .... Non mais vraiment, c'était à se demander où elle avait la tête des fois. Elle allait rentrer. Elle ne trouverait pas, aujourd'hui encore, le courage de pousser jusqu'au Lac des Murmures. On lui avait dit que sa très chère sœur et ses rejetons s'étaient établis là bas.

Elle était donc en train de faire demi tour quand un bruit de cavalcade parvint à ses oreilles. Elle s'arrêta, les muscles bandés et les sourcils froncés. On aurait dit un loup. Mais après quoi un loup pouvait-il courir ainsi ? Elle ne tarda pas à avoir la réponse lorsqu'une boule de poils bondissante surgit du buisson auprès duquel elle se tenait, rapidement suivit par .... Adagio. Meneldil, surprise, n'eut pas le temps d'esquiver. La tête du loup heurta la sienne, lui faisant momentanément voir trente-six chandelles. Elle recula de quelques pas en secouant la tête, faisant passer le bourdonnement qui s'était logé dans ses oreilles. Elle entendit vaguement le loup gris lui présenter ses excuses :

- Oh, heu, je suis vraiment navré, je ne voulais pas te rentrer dedans... Bien sûr que non je ne voulais pas, c'est un accident...

La louve tricolore grimaça. Heureusement que c'était un accident ! Il ne manquerait plus que ça, que les membres de son propre clan veuille sa mort ou l'estropier. Elle secoua une nouvelle fois la tête, tentant de s'éclaircir plus ou moins les idées. Déjà qu'elle n'y voyait pas très clair avant, ce coup sur la tête n'arrangeait pas ses affaires. Elle sentait une migraine pointer le bout de son affreux museau tandis qu'Adagio continuait sur sa lancée :

- Ah, mais, heu, tout va bien ??

Meneldil se redressa, bien décidée à faire fi de la douleur qui commençait à irradier de son crâne. Elle n'était pas faible, ce n'était pas une simple collision qui allait avoir raison d'elle. Elle hocha simplement la tête dans un premier temps avant de tâter précautionneusement sa tête. Arf, c'était douloureux mais rien de bien grave. Elle s'en tirerait simplement avec une petite bosse. Elle redressa la tête et se rendit enfin compte de la gêne de l'hivernal. Sa réaction un peu froide n'avait pas du aider. Toute froide qu'elle était, la Sous-Chef hivernale n'était tout de même pas sans coeur aussi lança-t-elle un léger sourire au loup qui lui faisait face. Il n'avait pas pu prévoir qu'elle se trouverait là. Elle aurait du être chez elle, en train de veiller aux affaires du clan. Mais, suivant les conseils de cette fourbe de Ness, elle avait fait une sortie. Sortie moyennement réussie pour l'instant mais ça la changeait tout de même de son cadre habituel.

- Rien de casser ne t'en fais pas. Ceci dit, simple curiosité, comment se faisait-il que tu te sois retrouvé à courir après un lapin ? Ces espèces de bestioles sont bien trop vives pour qu'on puisse espérer les attraper ainsi. Enfin, deux fois sur dix peut-être mais guère plus.

Elle ne se moquait pas, c'était une simple constatation. Les lapins allaient souvent plus vite qu'un loup, même lancé en pleine course et pouvait tenir le rythme plus longtemps. Tenter de les rattraper à la course était donc relativement voué à l'échec. Mais bon, si cela amusait Adagio de procéder ainsi, pourquoi pas. Chacun ses occupations après tout. La louve s'assit et se lécha consciencieusement une patte, attendant une réponse qui ne venait pas. Elle leva un regard sur son vis à vis.

- Et toi, ça va ? Rien de cassé ? Pas trop mal au crâne ?

Il s'était inquiété de sa santé, elle songeait devoir faire de même. C'était ce qui devait être non ? Les relations avec autrui était quelque chose de compliqué. Ces relations naturelles qu'elle pouvait tisser lorsqu'elle était plus jeune, elle ne parvenait plus à mettre la griffe dessus. Dommage.

- Rien à signaler. Tout baigne ! Merci de...

