Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

× Mon Dieu ce que c'était grand ! Les feuilles collaient aux pattes de Mekki, et il poussait des gémissements à chaque pas de plus. Le sol jonché de vieille végétation morte était si épais qu'il s'enfonçait de plusieurs centimètres dedans dès qu'il avançait. A côté il observait le sourire d'Ita qui semblait bien s'amuser de sa situation. Il fronça le menton en la regardant avec des yeux de chien battu. Pourquoi elle se moquait et ne l'aidait pas ? Il savait qu'elle voulait l'endurcir pour lui apprendre à être très solide et fort plus tard, et ça le réjouissait, mais là ça en devenait ridicule ! Avec difficulté il approchait des choses qui l'impressionnaient ou qui l'étonnaient simplement ; après, il en demandait l'usage à sa grande soeur. Parfois, ils croisaient tous deux d'étranges pierres plates ou justement dressées, et Ita ne trouvait pas le moyen d'expliquer la présence de ces objets. L'extérieur restait bien plus intéressant que la vieille tanière d'Ypso, avec tous ses mystères, même si le petit loup adorait sauter entre les espèces de puits dispersés partout par-terre, c'était plus drôle de voir le territoire, de rencontrer du monde et du pays. Par ailleurs il trépignait d'impatience, tant il avait hâte de voir ses compagnons de Four Seasons. Il avait tellement hâte à vrais dires, qu'il ne se rendit pas compte de là où il allait, pourvu que c'était en direction de quelqu'un qui lui était étranger, avec qui il pourrait discuter pour le ou la connaître ! Et c'est ainsi que sans voir où il mettait les pattes, il trébucha sur une encoche dans la terre et se retrouva nez au sol. Mais en final il appréciait les nouvelles odeurs et renifla longuement celle de ce dernier, avant d'essayer de se redresser. Malheureusement, étant encore instable sur ses pattes de louveteau, Mekki finit par glisser, se frotter au sol avant de revenir dans la même position quelques centimètres plus loin. Il se tourna vers Ita avec l'air suppliant et tristounet que lui seul pouvait faire avec autant de crédibilité, et poussa une longue plainte aiguë pour qu'elle l'aide.

J'étais revenu après être aller porter Aki dans son nouveau chez soi et le temps avait passé. Mekki était maintenant assez grand et fort pour sortir de la tanière sans trop de risque pour sa sécurité immédiate. Si bien que je l'avais réveiller de bonne heure ce matin pour l'amener faire une première sortie en ma compagnie, il n'était pas question qu'il devienne un gros fainéant comme les estivaux dont il partageait une partie du sang. Je l'avais amener dans la forêt et il m'amusait à se plaindre à chaque pas parce que les feuilles lui collaient aux pattes. Un moment d’inattention de ma part suffit pour que me retourne pour voir Mekki étalait sur le sol comme une crêpe. Une plainte aiguë s'échappa de sa gueule et je finis par craquer.

Il était bien trop adorable pour que je refuse de l'aider à chaque fois. Je me penchais pour l'attraper par la peau du cou et le redresser sur ses pattes. Je m'assurais qu'il soit stable avant de le lâcher, je n'allais quand même pas le porter... du moins pas pour le moment. Il devait devenir endurant s'il voulait devenir un fort guerrier qui ferrait la fierté du clan automnal. Je me souvenais de mon propre entrainement loin de ces terres qui n'avait pas été de tout repos et durant lequel ma vie dépendait de chaque mouvement. Jamais je ne voulais que mon petit Mekki vive cela, jamais je ne laisserais un autre lui faire du mal.

- Arrête de te plaindre et regarde où tu met les pattes, un guerrier ne se plaint pas même sous la pire des douleurs.

Je me savais dur avec Mekki, mais je ne savais pas comment faire autrement. Je n'arrivais plus à être comme avant, celle douce et affectueuse qui ferrait assurément une bonne mère, depuis quelques temps. J’espérais bien que Mekki m'aimerait quand même malgré mes airs de grande soeur froide et sévère.

× Le petit jeu du louveteau fonctionna, comme à son habitude, et sa grande soeur au poil roux s'approcha pour le ramasser, le saisissant par le poil du cou pour le soulever du sol. Elle le reposa dès qu'elle sentit ses pattes se stabiliser, et le fit rapidement, avant que Mekki n'ait eu le temps de pousser un gémissement pour l'inciter à le tenir dans la gueule le reste du trajet. Il soupira discrètement avant de continuer à avancer en rechignant. Les feuilles collaient toujours. Ita gardait son expression froide et sévère, et le petit se sentait fatigué de sa sortie. La louve le regarda avec ce même air et Mekki fit la moue.

