Four seasons
Tu as posé les pattes sur Four Seasons !

Tu te retrouves dans un monde étrange, peuplé d'animaux désignés comme dangereux...Quel camp choisiras-tu ?
Mais ne t'inquiètes pas : ils sont civilisés et ne te mordront pas au moindre mouvement ! (encore que...)
Viens incarner TON personnage : loup ou chien pour les Survivants, et bien d’autres (félins, ours,...) pour les Insulaires et fais le vivre à travers des aventures nommées RP !

A très bientôt !
Four seasons
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Mais ne t'inquiètes pas : ils sont civilisés et ne te mordront pas au moindre mouvement ! (encore que...)
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Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !


 
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The effort to survive and the pain of it all || ft. Keridwen
Viehrs
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Ven 17 Avr 2020 - 20:34




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Depuis que les survivants Fourseasonniens s'étaient installés sur l'Archipel, la nuit était peu à peu devenue pour Viehrs synonyme de réconfort et de repos. L'ambiance nocturne du camp n'avait rien à voir avec tout ce que Viehrs avait pu cotoyer auparavant, car nombreux étaient ceux qui, sur les terres de Four Seasons, profitaient de la nuit pour s'occuper de quelques affaires secrètes. Et il en faisait partie. Hors, désormais, dès la nuit tombée, la majorité des loups rentraient au camp fissa et sans traîner dans la végétation hostile de l'île, chacun semblait soulagé de pouvoir se reposer, de pouvoir retrouver les siens lorsqu'ils étaient toujours en vie, de pouvoir panser les blessures de la journée; d'autant plus que c'était souvent le soir que les différents groupes ramenaient des trouvailles et que les loups avaient enfin l'occasion de se remplir la panse, lorsque les recherches portaient leurs fruits. Il y avait ainsi, de nuit, une agitation tout à fait appréciable, un remue-ménage rassurant, témoin de la vie qui continuait son cours malgré les épreuves.

L'albinos posait enfin les pattes dans le camp après une longue journée à parcourir le territoire de l'île hypogéenne, sans pour autant ramener quelque chose de bien concluant. A la suite d'une altercation entre deux loups d'une patrouille matinale sortant tout juste du camp, qui n'en était pas venue aux griffes et aux crocs, mais qui fut assez bruyante pour attirer l'attention du clan; Herrade avait jugé bon d'assigner Viehrs à ce groupe d'exploration et décidé de se passer de ses services pour la journée. L'albinos avait obéi avec détachement, trop affamé pour tenir rigueur à l'ancienne printanière, avec qui il avait un passif plus que houleux, d'envoyer un de ses Betas hors du camp. Après tout, il le savait, il n'était pas cantonné aux tâches "domestiques" du clan, et à la vérité, il était trop heureux d'enfin retrouver un véritable rôle actif, pour qu'on ne l'entendit jamais se plaindre à voix haute de quoi que ce soit. Toujours est-il qu'après plusieurs heures passées à explorer la forêt, la faim au ventre, sans se perdre et tout en empêchant les loups de sa patrouille de se crêper le chignon ( ou de lui crêper le chignon); et ce sans rien trouver au final qui soit véritablement bénéfique au camp, notre bon vieux Viehrs était las et d'humeur quelque peu mesquine.

Les coussinets délicats de l'albinos étaient endoloris et ses muscles commençaient à le tirailler. Il aurait adoré paraître toujours sous son meilleur jour et briller par sa perfection ( dont il ne doutait pas), cependant après autant d'heures de marche, la masse de ses cheveux commençaient à s'emmêler et de longues mèches barraient son visage, sans qu'il ne s'arrête pour les écarter. Avant de pouvoir aller s'étendre paresseusement dans un coin tranquille, et de prendre soin de sa personne, l'hermaphrodite devait faire un rapide passage dans l'endroit du château en ruine qui était devenu l'antre des guérisseurs. L'albinos savait son emplacement, mais depuis son installation il ne s'y était jamais véritablement rendu. L'endroit ne payait pas de mine, était quelque peu exigüe et ne croulait pas sous les remèdes, mais au moins, il était à l'abri des intempéries. A ce stade de leur survie, embellir leur espace de vie n'était pas vraiment à l'ordre du jour. Il tenait entre ses crocs quelques herbes communes mais bénéfiques aux guérisseurs : des fleurs de pavots, quelques morceaux d'écorces, de quoi tisser des bandages de fortune, des racines comestibles,... Rien qui aurait pu illuminer le regard des survivants.

L'antre des guérisseurs était vide, quand il y entra et Viehrs n'en était que plus reconnaissant : il échappait ainsi aux soupirs et regards déçus. Déposant ses biens sans chercher à arranger les réserves, car là n'était pas son travail, Viehrs fit rapidement volte-face pour sortir de cet endroit trop étroit à goût...Et se retrouva presque nez à nez avec celle qui devait généralement occuper ces lieux. Viehrs, les cheveux dans le visage, avait failli buter la tête la première contre la louve et dût se replier sur lui même, dans un mouvement de souplesse qui n'était pas douloureux que pour lui-même, afin d'éviter de saluer d'un coup de tête inopiné, son interlocutrice qu'il ne reconnût pas au premier regard. Il parvint à cacher sa stupeur derrière un sourire de politesse, lorsqu'il réalisa qui se tenait devant lui, à quel point la louve qu'il avait connu fouineuse et pétillante d'énergie, toujours dans les pattes des grands, avait mûri et...Ne semblait pas tant avoir envie d'être dans ses propres pattes. Il était resté silencieux longtemps, assez pour qu'on comprenne qu'il l'avait dévisagée avec une certaine curiosité, ou étonnement, bien que sans mépris pour une fois.

Toujours plié dans une espèce de position aussi gracieuse qu'illogique, et qui donnait l'impression que sa colonne vertébrale pouvait se rétracter sur elle-même; l'albinos, malgré sa fatigue, l'apostropha d'un ton assuré et sans animosité :

Si ça n'est pas Mademoiselle Keridwen ! Je ne te croise tellement plus, ces derniers temps, que je t'en aurai presque crue volatilisée !


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Sam 18 Avr 2020 - 14:55


The effort to survive, and the pain of it all

Une journée de plus franchie ; combien au total, Keridwen n'avait aucune envie de s'amuser à faire le calcul. C'était déjà trop à son sens, et chaque matin elle se demandait comment parvenir au soir sans devenir folle ! D'ailleurs, elle l'était peut-être déjà, et tout le monde la fuyait pour ne pas avoir à affronter cette folie, la laissant mariner dans son jus, parlant dans son dos... Bon, avec des idées pareilles, c'est clair qu'elle n'irait pas bien loin. La raison de son isolation, c'était avant tout son besoin à elle d'être tranquille et de ne pas piper un mot.

Tranquille, elle ne l'avait pas été de la journée ; des petites bagarres d'excités, une foulure d'explorateur, le gémissement continu des louveteaux, couplé à l'inquiétude des mères avaient eu raison de son sang-froid, et elle avait eu besoin d'une sortie en fin de journée pour respirer et verser quelques larmes de fatigue - encore. Elle ne rentra qu'une fois la nuit tombée, et surtout parce qu'elle n'avait pas envie de rester toute seule dans le noir, mais n'avait pas trop la tête à faire quoi que ce soit d'autre qu'aller s'effondrer sur sa couche.