Le loup gris laissa sa phrase en suspend. Meneldil haussa légèrement un sourcil. Oui ? Le loup semblait parfaitement indécis. Que s’apprêtait-il donc à dire ? Telle était la question. La Sous-Chef n'osa pas le lui demander aussi ouvertement. Il avait l'air assez perturbé comme cela. Ce devait être le coup qu'il venait de se prendre sur la tête. En tout cas, elle ne voyait pas ce que ça pouvait être d'autre. Le loup lui avait semblé parfaitement sain d'esprit lorsqu'elle l'avait rencontré la dernière fois en compagnie d'Uchiwa.

- Bah, merci d'avoir demandé. Heum, je vais finir par croire qu'en fait, j'ai été plus affecté par la collision que ce que je ne pensais...

Meneldil laissa un peu de côté son attitude rigide pour esquisser un sourire amusé. Le loup gris n'avait pas l'air de s'être fait bien mal. Cela la rassurait. Elle n'aimait pas savoir les membres de son clan mal en point. Surtout si elle devait être plus ou moins pour quelque chose dans la mauvaise santé desdits loups.
Elle regarda en direction du soleil. Il faisait chaud. Trop chaud. C'était vraiment affreux. Elle soupira. Vraiment qu'elle idée d'être venue jusqu'ici. Elle cilla, la luminosité blessait ses yeux clairs. Elle reporta donc ses prunelles sur Adagio. Elle ne savait pas ce que le loup pouvait bien penser d'elle. Elle savait que certains ne voyaient pas son ascension au rôle d'Alpha d'un bon oeil. D'autres pensaient que si. Et lui ? De quel bord était-il ? Elle n'osa pas lui poser la question. Elle devait garder ses doutes pour elle. Déjà qu'elle en avait fait part à Opium ... Elle n'allait pas se répandre en lamentations devant chaque membre du clan qu'elle croisait ! C'était indigne. Et elle ne serait pas indigne. Son sourire s'était effacé.

- Il fait bien trop chaud ici. Tu ne sais pas si un cours d'eau passe non loin ?

Elle sentait la sueur couler lentement le long de son cou. L'été n'était plus à son apogée mais tout de même. Pour elle qui vivait presque exclusivement sur le territoire hivernal la température était plus que haute. Elle se sentait fondre. Son poil épais n'était vraiment pas fait pour supporter ça. Elle se retint de s'ébrouer. Cela n'aurait servi à rien qu'à mettre le désordre dans sa fourrure qu'elle tenait toujours propre et bien mise. C'était la seule coquetterie qu'elle se permettait. Elle ne cherchait pas particulièrement à se mettre en valeur mais elle aimait sembler propre sur elle avec un poil brillant et lisse. Mais bref, passons. Elle n'en était pas à de telle considération. Avisant un bosquet d'arbustes elle se dit qu'un peu d'ombre ne serait pas de refus. Puisqu'il ne semblait pas y avoir de court d'eau à proximité il fallait bien qu'elle trouve un pis aller.

- Je me mettrai bien à l'ombre. Tu me suis ou tu préfères continuer à frire là ?

Elle sourit encore une fois. Un sourire léger. Elle aimait bien Adagio même si elle pouvait sembler aussi froide avec lui qu'avec les autres. Et, justement, elle voulait sembler un peu moins froide avec lui qu'avec les autres. Elle ne voulait pas vraiment partir seule. Elle avait décidé d'accepter l'aide de Ness et de chercher un peu de compagnie.

Spoiler:

- Je te suis... Avec grand plaisir !