« - Arrête de te plaindre et regarde où tu met les pattes, un guerrier ne se plaint pas même sous la pire des douleurs. »

Mais il n'était pas encore un guerrier ! Il s'agissait d'un louveteau sans maman et sans papa, d'un louveteau qui aimait jouer entre les arbres, pas un soldat sanguinaire ! Le petit se mit à geindre juste pour embêter Ita parce qu'elle n'aimait pas qu'il se plaigne en faisant des bruitages du genre. Nananère, se dit-il. Sentant qu'elle finirait par s'agacer et le disputer, il tut ses petits geignements et s'arrêta pour s'asseoir au milieu d'une motte de terre. Il commençait à sérieusement vouloir rentrer, finalement c'était pas si bien d'être guerrier. Il refit son regard brillant à sa soeur et trépigna pour montrer qu'il voulait rentrer.

- Je m'ennuiiiiiiiiieuuuuhhh !

Ca ne se passait pas comme prévu, il voulait voir des loups, ou jouer avec des louveteaux comme les autres qu'il avait vu à l'extérieur faisaient ! Là il lui semblait marcher pour rien. Il voulait bien faire plaisir à Ita et surtout il voulait devenir un guerrier comme elle avait dit, pas un randonneur professionnel... En plus elle devenait de plus en plus méchante avec lui, c'était pas cool de faire une promenade longue avec une soeur pas gentille qui vous force à marcher dans les feuilles qui collent.

Mekki se mit à geindre, je déteste quand il fait cela. Ce bruit me rappelle d'horrible souvenir que je préfère oublier, mais bon c'est un louveteau alors je le laisse faire reste qu'il connait la limite et n'aime ce faire disputer. Il s'arrêta d'ailleurs et s'assit sur le sol en me regardant avec cet air qui me fait toujours craquer. J'ignore pourquoi, mais quand il prend cette tête je ne peux m'empêcher de fondre et d'ouvrir mon coeur à mon petit frère.

- Je m'ennuiiiiiiiiieuuuuhhh !

Je m'y attendais, je n'étais pas douée avec les louveteaux et encore moins quand il me fallait user d'imagination pour les distraire. Je fermais les yeux et pris un air songeur, je cherchais dans ma mémoire les jeux que mes frères avaient l'habitude de faire étant jeunes. Un sourire se dessina sur mes babines quand l'un de ces jeux me revint en tête. Je laissais Mekki sur sa motte de terre pour m'éloigner un peu et faire un tas de feuilles colorées. Le tas commençait à avoir une bonne taille et je m'assis tout près pour prendre le temps de décoller quelques feuilles gênantes de sous mes pattes. Je ne disais rien à Mekki, mais gardais un oeil discret sur lui en attendant sa réaction.

× Mekki se balançait maintenant d'avant en arrière et de gauche à droite. Ita s'aperçut bientôt qu'il s'ennuyait réellement. Il espéra un instant pouvoir rentrer à la tanière d'Ypso, pour qu'il se réchauffe et qu'il puisse se prélasser au fond en regardant dehors. Mais Ita ne lui dit pas qu'ils allaient rentrer. Elle alla à quelques mètres et poussait le sol avec ses pattes. Le petit soupira en se demandant s'il allait encore devoir marcher ou faire un exercice de force. Il se coucha sur le ventre et posa son museau sur ses pattes, tout en observant sa soeur amasser des tas de feuilles. Une grande colline de feuilles colorées s'étalait devant ses yeux à présent. Ita continuait pourtant et ramena encore une centaine de feuilles à son gros tas. Mekki écarquillait les yeux en voyant ce qui apparaissait devant lui, mais ne dit rien, continuant de dévisager la louve à chaque va-et-vient de ses pattes. Pendant ce temps il se mit à souffler sur des insectes s'approchant, et en automne il y en avait pas mal. Un moucheron finit par lui rentrer dans le nez, et il souffla dessus pour le chasser. La bestiole sortit, et le louveteau vit qu'Ita s'était immobilisée non loin de son... Enoooooooooorme tas de feuilles ! Elle entreprit de retirer les petits bouts accrochés à ses pattes, et ne faisait plus attention à lui. Un désir comme instinctif prit Mekki, qui se mit à vouloir sauter dedans. Il lorgna l'amas gigantesque de feuilles avec envie. Il remarqua bien vite que sa soeur ne le regardait plus du tout, et s'approcha doucement du bord de sa motte de terre. Il reluqua les belles feuilles empilées, des lumières dans les yeux. D'un bond il s'élança à l'intérieur en pédalant des pattes dans l'air.

- WAYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHH !!

Avec sa légèreté, le petit automnal resta un certain temps en l'air ; il retomba d'un seul coup dans le mou des feuilles oranges et marron. Sa pauvre masse roula directement à l'intérieur et il fit de nombreuses galipettes sur le sol penché avant de finir l'arrière-train contre un rocher, une dizaine de mètres plus bas, cette fois-là en riant. Vite il se releva et retourna sur son talus de terre, en face de la où se tenait quelques secondes avant le tas de feuilles. Il regarda avec insistance Ita tout en trépignant sur place. La balade devenait drôle maintenant !

Mekki eut la réaction à laquelle je m'attendais, d'un bond malhabile il sauta dans l'énorme tas de feuille en poussant un adorable cri de joie. Je le vis s'enfoncer dans les feuilles puis ressortir du tas en roulant sur le sol pour aller s'arrêter un peu plus bas. Je guettais son humeur compte tenu qu'il s'était arrêté les fesses sur une roche. Mekki éclata de rire et entreprit de remonter la pente pour se replacer sur sa motte de terre. J'aimais le voir comme cela, heureux et enjoué, dans mes désirs de vengeance sur son géniteur j'en oubliais souvent que mon frère n'est qu'un louveteau avide de découverte et de nouvelle rencontre. Il avait fixer son regard sur moi et trépignait d'impatience, il voulait recommencer. J'entrepris de reformer le tas de feuilles colorées, ajoutant plus de feuilles que la fois précédente. Je n'avais pas envie qu'il se blesse en s'écrasant maladroitement sur le sol dur, Ypso me gronderait surement puisqu'il faisait office de père pour Mekki.

Je me reculais un peu pour lui laisser toute la place nécessaire pour effectuer son bond. Sans le savoir Mekki s'entraînait, il devait faire preuve de précision dans son saut pour atteindre le tas et il devait bien juger la distance et la force nécessaire sinon il risquait de ne pas atteindre le tas de feuilles et d'aller s'écraser sur le sol. À voir l'enthousiasme avec lequel mon jeune frère prenait plaisir à cet exercice amusant la réflexion me vint que je devrais lui enseigner de cette manière. Je n'avais pas envie qu'il devienne un guerrier autoritaire et sans coeur à cause de moi, j'appréciais sa joie de vivre et son esprit de gamin curieux.

× Mekki vit avec enthousiasme la pile de feuilles devenir plus grande encore que la précédente. Il s'étonnait en un sens qu'Ita mette autant d'entrain à le faire jouer, elle qui restait habituellement fixée dans l'idée de faire de lui LE guerrier automnal. Mais ne vous y trompez pas, il se réjouissait largement de ce changement soudain d'opinion au propos de son éducation et de son "entrainement". Sa grande soeur rousse recula un peu sur le sol désormais dégarni de toutes ses feuilles, laissant le jeune louveteau devant le gros tas coloré et humide. Lui, posé sur sa butte de terre, regarda avec la même envie son jeu naturel, tout en se disant étrangement qu'il lui semblait être plus éloigné. Chassant cet élan de doute, il s'élança une nouvelle fois. Il atterrit en plein milieu des feuilles mortes humidifiées par la pluie automnale, s'en retrouvant mouillé à son tour. Il tomba cette fois-ci à un autre endroit, si bien qu'un caillou dépassant de la terre stoppa bien vite sa descente. Un caillou qui lui dessina une petite entaille dans le haut de l'épaule. La plaie n'était pas très grande ni profonde, aussi il lui suffit de se frotter contre de la végétation grimpante qui poussait sur un arbre pour faire cesser le saignement et calmer la petite douleur qui lui tirait la peau. Un léger mouvement de travers lui arracha un court glapissement mais il tâcha de cacher à Ita qu'il avait mal, pour d'un côté ne pas qu'elle se moque, et d'un autre côté pour qu'elle ne se mette pas dans l'idée qu'elle devrait l'empêcher de s'amuser à ça à présent. Ainsi il marcha vers elle en souriant, malgré quelques tremblements et contractions nerveuses de ses maigres muscles, et arriva devant elle. Evidemment il ne se sentait plus motivé pour jouer à se jeter dans le feuilles maintenant que son épaule le tiraillait, mais il devait sembler aller bien. Sinon Ita ne voudrait peut-être plus qu'il devienne un guerrier super fort comme elle en parlait. Et lui voulait que si, et surtout, que sa soeur ne le remplace pas par un autre louveteau. Même si ce ne serait pas possible, après tout, c'était lui le plus fort des louveteaux ! Il décida de parler un peu avec Ita pour ne pas qu'elle ne "s'inquiète" -il y avait peu de chance avec elle, certes.