Il lui fallait malgré tout accomplir une dernière visite à ses patients, même si elle ne pourrait rien faire de plus que les examiner et vérifier que le pire n'était pas encore trop certain. Cette idée ne l'enchantait pas, aussi avançait-elle tête basse, raidie par l'agitation qui avait gagné le château avec le retour d'une patrouille. Maussade et ramassée sur elle-même, la guérisseuse longea les murs pour gagner son antre, évitant tout contact rapproché avec les autres. Elle fonçait tellement, persuadée de ne croiser personne, qu'elle ne put retenir un petit cri de surprise lorsqu'une masse blanche surgit devant elle, juste à l'entrée de son repaire !

Pilant pour éviter une collision, Keri ne put rien voir de plus de la scène, son chignon lâche ayant échoué sur son front, entraîné par la force d'inertie. Surprise par ce nouvel obstacle capillaire, il lui fallut un moment pour retrouver ses esprits et se débarrasser de sa coiffe encombrante, embarrassée de s'imaginer en pareille situation face à l'intrus qui l'avait surprise dans son propre domaine.

Lorsqu'enfin la lumière fut de retour, Keridwen constata qu'elle n'avait personne d'autre que Viehrs en face d'elle, qui dardait sur sa personne ses yeux rouges et vaguement intrigués. La jeune louve baissa aussitôt le museau, laissant couler quelques mèches devant ses yeux. La présence de l'albinos ne lui était pas foncièrement désagréable, elle aurait pu tomber sur pire ; mais la proximité qu'elle avait pu avoir avec lui la dérangeait aujourd'hui. Elle était dérangée qu'il regarde ce qu'elle était devenue avec curiosité, et qu'il aborde ce sujet avec son ton léger habituel.

« Si ça n'est pas Mademoiselle Keridwen ! Je ne te croise tellement plus, ces derniers temps, que je t'en aurai presque crue volatilisée ! »

« Si seulement... » répondit sombrement la concernée, s'esquivant pour contourner le blanc dans sa pose incongrue.

Les paillasses des jeunes mères se trouvant plus loin dans un renfoncement, les voix ne risquaient pas de les gêner. De toute façon, la guérisseuse pouvait émettre à peine plus qu'un chuchotement triste, la gorge continuellement nouée, alors elle ne risquait pas de réveiller qui que ce soit. Keri avança jusqu'à son établi, nerveuse, et remarqua les quelques offrandes déposées là. Le bêta les avait-il ramené de sa journée à l'extérieur ? C'étaient de belles trouvailles, qui lui seraient utiles. S'affairant à les trier et les disposer en bon ordre, la soigneuse se gratta la gorge avant de reprendre.

« Merci pour ces plantes, Viehrs. »

Elle évitait soigneusement de le regarder, la pénombre de son recoin aidant à dissimuler son visage. Au souvenir de l'escapade menée sur les îles avec l'albinos et Asmodia, les larmes perlaient déjà au bout de ses cils, et elle sentait l'humidité affluer dans sa truffe. Elle se permit un petit reniflement, espérant qu'il passerait inaperçu aux oreilles du bêta ; elle n'avait pas vraiment envie de craquer ici et maintenant, de se répandre en gémissements alors que tout le monde semblait s'acclimater à ce nouveau lieu de vie qu'elle détestait. Comme si la vie pouvait reprendre normalement ! Mais comment faisaient-ils, tous..?

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Sam 25 Avr 2020 - 16:31




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L'enthousiasme et l'amusement de l'albinos furent guillotinés sans autre forme de jugement par la réponse sombre et à peine audible de la jeune Keridwen, si bien que Viehrs se trouva pendant quelques instants la gueule bée et l'expression figée dans son rôle, sans plus savoir lequel adopter. L'égocentrisme a cela de mauvais que les émotions des autres lui passent si facilement au dessus que même lorsqu'il n'a pas de raison de se préoccuper de lui-même, il ne réalisait pas pour autant les préoccupations de ceux qui l'entourent. Les paroles de sa cadette avaient été brèves, étouffées et qu'elle l'avait contourné sans plus d'attention, pour rentrer dans l'antre des guérisseurs. Le beta se redressa, droit sur ses longues pattes, offusqué par la situation. Pour remplir son rôle mais aussi parce qu'ils étaient les membres les plus neutres, voire cordiaux, à son égard, Viehrs était resté particulièrement proche des anciens automnaux et suivait plus ou moins les avancées de chacun. Cependant, ça n'était que maintenant qu'il l'avait sous les yeux et était frappé par la tristesse qui émanait de la louve, que l'albinos se rendait compte d'à quel point celle-ci avait disparue, fondue dans le paysage et cantonnée à ses tâches. Toujours un peu hébété, comme un acteur que l'on aurait sorti brusquement de son personnage, Viehrs fronça le museau pour lui-même, confus, avant de suivre Keridwen à l'intérieur de l'antre des guérisseurs.

Là, il s'assit silencieusement et pour une fois, sembla s'effacer pour laisser la louve ranger et trier mécaniquement les plantes qu'il venait de ramener. Il l'observait sans chercher à la déranger ou à la bousculer, trop occupé à jauger la situation pour en prendre le contrôle. La femelle qui se tenait devant lui était...Difficilement comparable à la Keridwen qu'il avait connu. La jeune louve débordante de volonté et d'ambition, volontaire et curieuse, loin d'avoir sa langue dans sa poche, avait totalement disparue. Elle était enterrée sous la morosité et le désespoir qui semblaient émaner physiquement de la louve comme des vagues opaques, mauvaises. Tandis qu'il suivait du regard les mouvement de la louve, la tête basse et la queue entre les pattes, il répondit machinalement, le ton sûr mais l'esprit ailleurs, rentrant dans son rôle de membre de clan :

Il n'y a pas de quoi, je ne suis guère sûre qu'elles te seront d'un grand secours, mais il paraît que c'est toujours ça de gagné.


Viehrs n'était jamais affecté ou déstabilisé par les émotions des autres, ou du moins, cela demandait des grands efforts pour qu'il se retrouve dans une situation où il n'aurait su comment agir. Ainsi, il ne se sentait pas oppressé par la nervosité ou la tristesse écrasante de Keridwen, et il ne profita pas du fait qu'elle lui tourne le dos pour s'éclipser et la laisser se morfondre en paix. La jeune louve faisait partie des rares, après qu'il eut intégré tant bien que mal le clan automnal, dont la compagnie, bien qu'elle l'avait fait râler, s'était révélée intéressante et l'avait sortie de sa lassitude et de sa méfiance. Elle ne l'avait pas chassé même aujourd'hui, alors qu'il serait probablement parti sans demander son reste, profiter de sa soirée pour s'occuper de lui-même. Entre la confusion et l'intrigue, Viehrs ne parvenait à tourner le dos à la situation. Il était simplement confus et...Déçu ? L'albinos, bien qu'il ne l'exprime pas, jugeait les émotions des siens avec un détachement intellectuel, sans les assimiler à des cases particulières, il ne faisait qu'une distinction claire entre les forts caractères qui encaissaient le poids des épreuves et ceux qui se laissaient écraser par le chagrin. Autant dire qu'il ne s'attendait pas à devoir ranger Keridwen du côté de ceux qui souhaitaient abandonner. Le reniflement discret de la louve fit tourner une de ses oreilles, attirant son attention. Lentement, l'albinos se leva et s'approcha de la louve, assez proche pour presque entrevoir son visage, mais assez loin pour ne pas ramasser un coup de croc au cas où elle déciderait de le chasser promptement.