La louve tricolore se détourna et parti au petit trot se mettre un peu au frais. Elle avait terriblement envie de tirer une langue de vingt kilomètres pour s'aérer mais elle devait garder un ai digne et ne pas montrer qu'elle succombait si facilement à quelques aléas climatiques. Elle se coucha tout de même sur le sol, attendant qu'Adagio vienne la rejoindre. Le loup gris ne semblait pas mécontent de sa proposition. Deux hivernaux supportant des températures caniculaires en territoire neutre, on aurait tout vu. Ils auraient mieux fait de se croiser en hiver. Mais bon, tant pis. Il fallait dire que Meneldil cherchait à se distraire ces derniers temps. Un peu de compagnie était vraiment la bienvenue même si elle ne savait pas toujours très bien comment se comporter avec la gent masculine. Ayant toujours suivi les pas de sa mère certaines choses lui étaient encore plus ou moins inconnues. Elle se laissa aller à s'étirer un peu. Elle était aujourd'hui au repos. Il n'était pas l'heure de se torturer les méninges avec un problème quelconque. Elle en avait assez à gérer tous les jours. Elle reporta son regard sur la plaine qui brûlait sous le fort soleil d'été. Après l'été vient l'automne puis enfin l'hiver … Son si bel hiver. Elle avait hâte que sa saison arrive. Elle avait envie de poursuivre l'exploration de son pouvoir mais pour cela elle avait besoin de la puissance de sa saison. Elle savait que la manipulation d'êtres de chaire et de sang était réservée à cette période de l'année. Elle n'était pas assez puissante pour le faire sinon. Elle se secoua mentalement. Elle ne devait pas divaguer. L'hiver serait assez vite là, tout du moins elle l'espérait.

- Comment est-ce que sa passe ton intégration dans le clan ? Tu n'as pas trop de mal ? Personne ne te fait de misères ?

La louve tricolore posait ses questions un peu par rhétorique. Elle aurait été avertie s'il y avait eu un problème quelconque avec le loup gris. Mais elle avait aussi envie d'entendre ce qu'elle supposait par lui. Elle faisait toujours en sorte de s'occuper au mieux des membres de sa meute. Elle leur devait à tous la même attention. Elle mettais un point d'honneur à ce qu'anciens et nouveaux venus soient logés à la même enseigne. Elle rajouta une petite phrase à ses questions précédentes :

- Si jamais tu as des problèmes tu peux toujours venir me voir. Elle fit une légère pose avant d'esquisser un petit sourire un brin espiègle. Enfin, tout dépend la nature du problème aussi.

S'il venait la voir parce qu'il n'arrivait pas à faire sa cour à une louve il pouvait toujours repartir d'où il venait. Mais elle aimait bien le loup gris. Elle espérait qu'une simple petite pique de ce genre ne lui ferait rien. Elle ne disait pas cela méchamment. Mais elle n'était pas non plus une professionnelle de l'humour, loin s'en faut.

Petit up ? :3

Spoiler:

- Je n'ai rencontré aucun problème pour l'instant ! Enfin... J'ai quand même fait quelques mauvaises rencontres, mais bon, c'est en minorité.

Meneldil avait froncé les sourcils à l'énoncé des mauvaises rencontres mais se détendit en voyant ensuite le loup sourire seul à ce qui devait lui passer par la tête. Le petit soupir d'aise qui suivit suffi à convaincre la louve que, en effet, les mauvaises rencontres devaient être très minoritaires. On ne souriait pas si on ne s'entendait avec personne, si ? Pas elle en tous les cas.
Un second sourire suivi, un sourire qui lui était adressé cette fois ci. Meneldil trouvait que le loup avait une sorte de sourire un peu tordu mais cela donnait un certain charme au loup gris, un je ne sais quoi qu'elle trouvait sympathique. Il était agréable de pouvoir sourire un peu, de laisser pour quelques temps au moins les soucis de la meute et de s'occuper un tant soit peu d'elle même. Elle ne sait pas si c'est égoïste ou non, elle sait juste qu'elle en a besoin. Qu'elle a besoin d'un peu de compagnie quoi qu'elle en dise, quoi qu'elle veuille bien montrer à ceux dont elle doit prendre soin. Quelques paroles d'Adagio lui remirent les pattes sur terre tout en lui faisant comprendre qu'elle en faisait déjà beaucoup pour les siens. Elle l'aurait presque embrassé. C'était comme s'il avait lu dans ses pensées.