-Quand est-ce qu'on ira voir d'autres loups ?

Mekki regarda avec de grands yeux la louve, impatient à l'idée de rencontrer des inconnus. C'est comme ça qu'on s'amuse le mieux, avec d'autres gens qu'on ne connait pas et avec qui on fait connaissance rapidement. Des amis. Mekki voulait des amis. Des louveteaux pour jouer et grandir avec, des adultes pour l'aider et lui apprendre d'autres choses intéressantes du monde. Vraiment, le petit loup désirait avoir des amis.

Mekki sauta dans le tas de feuilles, j'avais agrandi la distance entre son point de départ et le tas, mais le louveteau arriva pile poil au centre des feuilles colorées. Il était doué mon petit frère et je ne pus m'empêcher de sourire. Il me faisait un peu penser à Meiko et Elessar, mais il ne les connaissait pas et je préférais ça ainsi. Je n'avais pas envie de parler de notre mère, pas maintenant, plus tard quand Mekki sera grand et fort je lui parlerai de ses origines. Mekki se releva plus doucement de son saut et s'arrêta pour se frotter contre la mousse qui poussait sur un arbre, je pus voir la légère trace rougeâtre qu'il laisse sur la végétation. Il ne dit rien et je fis de même, je n'étais pas du genre à m’inquiéter pour de petites écorchures reste que c'était étrange comment je prenais soin de Mekki. Il me faisait redevenir moi.

- Quand est-ce qu'on ira voir d'autres loups ?

C'était une des questions que me posait le plus souvent Mekki, pour l'instant je l'avais gardé à l'écart préférant qu'il ne tombe pas sur n'importe qui, mais il avait grandi et malgré ses airs de louveteaux vulnérable il était déjà capable de se défendre. Je devais me résoudre à le laisser explorer les alentours seuls, mais je garderai toujours un oeil sur lui discrètement, je ne voulais pas qu'il fasse de mauvaises rencontres. Je lui souris en ébouriffant sa mèche de poil blonds que lui tombait devant les yeux.

- Tu te sens prêt à rencontre d'autres loups?

Je me redressais et le regardais de haut, je voulais qu'il réfléchisse bien à la question. J'aurai aimé qu'on me pose la question quand j'étais jeune, j'aurai répondu non sans aucun doute, mais peut-être que l'on aurait pas tout de suite vu mon manque de savoir faire en société et peut-être que j'aurai moins subit les moqueries de ma soeur.

× Telle une vieille habitude de sa part, Ita frotta la mèche blonde du louveteau jusqu'à la mettre en pétard, tout en gardant un sourire aux lèvres. Qu'elle sourit comme ça était plutôt bon signe, normalement, et Mekki s'attendit à une réponse positive. Sinon, il devrait encore jouer de la brillance de ses jolis yeux vert émeraude. Malgré le fait qu'il soit habitué à le faire dans n'importe quel cas, il se sentait mal d'obtenir des choses de sa soeur avec cette méthode d'approche.

« - Tu te sens prêt à rencontrer d'autres loups ? »

Un grand sourire se dessina sur le visage fin du petit automnal, qui sentit son poitrail se gonfler d'enthousiasme après cette question-réponse. Il hocha la tête vigoureusement, trépignant, tout en se balançant d'une patte sur l'autre devant sa soeur. Il ne sut même pas quoi répondre sur coup, il se sentait prêt depuis environ... Depuis qu'il savait parler, mais il se posa des questions sur cette question. Un soupçon d'inquiétude pour lui, peut-être ? Mais pour quelles raisons, alors ? C'était dangereux de connaître des gens ? Les sourcils de Mekki se froncèrent quelques secondes, celui-ci se posant bon nombre d'interrogations à propos de celle d'Ita. Puis après tout, pourquoi réfléchir, il devrait bien rencontrer d'autres loups un jour ou l'autre ! Autant commencer très tôt !

- Oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui ouiiiiiiiii....

Le jeune loup continua longtemps de répéter ses "oui oui oui", heureux d'avoir une chance d'aller à l'extérieur, d'avoir des amis, de connaître pleins d'autres loups, et de pouvoir faire tant d'autres choses par la même occasion... Il eut les yeux brillants une fois de plus, cependant il s'agissait exceptionnellement d'une réaction physique normale qui correspondait et reflétait bien son état d'esprit satisfait et heureux. Dans cet élan de bonheur il courut puis trottina vers sa grande soeur, pour lui faire un câlin -ou plutôt pour lui tomber entre les pattes.

Je m'attendais assez bien à la réponse de Mekki, mais il me fit tout de même sourire en bombant fièrement le torse avant de réfléchir. Sa réponse ne se fit pas attendre et elle me fit un drôle d'effet.

- Oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui oui ouiiiiiiiii....

Il continua a répéter encore un moment avant de me regarder avec ses grands yeux brillants qui me faisait chaque fois craquer. Sauf que cette fois, il n'utilisait pas son regard pour obtenir quelque chose, il était purement et simplement sincère. Mon frère s’élança pour venir me tomber dans les pattes, j'aimais bien ce genre de démonstration affective, mais pas devant les autres. J'avais ma réputation de sans-coeur à conserver coûte que coûte. Je me penchais et posais mon museau sur la tête de Mekki quelques secondes avant de le repousser doucement avec ma patte.

- Alors, c'est d'accord, tu es libre de sortir seul, mais à un condition... tu m'avertis avant de partir et tu ne fais pas de bêtises.

× La soeur du louveteau posa quelques secondes son museau sur sa tête, appuyant sa mèche dont les longs poils blonds lui tombèrent sur les yeux. Il souriait de satisfaction intérieurement tout en se demandant si Ita accepterait de le lui laisser ce privilège de sortir un peu de la tanière d'Ypso. Il se doutait d'instinct qu'elle ne lui céderait qu'une petite parcelle de droits, et que sans aucun doute il aurait interdiction de sortir du territoire et de le faire à sa guise. Mais il se débrouillerait avec ce qu'elle lui donnerait et essaierait de négocier quelques points. La louve rousse l'écarta peu après, sûrement juste pour ne pas ficher sa réputation en l'air, Mekki ne s'en vexa pas.

- Alors, c'est d'accord, tu es libre de sortir seul, mais à une condition... tu m'avertis avant de partir et tu ne fais pas de bêtises.

La première partie de la phrase prononcée, Mekki ne s'occupa plus du reste. Tout ce qu'il avait à savoir, c'était qu'il possédait désormais une liberté, ou plutôt semi-liberté, pensa-t-il en se remémorant la suite de ses propos. Evidemment qu'il ne suivrait pas ces consignes à la lettre, après tout, il n'allait pas la chercher dans tout l'automne pour lui dire qu'il allait se balader... Et faire des bêtises, c'était normal, non ? Puis quand il se trouverait des amis, il ne resterait certainement pas dans un coin pendant qu'ils joueraient parce que "sa grande soeur lui avait dit de ne pas faire de bêtises". C'était pour les bébés tout juste nés ça. Le petit automnal n'en était plus un, voyons. Il se réjouit mentalement qu'Ita n'ait formulé aucune condition concernant les destinations de ses promenades solitaires -ou bien non. Ainsi il pourrait vagabonder comme bon lui semblerait. Enfin, pas exactement vagabonder, plus se diriger un peu partout pour trouver du monde et découvrir de nouveaux lieux inconnus et différents du paysage répétitif de l'automne. Il adorait l'automne, bien sûr, mais côtoyer autre chose que son quotidien ne faisait pas de mal. Il se relogea dans les pattes de sa soeur un court moment et se hissa sur ses pattes pour lui déposer un bisou sur la joue, avant de se reculer. Le jeune automnal retourna quelques pas derrière et fit un grand sourire avant de lui tourner le dos et partir en trottinant :

- Je t'avertis que je pars en balade !

Il arbora sa petite bouille et s'éloigna à petits pas de sa soeur, qu'il remerciait mille fois de lui accorder sa semi-liberté.