Les rares fois où il laissait ses pensées s'exprimer sans le filtre de son charmant sourire, Viehrs se montrait d'une honnêteté tranchante, comme lorsqu'il cherchait à provoquer ses interlocuteurs. Faisant mine d'observer ses griffes plutôt que de chercher à croiser le regard déconfit de Keridwen, dont il ignorait la profondeur du chagrin, il s'enquit, de sa voix toujours maîtrisée et mélodieuse :

Diable ! Quelle mine mauvaise tu as, Keridwen, il n'y a plus rien qui va. Je crois que même Asmodia, si elle était là, se rangerait de mon côté pour une fois; ce qui n'a rien d'un bon signe !


Il avait évoqué leur amie commune non sans réaliser pour une fois, qu'il ne savait rien d'où elle se trouvait présentement, mais qu'il n'espérait en rien qu'elle ait périt dans l'Archipel. Laissant cette pensée le dépasser, il ajouta :

Voyons, quelle est l'ampleur de ton chagrin pour qu'il mérite un tel abattement ?


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Dim 26 Avr 2020 - 13:39


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« Il n'y a pas de quoi, je ne suis guère sûre qu'elles te seront d'un grand secours, mais il paraît que c'est toujours ça de gagné. »

Viehrs, par exemple, semblait assez peu atteint par les derniers événements, et Keri se demandait sincèrement comment on pouvait agir aussi naturellement alors que tout un monde et ses habitants avaient fini sous l'eau. Bien sûr, elle n'avait pas vécu la même existence ni les mêmes épreuves que l'albinos ; le détachement, en plus de faire partie de son caractère habituel, devait carrément figurer comme réflexe de survie si elle croyait toutes les péripéties mouvementées auxquelles il avait dû faire face. Mais alors quoi, il lui fallait oublier les siens, sa famille, les laisser derrière elle comme si rien ne s'était passé ? Elle en était incapable, et pourtant elle reconnaissait que ce nouveau pan de sa vie contenait toute l'aventure à laquelle elle aspirait en partant. Mais à quel prix...

Son rangement était fini, mais elle n'osait pas quitter l'établi, se décidant à rester assise devant jusqu'à être capable de faire face au visiteur - ou plus vraisemblablement jusqu'à ce qu'il se lasse et la quitte lui-même, lui laissant le champ libre pour pleurer un bon coup. Déjà, une larme solitaire roula sur sa joue, dissimulée par l'ombre qu'elle maintenait autour d'elle, lorsqu'elle entendit le bêta bouger. Elle ferma les yeux, provoquant une nouvelle éruption lacrymale, et exhalant un discret soupir. Il n'était pas étonnant que le délicat diplomate ne supportât pas cette vision pathétique, elle ne pouvait lui en tenir rigueur...

« Diable ! Quelle mine mauvaise tu as, Keridwen, il n'y a plus rien qui va. Je crois que même Asmodia, si elle était là, se rangerait de mon côté pour une fois; ce qui n'a rien d'un bon signe ! »

La concernée sursauta, et risqua un regard rapide derrière elle. Elle le croyait parti, mais pas du tout, le discret énergumène s'était assis juste derrière elle ! Surprise, Keridwen se redressa, toussotant. La mention d'Asmodia, surtout l'absence de nouvelles à propos de son amie était très douloureux pour elle, et elle fronça les sourcils pour ne pas s'abandonner à ce nouveau chagrin. Viehrs l'avait-il mentionné à dessein ? Mais dans quel but ? La blonde ne lui était pas forcément gré de remuer le couteau dans la plaie - deux couteaux même, si on considérait aussi le commentaire incisif sur son apparence - et lissa machinalement une de ses mèches entre ses pattes.

« Eh bien, j'ai d'autres choses à faire que de me peigner. »

Le timbre n'était pas beaucoup plus élevé que précédemment, mais son ton avait regagné en piquant. Piquée, elle l'était dans le peu de fierté qui lui restait, et que l'albinos savait attiser comme il respirait. Elle aurait voulu lui en tenir rigueur, ressentir un peu de colère pour la changer de son chagrin, mais voilà qu'il s'inquiétait maintenant de son état, de la raison de son abattement.

Sa voix était toujours aussi mélodieuse, presque guillerette ; mais il avait quand même posé la question, et s'il le faisait, Keri osait croire que la réponse lui importait quelque peu. Elle cessa de triturer ses cheveux et baissa le nez, reniflant à nouveau sans se préoccuper de ce qu'il pourrait en penser. De toute façon, sa mine était déjà catastrophique, alors un peu plus ou un peu moins...

« Je ne crois pas que tu puisses comprendre. »

Sa voix s'était de nouveau faite toute petite, une voix d'enfant en proie à une réelle tristesse. Elle serra ses pattes l'une contre l'autre, voûtée, oreilles rabattues et chevelure cascadant sur ses épaules. Elle avait l'impression que personne ne ressentait le deuil de leur terre ancestrale comme elle, et cette sensation accentuait encore sa solitude.

« La seule perte que j'ai connu dans ma vie, c'était celle de mon père... puis celle, plus lente, de la raison de ma mère. » Elle renifla à nouveau, puis essuya d'un lent mouvement de patte les larmes sur sa joue. « Je ne m'attendais pas à perdre tout le reste en un battement de cil. Je n'étais pas prête à ça en venant sur ce maudit archipel. »

Elle étouffa un sanglot, et se recroquevilla un peu plus dans ses cheveux, se sentant pitoyable face au resplendissant albinos, qui semblait pouvoir se sortir de toutes les situations avec panache. Comme si elle avait encore un mince contrôle sur sa crise de pleurs, elle parvint à articuler, sans pouvoir jeter un regard derrière elle sur le blanc.

« Comment tu fais pour ne pas ressentir de tristesse ?? »

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Dim 26 Avr 2020 - 18:32




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Pendant au moins un instant, Viehrs parvint à attirer l'attention de Keridwen qu'il vit se retourner vers lui, d'un air surpris que l'hermaphrodite n'ait pas fui pendant qu'elle lui tournait le dos. La réponse acerbe et agacée de la louve lui arracha un sourire amusé. Effectivement, il était sûr et certain, à en voir sa piteuse apparence, que la guérisseuse se préoccupait de bien d'autres choses que de sa chevelure. Il ne se risqua pas à laisser échapper un gloussement, loin de vouloir accentuer la colère de Keridwen, et rangea même son large sourire en un mince rictus à peine discernable. Quelque part, le courroux de sa réponse rassura l'albinos. Cela prouvait que malgré son état, elle n'était pas encore totalement perdue, elle n'avait pas encore totalement jeté l'éponge, elle n'avait pas encore abandonné toute la fierté de son être. Il y avait du bon, là-dedans, selon l'érudit, qui préférait encore la voir lui montrer les crocs, que de constater qu'elle n'était plus que l'ombre d'elle-même.