- Je te remercie de ton attention. Il est plaisant de voir que tu as ton rôle de sous-chef à coeur ! Les loups hivernaux n'ont vraiment pas de quoi se plaindre !

Sourire lumineux de la Sous-Cchef en question. Un sourire réellement sincère, l'un de ceux qui n'apparaissent guère depuis la mort de sa mère. L'un de ceux qu'elle réserve pour des moments de détente tels que celui-ci. Finalement la collision avec ce loup aura été une excellente chose. Enfin, si on omettait la bosse qu'elle avait récoltée.

- Merci, ce que tu dis me touche. J'ai toujours peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas faire ce qu'on attend de moi. C'est agréable de voir qu'on remarque que je me donne pour mon clan.

Son sourire s'était fait plus doux, moins taquin et rieur. Elle était juste réellement heureuse que ses sacrifices soient visibles. Elle donnait sans compter à ces loups sur lesquels elle avait reporté cette présence et cet amour qui lui manquaient. La louve laissa un bâillement lui échapper. Elle avait encore parcouru le territoire toute la matinée en quête de quelque chose qui aurait pu clocher. Mais non, rien de rien. Elle préférait qu'il en soit ainsi d'ailleurs. Elle mit une patte sur sa gueule tout en s'excusant auprès du loup gris.

- Navrée, je crois que je dormirai bien cette nuit !

Ou pas. Cela faisait bien longtemps que son sommeil était agité, rempli des ombres du passé qui ne la laissaient pas en paix. Elle n'avait pas une seule seconde de répit, c'était cela qui l'usait tant, elle le savait. Il aurait fallu qu'elle soit en paix avec elle même pour pouvoir s'en remettre, prendre le temps de faire le tri dans sa tête. Mais elle n'avait pas le temps. Elle avait trop à faire. Et puis, quoi qu'elle en dise, elle n'avait pas envie de se confronter à son passé.

- Dis moi, d'où est-ce que tu viens précisément ? Il ne me semble pas que tu l'aies dit le jour où tu es venu demander à rejoindre nos rangs.

Meneldil espérait qu'il n'en ait effectivement pas parlé. Elle ne voulait pas passer pour une idiote qui n'écoutait pas ce que les autres pouvaient dire.

Meneldil remarqua que sa question semblait perturber Adagio. En tous cas, il s'était redressé d'un coup en entendant ses paroles. Avait-elle bien fait de poser une telle question ? Elle ne savait pas. Mais ce qui était fait était fait, elle ne pouvait pas revenir en arrière et effacer ses mots. Elle se contentait de regarder le loup gris qui regardait, quant à lui, dans on ne savait trop quelle direction de l'horizon.

- Eh bien... Je ne me rappelle pas précisément d'où, mais je sais que j'ai marché un moment avant d'arriver sur Four Seasons. Mon ancien clan était dans le nord, dans les montagnes et les profondes forêts de conifères. Un silence passa entre eux. Meneldil ne disait toujours rien, ne voulant pas interrompre le court des pensées du loup. Ce dernier poussa un soupir avant de poursuivre : - Quand je les ai quittés, je n'avais aucun regret, mais d'y repenser aujourd'hui, ça me fait bizarre... Je pense que c'est bon signe. Enfin, si tu veux en savoir plus, ça ne me dérange pas de te raconter.

Adagio avait plongé son regard dans les yeux de la Sous-Chef. Cette dernière ne savait trop que penser des mots du loup. Elle savait qu'il existait des ailleurs loin de Four Seasons. Elle s'était toujours demander à quoi cela pouvait ressembler. Mais, apparemment, ce n'était que du normal. La forêt et la montagne elle connaissait, c'était ce qui faisait partie intégrante de son territoire. Des autres aussi mais surtout du sien. Elle pencha la tête sur le côté, se laissant aller à poser une question de plus. Après tout, il lui avait dit qu'elle pouvait n'est-ce pas ? Et dans le regard du loup gris elle percevait du trouble. Le trouble de celui qui ne se comprends plus vraiment la raison de ses actions. Peut-être que parler du passé le ramènerai sur le droit chemin.

