Un pas. Puis un autre. En réalité, peut-être devrai-je employer le mot bond. Ou saut de cabris. Bon nombre de termes auraient pu qualifier la manière dont je me mouvais. Tel un enfant, je sautillais, essayant de progresser en laissant quatre empreintes identiques à chacune de mes avancées. C'était puérile, c'était innocent. Mais j'avais besoin d'un peu de douceur pour oublier la tension des derniers jours. Mon esprit était encombré, mon mental souffrait de mon empathie, et mon corps avait besoin de se défouler. Alors j'étais parti. Je m'étais éloigné des miens, tentant de trouver un lieu où je pourrai faire le vide et apaiser mes sentiments.
La neige était magique. A la fois d'un blanc immaculé et pleine de présences invisibles qui, de la même manière que moi, sillonnaient leur passage de traces discrètes. Le temps s'éclaircissait, on voyait les prémices d'une accalmie dans les tempêtes de neige pointer au loin. Enfin la neige qui ne nous affectait que très peu, nous les hivernaux, était loin de me déplaire et sa présence continue participait à mon sentiment d'appartenance à ces terres. Notre poil dru et notre résistance au froid nous permettait d'apprécier ce climat peu propice aux intrusions des autres clans. Une barrière naturelle, nous permettant de prospérer dans une certaine sérénité. Relative certes, mais toujours plus appréciable que si le climat poussait les autres canidés à venir empiéter par chez nous. Je lâchais un soupir de contentement, pensant à ce moment prospère qu'il fallait apprécier.
Puis un souffle, le murmure du vent sur ma fourrure. Je levais la bout de ma truffe et observais aux alentours. Rien de plus que le manteau neigeux habituel. Je repris ma route, laissant vagabonder idées et pensées dans un flux incontrôlé. Sans m'en rendre véritablement compte, mes pas me menèrent au désert gelé. C'était un lieu paisible, où le silence était maître. Cependant si l'on y regardait de plus près, ce n'était absolument pas un endroit très convivial. Ce calme plat était révélateur de l'absence de vie qui y régnait. Il ne faisait pas bon de venir gambader par ici si l'on n'était pas un loup assez robuste ou que l'on ne connaissait pas bien la typologie du lieu.
Et pourtant au loin, je pus distinguer une forme, une allure de canidé. Comme quoi je n'étais pas le seul à venir me réconcilier avec mère Nature dans les parages. Restait à savoir qui était ce nouveau venu, et ce qu'il venait faire par ici. Et pour cela, le meilleur moyen était d'aller directement à sa rencontre. Mon corps obéit au sous entendu et je me mis à me mouver en trottinant vers la forme floue et indistincte que je voyais se dessiner au loin.
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