La femelle ne le rejeta pas plus, visiblement, mais il sembla qu'elle laissait plus librement exploser son chagrin, qu'avec chaque seconde qui passait, la maigre apparence de contenance qu'elle tentait de maintenir se craquelait et s'effondrait sur elle. Il l'observa se décomposer de plus en plus, pouvant désormais clairement entendre ses reniflements et discerner les larmes qui perlaient puis roulaient le long de ses joues, assombrissant son visage. L'albinos posa sur elle un regard calme et neutre, dénué de mépris, mais tout autant dénué de compassion. Viehrs était incapable d'éprouver la moindre empathie, au sens où jamais il n'aurait encouragé la louve à pleurer encore plus, et jamais se serait-il ouvert pour partager ses émotions et pleurer à ses côtés. D'ailleurs, à bien y penser, il ne se rappelait plus quand était la dernière fois qu'il avait laissé les moindres larmes perler entre ses cils immaculés. Néanmoins, il savait se taire et savait prêter une oreille attentive et patiente, lorsqu'il le souhaitait. Il n'intervint pas et laissa Keridwen se livrer sans l'interrompre, sans la couper, ne faisant que lentement cligner des yeux pour signifier qu'il écoutait. Peut-être était-ce parce qu'il était son aîné par bien des années, ou bien parce que la louve à la chevelure empêtrée s'était tant ramassée sur elle-même, qu'il fut frappée par l'air juvénile qui émanait d'elle.

L'idée que Viehrs ne puisse pas comprendre ce qu'elle traversait le faisait sourire intérieurement avec une certaine mélancolie. Il ne pouvait se permettre de comparer les épreuves qu'il avait traversée avec celle de la jeune louve, il ne comparait sa vie avec celle de personne. Il pouvait imaginer cependant, sans trop grande difficulté, qu'elle était encore jeune pour ainsi repartir de zéro et qu'il était probablement compliqué d'être ainsi propulsée dans la vie d'adulte avec un tel bagage émotionnel à porter sur son dos. Bien qu'il ne fit toujours à ce propos, aucun commentaire, et se contenta d'hocher la tête. Bavard, il l'était, mais il ne parlait pas sans avoir d'abord réfléchi à ses paroles. Du coin de l'oeil, il remarqua, alors qu'elle semblait essayer de disparaître dedans, que la louve avait si bien trituré et embêté sa chevelure, que celle-ci s'emmêlait et rebiquait par endroits. Quelque chose là dedans ne cessait de le faire tiquer, pour une raison obscure que lui-même ne comprenait pas. L'albinos laissa échapper un long soupir et se dressa sur ses pattes pour se rapprocher de la louve, profitant qu'elle lui tourna toujours le dos.

Viehrs s'assit derrière Keridwen en laissant tout son poids reposer sur ses postérieurs, et non sans les avoir promptement nettoyées auparavant, dressa ses pattes avant. Avec toute la délicatesse et la grâce qui le caractérisaient, l'albinos passa lentement ses longues griffes dorées dans la longue chevelure autrefois resplendissante de Keridwen; et il entreprit méticuleusement et sans le moindre mouvement brusque, de démêler la chevelure de sa cadette. Il n'avait pas demandé la permission mais enfin, la louve ne l'avait pas rejetée plus tôt et Viehrs était quelqu'un de naturellement social et tactile, sans pour autant mettre le moindre affect dans ses gestes. Il ne cherchait pas à lui faire mal et il ne touchait rien d'autre que sa chevelure, prudent et minutieux. Cela occupait ses pattes et peut-être était-ce sa manière, silencieuse et solennelle, d'indiquer à la femelle qu'il entendait son chagrin et qu'en un sens, il comprenait. Il n'allait jamais pas la prendre dans ses pattes ou sécher ses larmes, Viehrs n'avait pas en lui ce genre de fibre émotionnelle, mais c'était sa manière à lui de tendre la patte vers la jeune vers Keridwen. Qu'elle le rejette ou pas, elle en était libre, l'albinos ne s'en vexerait pas. Après tout, il en fallait plus pour blesser sa fierté.

Son geste lui laissa le temps de réfléchir à la question de Keridwen, qui l'avait surprise, car c'était bien là une interrogation qu'on ne lui avait jamais faite. Il s'arrêta un instant dans son entreprise, pendant un instant complètement ailleurs, le regard voilé. Un florilège de visages traversèrent son esprit qui provoqua chez Viehrs un petit éclat de rire, avant qu'il ne réponde, toujours sereinement :

J'aimerai pouvoir m'en vanter, mais je ne suis pas totalement dépourvu d'émotions. A mon sens, il est simplement plus facile de garder la tête haute que d'ouvrir son coeur.


Il pensa tour à tour à toutes les épreuves qu'il avait dû traverser depuis son enfance, et constata qu'en réalité, il avait rarement eu le droit d'être triste. Cela ne le peinait pas, ça n'était qu'une constatation froide et factuelle. Il pensa à ses filles mortes dans la catastrophe, à Seira, son amie, amante et ennemie jurée, morte, et ajouta à sa constatation qu'il ne s'était jamais arrêté pour pleurer qui que ce soit. Viehrs continua, la voix sûre et maîtrisée :

La tristesse est une émotion vulnérable, elle donne aux autres une raison de se jouer de toi, voire de t'effacer purement et pleinement du monde des vivants. Si j'avais un jour montré ma tristesse, Keridwen, tu ne peut imaginer le nombre de loups qui en auraient profité pour me briser le cou et répandre mes entrailles aux quatre vents, et combien les auraient applaudis et chanté leurs louanges.


A ces mots, il passa machinalement sa patte sur les traces estompées de ses cicatrices, jadis parfaitement visibles sur son pelage, puis de nouveau dans la chevelure de Keridwen. Cette pensée l'amusa, forcé de réaliser que malgré sa maigre force physique, personne n'était encore venu à bout de lui. Peu importe à quel point ses paroles étaient dures, le sourire charmant de Viehrs ne ternissait pas, mais son regard était empreint d'un éclat plus strict, lorsqu'il demanda, sans fioritures, délaissant de nouveau son entreprise :

Est-ce simplement mourir que tu souhaites, Keridwen ? Est-ce là l'ampleur de ton chagrin ?



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Mar 28 Avr 2020 - 14:57


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Alors que la jeune Keridwen se repliait sur elle-même, ses muscles contractés à lui faire mal, elle entendit - sentit plutôt - l'albinos se déplacer dans son dos. Elle n'osa plus esquisser un mouvement, mâchoires fermement serrées pour étouffer sa peine, attendant que ça passe. Elle sentit alors une pression légère et délicate dans ses cheveux, d'abord heurtée de quelques résistances, puis de plus en plus fluide à mesure que les nœuds libéraient les longues mèches. Abasourdie, mais surtout sincèrement réchauffée par ce geste simple d'affection, qui lui rappelait les attentions reçues dans sa prime jeunesse, Keridwen se sentie à son tour libérée de ses nœuds et laissa sa tristesse couler hors d'elle, ses épaules tressautant au plus fort de la crise. Tant pis si quelqu'un entendait ses hoquets et gémissements, c'était la première fois qu'elle ne se gênait pas pour pleurer, et également la première fois que ses larmes lui procuraient du réconfort. Dans son dos, le ballet aérien et léger de ses cheveux, habilement manipulés par Viehrs, se révélait aussi efficace qu'une caresse réconfortante.