- Tu n'avais pas de la famille là bas ? Des gens qui tenaient à toi ?

Oui, la famille était quelque chose d'important pour l'hivernale. De très important même. Peut-être trop. Peut-être parce qu'elle n'en avait plus. Elle n'aurait su dire avec précision. Elle savait juste que c'était ainsi et puis voilà. Pour elle il n'y avait rien de plus important que la famille. Elle passait même un peu avant le clan bien que le destin des siens ait toujours été intimement lié à celui du clan hivernal dans son ensemble. Le silence qu'elle avait laissé planer n'avait pas duré plus de quelques secondes, un autre question lui était venue à l'esprit.

- Est-ce que tu faisais partie d'une meute comme maintenant ?

Meneldil écouta les paroles d'Adagio sans mot dire. Elle ne savait pas quoi penser de ces aveux. Elle ne voyait pas le loup gris comme un être égoïste. S'il l'avait percuté c'était bien parce qu'il chassait n'est-ce pas ? Et puis, elle l'avait déjà vu travailler dans l'intérêt du clan plus d'une fois. Elle avait du mal à faire coïncider ces deux images, celle qu'elle connaissait et celle qu'on lui décrivait. D'autant plus qu'elle n'allait pas remettre les dires de l'hivernal en question. Il savait tout de même ce qu'il était. L'inverse aurait été plus que problématique. Elle laissa le silence planer entre eux. Elle aussi pensait que si elle avait pu remonter le temps tout aurait été différent. Mais on ne pouvait changer le passé, on ne pouvait qu'améliorer le futur grâce à nos actions présentes. Elle était toujours couchée alors que le loup gris s'était rassis pour lui parler. Elle n'avait pas envie de se redresser et resta donc dans la même position, se tordant à demi le cou pour le regarder. Ce qu'elle laissa finalement tomber. Elle posa sa tête sur ses pattes, laissant son regard courir dans la plaine.

- On change tous plus ou moins avec le temps. Personnellement je ne te vois pas comme un loup égoïste ou fainéant. J'en ai des pires que toi à gérer si ça peut te rassurer. Il est heureux que nous puissions changer pour ne pas refaire encore et encore les mêmes erreurs. Tu as appris à changer pour être aimé, pour être utile, pour devenir quelqu'un de bien.

Elle se sentait d'humeur philosophe. Et puis, ce n'était pas comme si elle ne pensait pas ce qu'elle disait. Elle se souvint d'elle telle qu'elle l'avait été durant toute son enfance et son adolescence. Une louve joyeuse et curieuse, avide de découverte et n'ayant que faire des responsabilités liées au Clan même si elle se tenait au courant et que la politique l'intéressait. Elle se souvint aussi de certains regards que ses parents se lançaient lorsqu'elle semblait heureuse de voir une fleur éclore. Ils avaient eu si peur qu'elle s'en aille pour le Printemps. Et voilà qu'elle était maintenant Sous-Chef. Elle resta couchée, heureuse de cet instant de répit dans sa vie qui allait à cent à l'heure. Et puis, elle ne voulait pas qu'Adagio puisse lire quoi que ce soit dans son regard.

- On aimerait tous changer le passé sauf que nous n'avons de prise que sur le futur. Fait de l'Hiver ta famille, nous te le rendrons bien ne t'en fais pas.

Elle avait souri tout en prononçant ces paroles. Elle ne savait pas si le loup gris pouvait le voir mais, en tous cas, il lui semblait qu'il résonnait dans sa voix. Elle ne bougeait toujours pas, absolument pas décidée à partir. Elle avait envie d'en savoir plus sur ce loup qui voulait bien se dévoiler.

- Est-ce que tu avais des frères et soeurs ? Et, si oui, est-ce que vous vous entendiez bien ?

D'autres images provenant d'un passé qu'elle trouvait déjà bien lointain refaisaient surface. Une tanière glacée et quatre louveteau, deux mâles et deux femelles, deux enfants des airs et deux de la terre. Une seule qui arborait quelque signe printanier que ce soit. Elle se souvenait de leurs jeux mais aussi parfois des moqueries pour celle qui ne faisait voleter que quelques maigres flocons. De l'amour et de l'adversité. De bons et de mauvais souvenirs. La chaleur de la nostalgie et la déchirante douleur de l'abandon.

