Que faisaient-il ici déjà ? Il n’en avait pas la moindre idée. Ses pattes s’enfonçaient profondément dans la boue, cette horreur brunâtre qui venait salir, infâme et gluante, les longs poils bleus de l’espion. Retenant une grimace, il s’enfonça un peu plus dans les Marais Arlequins, à la suite d’un pelage gris plus que familier. Il ne prenait même pas la peine d’être discret, le suivant de loin en attendant le moment où le loup qu’il suivait avec tant de patience remarquerait sa désagréable présence. Car, s’il l’avait si longtemps suivit, c’était bien que le brun avait une idée en tête : rassasier son surplus d’énergie en embêtant le plus possible le premier estival tombé sous son museau.
Une nuit blanche et un surplus d’énergie bien peu coutumier à l’estival, comme si les lourds nuages qui recouvraient les terres de la saison chaude le remplissaient d’une excitation non négligeable, l’avaient mis sur la piste de Grymes, le craquant soigneur de l’été. Le grand brun aurait préféré que les pas du guérisseur le mènent plutôt sur des terres au sable chaud et agréable mais tant pis, il prendrait son mal en patience et se vengerait tout son saoul par la suite en lui faisant profiter de sa présence.
Car une chose étaient sûre, Grymes et Valkyon étaient loin d’être les meilleurs amis du monde, l’un supportant les railleries incessantes et l’autre profitant du premier pour se divertir un peu. Aussi notre grand et magnifique Valkyon ne fut-il pas surpris du ton du guérisseur lorsque celui-ci lui adressa enfin la parole.
« Tu fais un bien piètre espion, mon cher Valkyon. »
Le brun recula d’un pas, adoptant un air faussement outré avant de répondre d’un ton indigné.
« Qu’entends-je ? Moi, un espion de basse qualité ? Mon cher Grymes, je ne te le permets point, pas même à toi. Vois-tu, c’est que ta beauté naturelle m’a tellement subjugué que je ne pouvais que t’admirer, aussi en ai-je oublié les bons comportements à adopter lorsque l’on file quelqu’un. »
Et que la boue lui collait aux pattes. Et que cet endroit gluant n’était absolument pas agréable. Et qu’il n’avait surtout pas envie de faire des efforts. Mais, ça, il se garda bien de le dire, préférant se rapprocher du gris et se pencher vers lui avec un grand sourire.
« Mais dis-moi donc mon cher Gryms, que faisons-nous donc aujourd’hui ? Quelle tâche indispensable à la survie du clan puis-je t’aider à accomplir ? »