Son laisser-aller ne fut pas bien long ; une fois les larmes taries, Keri se sentit fatiguée, mais vide de chagrin. Sa tête tambourinait de migraine et son nez coulait, certes, mais son cœur et ses pensées lui semblaient plus légers, et en ça elle était mille fois redevable au blanc d'avoir pris soin d'elle avec son élégance coutumière. Lui qui était d'ordinaire si distant avait su trouver le bon geste pour l'apaiser, et cette idée la grisait autant qu'elle la fascinait. Sans en avoir l'air, le bêta avait sa propre manière d'encourager ses pairs - certains d'entre eux, au moins. Il stoppa un instant son entreprise, et la jeune guérisseuse devina qu'il devait réfléchir à sa dernière question. Elle tendit l'oreille, curieuse de connaître son secret.

« J'aimerai pouvoir m'en vanter, mais je ne suis pas totalement dépourvu d'émotions. A mon sens, il est simplement plus facile de garder la tête haute que d'ouvrir son cœur. »

Attentive, la soigneuse cligna des yeux dans l'ombre ; de son propre point de vue, l'inverse était bien plus simple, mais jamais elle n'avait eu besoin de se détacher de ses émotions pour survivre. Elle restait contente d'être cajolée par l'albinos, comme si elle avait une position privilégiée pour lui. Peut-être n'en était-il rien, mais le fait qu'il soit déjà présent derrière elle, à répondre patiemment à ses questions, lui faisait plaisir.

« La tristesse est une émotion vulnérable, elle donne aux autres une raison de se jouer de toi, voire de t'effacer purement et pleinement du monde des vivants. Si j'avais un jour montré ma tristesse, Keridwen, tu ne peut imaginer le nombre de loups qui en auraient profité pour me briser le cou et répandre mes entrailles aux quatre vents, et combien les auraient applaudis et chanté leurs louanges. »

Les yeux fuchsias de la blonde s'écarquillèrent à cette idée, et elle ne put réprimer un frisson, qui agita son poil le long de sa colonne. Elle fut soulagée de sentir à nouveau les griffes dorées du diplomate peigner sa longue chevelure, et médita sa réponse. Elle avait une toute autre idée des émotions, et d'apprendre que certains énergumènes pouvaient être assez cruels pour les considérer comme des faiblesses, abusant ainsi de leurs prochains, la rendit un peu triste. Mais mieux valait être désabusée maintenant et plus forte à l'avenir, c'était au moins une bonne leçon à apprendre de la part du blanc.

« Est-ce simplement mourir que tu souhaites, Keridwen ? Est-ce là l'ampleur de ton chagrin ? »

Viehrs s'était à nouveau stoppé dans son ouvrage, et sa question électrisa la jeune louve. Elle se retourna vivement vers lui, les yeux brillants mais exempts de tristesse.

« Non ! Je n'ai jamais songé à une issue aussi fatale... »

Elle se remit dans sa position initiale, laissant ses mèches aux pattes fines de son congénère. La mort l'effrayait, dans son caractère imprévisible, impartial, parfois subit... Mais aussi profond qu'ait été son chagrin, elle ne s'était jamais résolue à y mettre fin de manière aussi définitive. Elle haussa les épaules et parla d'une voix plus claire, libérée des nœuds des sanglots.

« Je... subissais mon chagrin, je pense. Il me semblait sans fin, sans fond. C'était un peu égoïste peut-être, mais je... je n'avais pas non plus forcément envie d'en sortir. »

Elle repensa à ce que lui avait dit la chasseresse, qu'elle n'était pas prête à guérir... se sentait-elle davantage prête, à présent ? Il lui semblait que oui. Viehrs avait apporté avec lui une vision nouvelle de la tristesse, et elle avait l'impression que les nuages qui pesaient sur son avenir commençaient à se dilapider.

« C'est... marrant, je suppose ; je n'imagine pas la tristesse comme une émotion faible. À mon sens, c'est un sentiment fort, qui rapproche les loups entre eux, les rend plus solidaires... qui est donc nécessaire et naturel. Il ne faut juste pas d'excès dans l'un ou l'autre sens... »

Elle glissa une patte au-dessus de son épaule, prélevant une mèche lisse et débarrassée de ses impuretés, qui ondula joliment entre ses griffes. Elle aussi se sentait lavée de ses idées noires, un peu plus déterminée à faire face à la situation. Bien sûr, la situation du clan, la pénurie de nourriture et l'état des jeunes loupiots la préoccupaient toujours - elle sentait cette angoisse palpiter continuellement dans un coin de son cœur, nuit et jour. Mais elle se sentait aussi un peu plus forte, un peu mieux préparée à faire front. La louve brune serait sûrement soulagée de ce petit déclic.

« Merci Viehrs ; tu m'as apporté le meilleur des remèdes ce soir. » Avec un petit sourire d'ingénue, elle le regarda par-dessus son épaule, ses prunelles faiblement éclairées brillant d'un éclat nouveau. « L'espoir. »

Elle chuchota ce mot avec un peu de honte, mais c'était sincère ; peut-être l'albinos la trouverait très fleur bleue et niaise, mais sa venue avait chamboulé l'état d'esprit de la guérisseuse, et elle lui en était redevable. Dans un vif mouvement de cheveux, elle se détourna à nouveau, cachant son trouble d'avoir osé pareille confidence à son aîné. Mais cette fois, un sourire fin et tremblant soulevait ses babines, et sa chevelure flottait avec apaisement autour d'elle. Peut-être qu'un bain pourrait leur faire du bien, dans les jours à venir...

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Sam 2 Mai 2020 - 16:38




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Quelque part, au fond de lui, le fier et noble albinos qui aimait tant donner l'impression qu'il était inébranlable, fut touché que la jeune louve ne le rejette pas et laisse sa chevelure entre ses pattes expertes. Le mouvement régulier et minutieux de ses griffes démêlants, puis lissant et lustrant la longue chevelure de Keridwen, insufflait en lui quelque chose de nostalgique et de mélancolique. Des souvenirs resurgissaient, maintenant si lointains qu'ils n'étaient plus parfaitement clairs, de sa soeur aînée coiffant sa propre chevelure avec attention lorsqu'il n'était encore qu'un enfant. Il avait essuyé, au cours de sa vie, une quantité de haine à son égard qui avait, malgré lui, durcit son coeur et son esprit. Pourtant, au fond, Viehrs était un animal intrinsèquement social. La solitude ne lui apportait aucune satisfaction, il détestait être isolé, oublié des esprits de chacun si bien qu'il pourrait s'oublier lui-même. Peut-être était-ce parce qu'il s'estimait trop, et c'est sûrement ce que la majorité pensera de son comportement. Néanmoins, peut-être était-ce au contraire parce qu'il avait besoin de la validation et de la reconnaissance de ses pairs...Hmph, dur à croire, connaissant le fameux albinos. Peu à peu, les sanglots de Keridwen s'étaient estompés, ainsi que sa tristesse avait fini d'exploser et libérait enfin son corps et son esprit. Doucement, le bruit des larmes se tarit et fit place au silence. Bientôt on entendit plus que le léger bruit des mèches qui filaient entre ses griffes, de quelques reniflements et, au loin, de l'activité du clan qui continuait de battre son plein. Lui, qui avait été si souvent l'agent du chaos, savourait ce moment de calme privilégié, désormais si rare parmi les rangs des survivants.