- Non, j'étais fils unique. Le fils de la guérisseuse. Je me revois avec les petits des autres femelles. Ce n'était même pas des amis... Je jouais rarement avec eux, je me suis isolé dans mon coin rapidement. Je n'éprouvais que peu d'intérêt pour leurs jeux...

Meneldil elle se souvenait bien de son enfance. Les autres louveteaux ne voulaient pas trop jouer avec eux parce que leurs mères n'oubliaient jamais de leurs rappeler qu'ils étaient particuliers. Mais elle se souvenait malgré tout qu'une fois qu'il n'y avait plus un seul adulte dans les parages ils se rendaient tous coup pour coup. Les rangs n'avaient nulle importance. Ils étaient jeunes et plein d'énergie. Mais aussi plein d'espoirs. Ils voulaient tous montrer qu'ils seraient les meilleurs, qu'ils sauraient représenter la puissance de l'Hiver. C'était le bon temps. Nombre de ces loups ne lui parlaient plus que pour lui faire différents rapport. Parfois elle aurait aimé pouvoir effacer les contraintes hiérarchiques. Un peu comme elle était en train de le faire avec Adagio en fait. Il n'était que Chasseur mais ils discutaient tous deux comme des égaux. C'était agréable. Le silence planait entre les deux loups. Meneldil entendit son compagnon du jour se recoucher à ses côtés.

- Et toi... tu... Enfin...

La voix du loup gris était hésitante. Tant et si bien que la Sous-Chef tourna la tête dans sa direction, les sourcils légèrement relevés. Que voulait-il lui demander ? Elle n'était pas certaine de répondre mais il pouvait bien lui poser une question s'il en avait envie. Mais il ne poursuivit pas, se rétractant. Faisait-elle peur à ce point ? Elle savait bien qu'elle ne faisait pas très ouverte dans sa vie de tous les jours mais bon. Elle pensait que l'hivernal avait remarqué qu'elle était moins méchante et froide que ce qu'elle voulait laisser croire.

- Vas-y, si tu as une question pose la. Je ne te garanti pas de réponse mais je te jure de ne pas te manger.

Le ton employé était léger même si, intérieurement, elle était tendue. Elle se demandait ce qu'Adagio pouvait bien vouloir savoir d'elle. Lui parlerait-il d'une rumeur quelconque courant à son sujet ? Ou peut-être pensait-il sa question trop indiscrète pour être posée. Le tout étant que Meneldil voulait savoir maintenant. Son ancienne curiosité n'était pas totalement morte, il en restait encore quelques bribes de ci de là. Et là le loup gris en avait trop dit pour s'arrêter en ci bon chemin.

- Je n'ai encore jamais mangé personne. Mais je dois avoir l'air vraiment .... je ne sais pas comment dire. Méchante ? Bizarre ? Hors d'atteinte ? Pour que tu n'oses pas même me poser une petite question toute bête.

Elle se laissa rouler sur le flanc. Cette chaleur était vraiment oppressante et la rendait un peu somnolente. Elle se battait vaillamment contre le sommeil. Enfin, vaillamment, comme si c'était un réel effort. Elle ne se sentait assez en sécurité pour dormir que lorsqu'elle se trouvait dans sa tanière. Aucun risque donc qu'elle ne sombre sous le museau du loup gris. D'autant plus que ça aurait été terriblement impoli.

- Je me demande souvent ce qu'on peut bien penser de moi ...

Ces quelques mots avaient été lâchés dans un souffle, presque malgré elle.

Pour moi, tu n'as pas l'air d'une créature hostile et étrange à qui on n'oserait pas parler.

