Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Ruines et souvenirs.

Les nouvelles de la journée arrivaient petit à petit, au fur et à mesure que les loups revenaient de leurs missions respectives, la pluie leur donnant une bonne raison de revenir à l’abri. Heureusement pour Fjörd, il était déjà rentré au campement avant que le torrent d’eau ne s’abatte sur son magnifique manteau, il n’avait pas envie de se présenter aux autres tel un chien mouillé et de devoir faire sa toilette avant de se montrer. Il s’occupera de sa routine capillaire un peu plus tard, une fois que la tranquillité aurait fait siège au cœur des pierres.

Le bêta parcourait l’ancien château pour trouver les missionnaires de la journée afin de faire un point sur la situation et ramener ce qu’il sait à sa supérieure Herrade. Tout le monde était calme, mais cette odeur d’humidité et de saleté faisait plisser le museau de Fjörd, qui donnerait tout pour retrouver les parois éclatantes des cavernes glaciales de l’Hiver. Traversant le hall, une voix l’interpella, appelant son nom. Après s’être retourné, il constata qu’il s’agissait de Damoclès, qui avait fait son entrée un peu plus tôt.

Ah, la pouilleuse, pointa intérieurement Fjörd, comme pour se rappeler de comment il l’a qualifiait. Et ce nom ne pouvait pas lui correspondre aussi mieux qu’à ce moment précis. Son poil trempée et terne par la pluie, tachetée de quelques traces de boues, elle avait du passer un sale quart d’heure à l’extérieur. Lorsqu’elle arriva à la hauteur du jeune loup pour constater un fait évident, il recula légèrement, comme par réflexe nerveux. Il était vrai que l’autre louve était haute, et ils partageait tout deux presque la même taille. Pour se différencier, il leva le museau en l’air et se tint droit, comme à son habitude, et la toisa de haut en bas.

Il n’avait jamais su comment la considérer. De ses souvenirs, elle avait été comme une nounou pour lui et sa fratrie, mais il savait qu’elle était bien plus que ça dans la famille. Fidèle apprentie de son père Hjalmar, elle faisait même partie intégrante de sa vie quotidienne, même si Fjörd n’avait pas eu plus l’occasion de ça de passer du temps avec elle, autre que les sorties et les moments de baby-sitting. Son comportement avec eux avaient tout eu d’une grande sœur, et il savait qu’au fond, sa paternité la considérait comme leur propre fille. Ce n’était pas parce qu’elle ne partageait pas le même sang que lui que le blanc ne la considérait pas comme le reste de sa famille, mais bien parce qu’elle ne descendait pas de la Lune, comme eux. Ses origines n’étaient pas grandioses pour Fjörd, mais qui se contentait quand même de ne pas la traiter comme une moins que rien vis à vis du souhait de ses pères. Elle devait être douée, la pouilleuse, pour avoir autant marqué les grands Librelunes. Et il broncha à cette pensée.

- Et, ça va ? Félicitations pour ton poste de bêta.

Elle était gênée face à lui, n’est-ce pas ? Ce n’était pas un sentiment anodin que provoquait le blanc chez les autres, et il en était même un peu fière. Les éloges flatta un peu son cœur fermé, et au lieu de l’ignorer comme il était initialement prévu, il décida de rester un peu avec elle. Après tout, elle aussi lui devait un rapport.

- Bien merci, et tu as aussi mes louanges et mon encouragement pour ton poste actuelle d’exploratrice. Bien sûr qu’il avait prit soin de connaître les moindres mouvements et rangs de chacun des loups, apte à prouver à Herrade qu’il peut endosser un tel rôle. Il passa un dernier regard sur sa crinière semblable à un couple d’algues échouées sur une plage crasseuse, et il ajouta en laissant un sourire amusé accompagner son regard froid. Tu n’as pas changé, Damoclès. Le bêta marqua une pause avant de finalement venir à ce qui l’intéressait le plus présentement : Dis moi que tu as quelque chose d’important à me rapporter.

Ruines et souvenirs.

Le manque de nouvelles que Damoclès rapportait n’étais pas contradictoire avec ce qu’il avait commencé à avoir l’habitude d’entendre, et cela ne le surprit pas plus. Il avait l’impression de stagner, à être bloqué sur cette île dénuée de tout intérêt. Certes, il y avait beaucoup à faire pour les loups déjà présents, mais le blanc mourrait d’envie d’aller au-delà de ce brin de terre sans vie. Il poussa un long soupir, comme une exaspération ou un soulagement, mais personne ne pourrait savoir dans quel sens le comprendre.

"- En revanche, j’ai appris que l’aile du château, qui est très abîmée, n’a pas encore été fouillée. Si tu as le temps, on pourrait y faire un tour !"

L’information dressa les oreilles du bêta, qui montra soudainement de l’attention aux paroles de la rouge. Tiens, elle commence à être utile, la pouilleuse. Elle n’avait pas tort cependant, il restait bien une bonne partie des ruines encore inexplorée, et, même si Herrade ne lui avait pas directement donné les ordres de s’y rendre, le blanc céda à penser qu’il ne serait pas plus mal d’y aller par lui-même. Et puis, prendre des initiatives ne pourrait qu’être que bénéfique pour lui.

Après une courte réflexion pesant le pour et le contre concernant cette expédition, il donna finalement son verdict à Damoclès.

- Ce n’est pas une mauvaise idée, ma foi. Nous pourrions même y aller dès maintenant. Il lui jeta à nouveau un regard sur l’entièreté de sa personne, avant de rajouter : Ne perdons pas plus de temps à conférer des futilités.

D’un coup de patte, il tourna presque sur lui même en prenant la direction de l’endroit évoqué, levant encore plus haut son museau dans le mouvement. D’un pas gracieux, sa cadence était déterminée comme s’il voulait montrer au monde l’importance de sa personne.

L’accès à la mystérieuse aile du château n’était pas le plus simple et était même difficile à remarquer. Les gravas s’amoncelaient et les reliques du la bâtisse s’entassaient, obstruant le passage maintenant étroit. Heureusement pour Fjörd, son corps adroit s’insérait parfaitement dans la fente et, posant une patte puis une autre, il se faufila avec dextérité. Damoclès ne devrait pas avoir à s’en faire non plus, vu son gabarie, mais le bêta ne prit pas peine de regarder où en était l’autre.

Des puits de lumière transperçaient les roches à moitié effondrées de ce qu’il restait de l’ancienne fierté de l’île. Ce lieu devait être gorgé d’histoires, et imaginer les événements qui ont pu découler ici prendrait une vie. Mais Fjörd ne tomba pas dans cette rêverie, et se mit à analyser ce qui était visible dans la pièce qui était encore à moitié obscure et obstruée.

Des bruits de frottement attira son attention, et son coeur se mit à se gaver d’adrénaline. Venaient-ils...du plafond ? Tendant son ouïe, Fjörd s’étendit sur toute sa grandeur afin de percevoir le moindre fait anormal. Soudainement, une ombre lui fit une frayeur et le bêta se mit tout de suite à comprendre ce qu’il se passait dans cette salle.

- Damoclès ! Un oiseau !

Une proie en cet endroit qui, jusque là, n’avait jamais révélé le moindre signe de vie autre que des végétaux ? Pendant que Fjörd tenta de coincer le petit animal, il se dit que cet endroit devait réserver bien d’autres surprises...