La question de l'albinos sembla avoir provoqué chez Keridwen un sursaut presque électrique. D'un coup, elle tourna son visage vers lui d'un geste empreint d'une détermination nouvelle. Il redressa subitement les oreilles et écarquilla légèrement les yeux, lui-même surpris de son soudain regain d'énergie; et se remercia lui-même d'avoir lâché un instant les cheveux de la femelle, qui aurait autrement été douloureusement bloquée dans son mouvement. C'était sûrement la réponse qu'il avait voulu provoquer chez-elle mais, jusque là, il n'était pas parfaitement sûr de l'obtenir. Il sentait que son entreprise n'avait pas servie à rien pour aider l'état de la jeune guérisseuse et quelque part, cela le confortait dans ses propres idées. Son regard rubescent soutint celui de Keridwen, qui était désormais teinté d'une lueur nouvelle qui semblait dissiper le voile de tristesse qui les recouvrait jusque là. Il hocha la tête d'un geste approbatif et satisfait. Voilà qui était rassurant.

Ainsi qu'elle se retournait, Viehrs reprit ses gestes minutieux et continua de lisser la chevelure de Keridwen jusqu'à ce qu'elle n'ait même plus une mèche qui ose rebiquer. On sentait à l'assurance de ses mouvements, sans jamais aucune hésitation, qu'il était habitué à cette activité. Doucement, Viehrs se mit à nouer quelques tresses élégantes dans la chevelure de Keridwen, tout en l'écoutant parler et ouvrir son coeur. Elle se montrait honnête et franche avec l'albinos, quitte à avouer quelques défauts par la même occasion. Certains y auraient vu de l'inconscience, de se livrer ainsi à Viehrs, sans filtre ni demi-mesure; pourtant, ce dernier ne faisait qu'écouter avec attention en hochant doucement la tête. L'heure et le temps n'étaient pas aux calculs et à la manipulation et Keridwen était loin d'être une de ses cibles. Il faisait simplement là ce pour quoi il avait toujours été doué : tendre l'oreille et engager le débat. N'avait-il pas été, après tout, un excellent et éminent Conseiller ?
Si sa vision de la tristesse et celle qu'en avait Keridwen s'entrechoquaient, Viehrs ne chercha pas pour autant à la contredire. A son sens, cela ne faisait que prouver la pureté qui habitait encore le coeur de la femelle malgré les dures épreuves qu'elle venait de traverser. Il était curieux de voir ce qu'une telle personnalité deviendrait par la suite, mais ils en étaient encore bien loins.

Lorsqu'elle se retourna vers lui, faisant virevolter ses mèches désormais resplendissantes autour de son jeune visage, dévoilant un sourire encore faible mais bel et bien présent, et qu'elle le remercia avec sincérité et humilité; Viehrs sembla un instant...Troublé ? Lui qui savait réagir et rebondir à chaque nouvelle situation, se trouvait là figé par les mots de sa cadette. Il avait voulu la réconforter, certes et il était plus que satisfait de voir que ses yeux bouffis par les pleurs ne portaient plus la morosité qu'il avait pu voir au début de leur rencontre; il était tout aussi satisfait d'entendre que si la voix de la femelle tremblait, cela ne semblait plus être causé par le tressaillement des sanglots. Et pour autant... De l'espoir ? Lui ? Source d'espoir ? Voilà une sorte d'adjectif qu'il n'avait jamais vu associé à sa personne ou à son nom. Voilà d'ailleurs un thème auquel il n'avait jamais réfléchi en profondeur et sur lequel sa philosophie restait bancale. Il n'était pas pessimiste, cela au moins était véritable, et ne se décourageait jamais, il l'avait prouvé maintes fois. Mais était-il pour autant porté par l'espoir ? Cette question allait sûrement tarauder son esprit pendant un moment. Il secoua la tête pour retrouver son expression de sérénité assurée et son sourire délicat. Il répondit enfin, après s'être raclé la gorge pour retrouver le ton habituel qui était sien :

Ma foi, en voilà une conclusion intrigante, je ne me serai jamais cru un jour dans ma vie porteur d'un quelconque espoir pour autrui ! Je t'en prie, chère Keridwen, et tu m'en vois là des plus satisfait, nonobstant.


Il admira un instant son oeuvre sur les cheveux de Keridwen et s'approuva lui-même. Bien que rester perché sur ses pattes arrières ne le dérangeait pas, Viehrs apprécia de pouvoir se rasseoir correctement et s'autorisa même une position légèrement avachie, s'appuyant plus sur un antérieur que sur l'autre au lieu de se tenir assit droit et haut comme il en avait l'habitude. L'albinos ajouta, revenant un instant sur les paroles antérieures de la femelle, d'un air réfléchi :

Il n'y a pas mal à mon sens, à se laisser aller à un peu d'égoïsme lorsque notre esprit en ressent le besoin; pour autant, l'égoïsme n'a aucune utilité s'il s'exprime par l'autodestruction. Ainsi que tu l'as exprimé, Keridwen, l'excès d'émotion, peu importe laquelle, ne mènera jamais à rien, sinon à aveugler ton jugement.


Il se redressa légèrement, trop soucieux de son apparence pour rester plus qu'un instant avachi. Cependant, même s'il ne montrait, ni n'exposait aucun signe de fatigue, on pouvait légèrement remarquer que ses pattes exténuées par la journée de marche, tremblaient par moments lorsqu'il s'appuyait dessus. Sa gueule toujours fendue par son sourire radieux, le noble albinos inclina la tête vers Keridwen et lança, sans jamais hausser la voix :

Si ton chagrin s'est quelque peu tari aujourd'hui, penses-tu, car je l'espère sans honte, que nous te verrons bientôt plus souvent parmi nous ?



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Sam 2 Mai 2020 - 17:41


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Gênée par son petit accès de mièvrerie, Keridwen avait caché sa gêne en se détournant de Viehrs, ne souhaitant pas subir de front une éventuelle petite moquerie ; elle avait été sincère et ne le regrettait pas, mais de là à l'assumer entièrement devant l'élégant loup blanc, il ne fallait pas exagérer ! Son temps de réponse l'étonna quelque peu, quoi qu'elle fut distraite par le glissement d'une tresse magnifiquement ouvragée sur son épaule, qu'elle manipula avec moult précautions entre ses jeunes pattes, ravie d'être pareillement coiffée grâce au talent de Viehrs. Lorsqu'enfin l'albinos toussa pour répliquer, elle posa des yeux attentifs sur lui, curieuse de voir quel discours il avait pu concocter.