C'était à peu près tout ce qu'elle avait retenu du long discours que venait de lui faire le loup gris. Elle ne semblait pas totalement inaccessible aux membres de son clan. Bien, très bien même, elle avait si peur que ce fut le cas à cause de la distance qu'elle imposait entre eux et elle. Mais elle avait parfois si peur que tout bascule. Que la distance devienne trop grande et qu'elle la sépare d'eux de manière irrémédiable. Mais si Adagio lui disait que ce n'était pas le cas ... Elle lui ferait confiance pour être honnête et ne pas seulement lui dire ce qu'elle voulait entendre. Elle poussa un soupir presque inaudible tandis que l'hivernal poursuivait sur sa lancée :

- Comme nous étions lancés sur la famille, la fratrie, les souvenirs... Je me suis demandé si tu avais eu des frères et sœurs de ton côté. Car à bien y réfléchir, je ne connais de ton histoire que ce que les rumeurs en disent. Un ange passa, un ange vaguement désagréable. Je veux dire... ! Enfin, quand je parle de rumeurs, ce ne sont pas des ragots ! Seulement des informations divulguées pour... éviter de faire ce genre de bavure.

L'état dans lequel se mit le loup gris permis à la louve de passer outre le mot "rumeurs". Elle détestait la rumeur. En fait, pour dire l'entière vérité, elle en avait peur. Elle avait si peur du jugement des autres et de ce qu'on pouvait dire sur elle à son insu. Elle ne pouvait pas avoir d'oreille partout. Et ceux qui lui étaient fidèles devaient bien être assez connus pour que les menaces de rébellion et autre ne parviennent pas jusqu'à eux. L'estomac de la Sous-Chef se serrait rien que d'y penser. Elle détestait ce sentiment d'impuissance. Le même qui l'avait saisie lorsqu'elle avait trouvé le corps sans vie de sa mère. Le même que lorsque Melinya était devenue vent. Le même que lorsque Mid avait disparu elle aussi. Le même qu'après le départ de Maedhros et le passation de pouvoir de son père.

- J'ai eu un frères et deux sœurs. Il y avait Melinya et ses ailes grises et bleues que j'enviais tant, Midnight la jolie louve noire aux pois blancs toujours heureuse et insouciantes et Maedhros, le seule mâle. Lui aussi pouvait voguer sur le ciel. Ils avaient tous les trois tout de l'Hiver. Je suis la seule à avoir des marques printanière.

Elle laissa passer un silence. Pas si certaine de vouloir parler plus longtemps de ça. Mais c'était encore l'un des sujets les moins glissants qu'Adagio pouvait aborder lorsqu'on lui parlait de sa famille. Sa famille ou ce qu'il en restait. Sa famille n'existait plus vraiment en fait. Il ne restait plus qu'elle. Elle est deux loups maintenant presque adultes qu'elle ne connaissait pas vraiment. Un neveu qu'elle avait rencontré une fois sans même lui dire qui elle était et une nièce qu'elle n'avait jamais vue. Et un beau frère qui jouait au fantôme. Quelle famille ...

- Autant que je m'en souvienne on s'entendait plutôt bien. Mais de toute la fratrie je suis la seule qui reste. Maedhros est parti on ne sait où depuis son adolescence, Midnaght est partie chez les hommes et est revenue mourir ici il y a quelques mois, Melinya est devenue vent il y a peu. Il n'y a plus que moi. C'est difficile d'exprimer ce qu'on ressent lorsque ça nous arrive.

Le sentiment qu'on ne devrait pas être là où on est. L'humeur de la louve s'était assombrie. Elle était maintenant nostalgique et vaguement morose. Si toute sa famille disparaissait petit à petit alors pour était-elle encore ici, encore debout après tout ce temps ? Elle ne savait pas ... Il y avait tant de choses qu'elle ignorait. Cela la terrifiait presque autant que ce qu'on pouvait dire d'elle sans qu'elle ne soit au courant.

- Est-ce que ce que je raconte correspond à ce qu'on t'a dit ou est-ce qu'on déforme la réalité ?

Elle était réellement curieuse de savoir. Et si la conversation s'axait sur un autre sujet peut-être que sa bonne humeur lui reviendrait. On ne savait jamais. Elle était en bonne compagnie après tout.