« Ma foi, en voilà une conclusion intrigante, je ne me serai jamais cru un jour dans ma vie porteur d'un quelconque espoir pour autrui ! Je t'en prie, chère Keridwen, et tu m'en vois là des plus satisfait, nonobstant. »

Le sourire de la blondinette s'accentua quelque peu, et elle rougit derrière ses longs cheveux. Elle apprenait à apprécier de nouveau les belles manières du diplomate, qui lui rappelèrent sa rencontre lointaine avec un hivernal, dans les terres neutres ; elle fut heureuse de pouvoir retrouver la joie qui l'habitait alors plutôt que de pleurer sur la disparition de cet endroit. À présent que son interlocuteur en avait fini avec sa coiffure, Keri lui fit de nouveau face, s'amusant de la lascivité de sa posture, qui ne dévalorisait pourtant en rien sa beauté charmeuse. Elle se contenta de rester assise et un peu courbée, pas tant prostrée, mais fourbue de fatigue et du poids de ses cheveux. Elle réalisa que depuis plusieurs jours, elle ne tenait que sur les nerfs, et l'accumulation des mauvaises nuit commençait à peser sur son état physique.

« Il n'y a pas mal à mon sens, à se laisser aller à un peu d'égoïsme lorsque notre esprit en ressent le besoin; pour autant, l'égoïsme n'a aucune utilité s'il s'exprime par l'autodestruction. Ainsi que tu l'as exprimé, Keridwen, l'excès d'émotion, peu importe laquelle, ne mènera jamais à rien, sinon à aveugler ton jugement. »

Telle une première de classe bien disciplinée, la concernée hocha docilement la tête, battant des paupières. Viehrs avait tout d'un orateur accompli, mais s'il persistait à lui servir des phrases trop longues ou ampoulées, elle risquait de ne pas tenir le rythme. Elle avait cependant compris l'essence du discours, et sa mine inspirée reflétait le sérieux avec lequel elle abondait aux propos du blanc. Lorsque ce dernier se redressa, adoptant de nouveau sa droiture royale, la guérisseuse l'imita par automatisme, appréciant quelque peu la tension qui détendit sa nuque en prolongeant l'étirement.

« Si ton chagrin s'est quelque peu tari aujourd'hui, penses-tu, car je l'espère sans honte, que nous te verrons bientôt plus souvent parmi nous ?  »

Un frisson parcourut le corps de la jeune louve, qui agita ses doux cils en baissant les yeux. Elle se sentait capable de rester en compagnie du blanc de longs moments, mais de là à rejoindre le reste des troupes ? Il y avait des congénères qu'elle n'avait pas spécialement envie de côtoyer, mais se dit qu'il serait peut-être plus correct de cesser de jouer les insaisissables - ne serait-ce que pour assurer un peu mieux son rôle.

« Je pense que... cela se peut. »

Avec un sourire mutin, elle releva ses prunelles fuchsias sur le bêta, la fatigue tirant ses traits.

« Mais il va me falloir quelques bonnes heures de sommeil avant ça. Et j'ai un peu de travail ici. Ah ! »

Prise d'une inspiration subite, elle se détourna et partit fourrager dans les petits casiers bricolés à côté de son établi. Depuis sa rencontre avec la chasseresse, elle s'était inspirée de son offrande pour confectionner quelques petits mets énergétiques - mais pour l'heure, à part les tester sur elle-même, elle n'avait osé les donner à personne. Elle revint auprès de Viehrs en serrant délicatement au bout d'une mèche de cheveux une petite boule de graines et fleurs, fermement pressées entre elles.

« Tiens ! Si tu as besoin d'un petit boost d'énergie avant d'aller patrouiller, ou si tu as un coup de mou, un petit creux, euh... tu peux manger ça. »

Elle confia sa préparation à l'albinos avec douceur, maîtrisant encore l'habileté de sa chevelure malgré sa fatigue. C'est d'ailleurs avec un sourire un peu usé mais serein qu'elle releva les yeux vers lui.

« Je suis contente que tu sois passé, ce soir. La prochaine fois, je... c'est moi qui viendrait te voir. Dans le château. »

Cette décision prise, elle chassa sa nervosité en s'emparant de quelques ustensiles à portée de patte, repositionnant certains, nettoyant d'autres. Ce serait là un premier bel effort de sociabilité, autant y aller par étapes ! L'occasion pour elle de commencer à se familiariser avec les nouvelles têtes, et se tenir au courant des actualités du nouveau clan auprès du bêta. Son clan.

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Lun 4 Mai 2020 - 19:06




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L'attention de la jeune louve à ses paroles plaisait à l'albinos, qui n'aimait sûrement rien de plus qu'être écoutés lorsqu'il se lançait dans ses grandes tirades philosophiques. La manière dont Keridwen mima ses mouvements le fit glousser discrètement. Pour une fois, il n'avait pas l'impression de parler dans le vent ce qui était des plus agréable.

Plus le sourire de la jeune Keridwen se dévoilait de nouveau et illuminait son minois, plus Viehrs pouvait distinguer les signes de la fatigue qui tirait ses traits. Il se demanda un moment à quel point son propre visage devait être tiraillé par la fatigue car, même si personne n'aurait jamais eu l'audace de lui faire remarquer, il se doutait que son allure de perfection se ternissait parfois, malgré tout le soin qu'il pouvait y apporter. Néanmoins, il préférait largement la voir sourire et s'animer de nouveau dans son établi. Elle n'avait pas l'air particulièrement enchanté à l'idée de sortir de son antre dissimulée pour côtoyer ses pairs, mais sa réponse n'avait rien d'un non catégorique et était, au contraire, au moins encourageante. Viehrs n'allait pas la forcer à se montrer, il était assez sage pour savoir qu'il fallait parfois faire les choses étapes par étapes et ne pas s'offusquer qu'elles prennent plus de temps qu'on ne le désire. Même si, à la vérité, il n'appliquait guère cette maxime à lui-même.

L'agitation soudaine de la louve le surprit quelque peu, comme si elle l'avait réveillé, hors de ce moment de calme et de détente. Il l'observa se lever pour aller fouiller dans son établi, à la recherche d'une chose qu'il ignorait. L'hermaphrodite inclina la tête sur le côté, l'air intrigué, mais il la laissa à ses affaires et ne la suivit pas. Il profita qu'elle lui tournait le dos pour bailler à s'en décrocher la mâchoire, même si il tenta vainement de cacher son geste avec l'une de ses pattes. Peu importe l'apparence qu'il renvoyait, son corps n'allait pas lui laisser oublier sa fatigue aussi facilement. L'hermaphrodite écarquilla doucement les yeux lorsque la louve revint à ses côtés en tenant quelque chose entre les mèches de ses cheveux qui agissaient comme d'habiles bras supplémentaires, il dissimula mal sa surprise, n'ayant encore jamais vu le pouvoir de Keridwen en action avant aujourd'hui et ignorant tout de ses capacités.