Meneldil écouta calmement les paroles de l'hivernal. Il la rassurait. Ainsi on ne parlait pas tant dans son dos qu'elle ne le craignait. Peut-être que son clan lui était assez loyal après tout. Enfin, loyal à son père. Alors qu'elle pensait à Kiba un voile passa devant ses yeux. Elle se faisait tant de soucis pour lui. Elle ne savait pas si elle parviendrait un jour à le voir de nouveau tel qu'il lui apparaissait quand Herenya était encore présente. Pour lui il n'était plus maintenant qu'un loup brisé, qui en avait trop vu. Cependant, elle l'aimait et le respectait pour le dévouement dont il faisait montre. Elle n'irait jamais le critiquer. C'était tout de même son Alpha. Et son père surtout. La louve avait un sens de la famille poussé, même si elle avait quelques reproches à faire à ses proches jamais elle ne serait capable de les trahir ou de médire durement sur eux. Ce n'était tout simplement pas son genre.
A la mention de "certains qui pourraient se montrer désobligeants" l'image d'une louve a pelage nuit et rouge lui vint immédiatement à l'esprit. Ness. La Tueuse lui avait fait comprendre de manière très claire qu'elle ne voyait pas en elle une bonne Sous-Chef et encore moins une future Alpha correcte. Elle ne serait pas prête à la suivre. Comment aurait-elle pu interpréter autrement de telles paroles ? Et l'avis d'un individu, même isolé, peu rapidement se répandre dans un clan. Des renversement à la tête d'une meute s'était fait parfois pour des raisons encore moindre. Meneldil chassa ces pensées désagréables. Elle préférait écouter les gentilles paroles de réconfort que lui offrait Adagio.

- Je vais te dire... Tu devrais réellement avoir plus confiance en toi. Peut-être que tu ne fais pas l'unanimité chez tout le monde, mais je suis certain que tu remportes la majorité. En tout cas, tu fais un travail remarquable et tu donnes beaucoup de ta personne, alors ils ne devraient pas avoir de reproches à te faire.

La louve se retourna et planta franchement se yeux dans ces de son vis à vis. Il était vraiment gentil de lui parler ainsi. Elle appréciait même si elle ne savait pas vraiment comment le lui dire. Elle était toujours un peu maladroite avec les mots. Les actes lui étaient plus coutumiers que les grands discours. Agir était tellement plus simple que de parler, bien souvent pour ne rien dire. Meneldil se contenta donc de sourire en attendant de trouver quoi dire. Comme toujours dans de telles situations, des montagnes de choses à faire lui revenaient en tête. Elle s'efforça de ne pas céder à la tentation de prendre le premier prétexte venu pour fuir. Elle ne savait pas gérer ses émotions, ce n'était pas une nouvelle. Il fallait qu'elle apprenne. Et puis, elle ne voulait surtout pas froisser le loup gris.

- C'est pas si souvent qu'on me dit des choses comme ça. Je suis contente que nous nous soyons croisés. Une petite bosse n'est vraiment rien comparée à tout ce que tu me dis.

Un silence plana tandis que la louve tricolore cherchait ce qu'elle pouvait bien rajouter. Elle n'était pas ce genre de loups qui ont la langue bien pendue et toujours un bon mot. Elle n'était qu'elle. Pauvrement elle, quoiqu'Adagio puisse en dire. En poussa un petit soupir.

- Enfin, moi je suis contente de cette rencontre, mais peut-être que je t'ai un peu ennuyé avec mes doutes, mes petits soucis et tout ça. Désolée mais tu as l'air de quelqu'un de bien et de compréhensif alors bon ...

Meneldil ne savait pas vraiment comment s'exprimer ni même comment terminer sa phrase. Alors cette dernière resta en suspend entre eux, comme si elle attendait qu'on l'achève un jour. Ce qui n'arriverait certainement pas de si tôt au vu de l'inspiration débordante de la Sous-Chef en cet instant. Elle qui voulait simplement exprimer sa gratitude s'était embarquée dans bien plus grand.

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