Elle déposa près de lui une petite préparation qui dégageait un très léger parfum de fleurs sucrées et de graines diverses, qui titillèrent son odorat délicat. La guérisseuse le présenta comme un remontant comestible, qui donnerait un coup de fouet à l'albinos lorsqu'il en avait besoin. Notamment, par exemple concret, quand on venait le tirer du sommeil un peu avant le lever du jour, parce qu'un veilleur un peu froussard avait halluciné d'avoir aperçu une bête dans la pénombre. Son estomac émit un très léger grondement sourd, à peine audible, qu'il ignora avec superbe, plutôt intéressé par le geste de la louve. Pour les survivants, toute nourriture prenait une importance particulière, elle était source de tensions pour tous les loups et ainsi, son don prenait une attention toute particulière. Il n'avait même pas cherché à obtenir cela de la guérisseuse, elle lui avait donné de bon coeur et avec reconnaissance et...Altruisme ? L'abinos un instant, eut une expression touchée d'une sincérité surprenante. L'instant d'après, il avait reprit son masque d'assurance habituelle, répondant avec un sourire radieux :

Je te remercie, chère Keridwen, tu n'imagines pas à quel point ta création tombe à point nommé ! Je crois ne même plus savoir quand fut la dernière fois que j'ai pu dormir jusqu'à n'avoir plus sommeil...


Il approuvait la décision de la femelle blonde, car à vrai dire, il serait bien plus à l'aise pour converser longuement avec elle sous les hauts plafonds du reste du château, que dans le coin exigüe aménagé en vitesse pour les guérisseurs, et qui rendaient le noble Viehrs légèrement claustrophobe. Il s'apprêtait à lui répondre, quand une voix à l'extérieur de l'antre des guérisseurs beugla son nom si fort que l'albinos se retourna brusquement vers l'entrée de l'antre, d'un air aussi circonspect que confus. Peu importe à qui appartenait cette voix, elle était venu briser ce moment de recueillement et de réflexion sereine auprès de la guérisseuse. Pour une fois, sans chercher à dissimuler ses émotions, l'hermaphrodite poussa un long soupir théâtral, agacé qu'on le hèle ainsi sans discretion, tout en levant et roulant les yeux vers le ciel. Lui qui ne souhaitait que trois choses : manger, se prélasser et dormir, il semblait qu'il n'aurait pas la paix de sitôt ce soir. Viehrs se redressa lentement en étirant longuement ses pattes qui tressaillirent un instant, puis se stabilisèrent. Le beta se tourna vers Keridwen en gloussant, sur le ton de la confidence :

Herrade n'en a visiblement pas fini avec moi ce soir. Mais de là à me faire appeler ainsi..


Il s'ébroua gracieusement et lissa rapidement son pelage, soucieux de sa présentation, inspectant discrètement que sa fourrure ne rebiquait pas dans un sens ou dans l'autre. Appuyant ses paroles d'un lent signe de la tête, serein et souriant, Viehrs ajouta:

Ce fut un véritable plaisir, chère Keridwen. Lorsque tu sera décidée à sortir de ton établi, je n'ai crainte que tu sauras aisément me trouver.


Il la salua courtoisement, quoiqu'avec un peu de malice, se baissa délicatement pour attraper entre ses crocs le remontant que lui avait offert la guérisseuse en veillant soigneusement à ne pas l'abîmer, puis se détourna pour sortir de l'antre des guérisseurs sans empressement, comme s'il n'avait nul part où être dans l'immédiat ( ce qui n'était absolument pas le cas mais, dans son insolence, il se plaisait à se faire désirer au moins un peu.). Malgré la fatigue et l'agacement de sa longue journée, Viehrs remarqua que son esprit était un peu moins encombré et brouillé que les jours derniers.

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Lun 4 Mai 2020 - 23:02


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La surprise de Viehrs face à l'offrande de la guérisseuse lui parut sincère, et elle ne fut que plus contente de son cadeau. Il était rare, en ces temps compliqués, d'offrir des présents comestibles ; mais il devait être encore plus rare pour l'albinos de recevoir une attention sincère et simple, dans le trouble qu'avait dû être sa vie. Glissant un sourire complice au blanc, la jeune louve hocha imperceptiblement la tête. Les nuits étaient parfois encore plus éprouvantes que les journées sur cette île... Les yeux de Keridwen s'embuèrent du bâillement qu'elle étouffa entre ses crocs, à demi cachée derrière ses cheveux ; parler de nuit et de sommeil semblait verser directement sur elle le sable de l'endormissement, et elle fut presque choquée de se sentir si éreintée, une sensation qu'elle n'avait pas éprouvée depuis ce qui lui semblait des lustres ! Seule l'avait habitée une fatigue nerveuse et tendue, de laquelle elle ne semblait jamais vraiment reposée ni trop abattue. Ce soir, la différence était palpable.

Le cri qui retentit à ce moment-là offrit un tel contraste face à la sérénité du moment que la soigneuse sursauta violemment, papillonnant en jetant des regards effarés autour d'elle. Après la surprise, une bouffée de colère réchauffa ses joues ; il y avait deux familles endormies à peine un peu plus loin, qui n'avaient certainement pas besoin de ce genre d'interventions !! Le bêta réagit avec plus de lassitude, soupirant avec superbe avant de réveiller ses muscles en un long étirement. Keri le voyait presque partir avec regret, et compatissait à ce devoir qui l’accaparait à toute heure. Qui eut cru que l'albinos lui apparaîtrait un jour comme un modèle de dévouement pour le clan ?

« Herrade n'en a visiblement pas fini avec moi ce soir. Mais de là à me faire appeler ainsi.. »

La blonde esquissa une moue un brin ennuyée ; elle n'avait jamais eu affaire avec le leader en tête-à-tête, et n'était pas du tout pressée de voir ce moment arriver. Cette louve lui semblait faite de granit, et la jeune automnale l'avait d'abord évitée par tous les moyens, effrayée de se confronter à pareil rocher.

« J'espère pour toi que ce ne sera pas long. »

Une formule certes un peu réchauffée, mais empreinte de la sincérité et de l'innocence de la donzelle, qui scruta un moment le blanc pendant qu'il remettait son impeccable pelage en place. L'effort raffiné qu'il y mettait la poussa à regarder ses propres pattes, et elle grimaça à nouveau, avisant quelques petites croûtes de terre sèche au pli du coude. Sa journée de demain commencerait sûrement par un peu de nettoyage...

« Ce fut un véritable plaisir, chère Keridwen. Lorsque tu sera décidée à sortir de ton établi, je n'ai crainte que tu sauras aisément me trouver. »

Redressant ses grands yeux vers Viehrs, la guérisseuse lui rendit son sourire, et hocha également la tête. De par son poste de coordonnateur et sa notoriété, elle n'aurait effectivement aucun mal à le localiser quand l'envie lui prendrait. Si les dieux le voulaient bien, la chose pourrait même arriver sous peu.

Keri regarda le malicieux albinos s'éloigner avec un petit serrement au cœur, se sentant de nouveau oppressée par les ombres une fois qu'il eut disparu. Mais cette fois, elle était prête à leur faire face ; secouant la tête, la jeune louve caressa la longue tresse qui pendait à ses côtés, et ne laissa pas ses pensées dériver vers des courants obscurs. Une chose à la fois, et la tête haute, comme l'élégant diplomate !

C'est donc avec plus de baume au cœur et de sérénité que la soigneuse quitta son repaire, une fois les derniers préparatifs pour la nuit accomplis. Ses rêves seraient plus doux et moins noirs, et demain la journée serait encore un peu plus lumineuse. Ainsi, peut-être qu'au fur et à mesure, l'avenir brillerait à nouveau au bout du chemin.

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