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Automne et Hiver ne riment pas

Rares étaient les fois où Daphné était en plein accord avec sa conscience, mais pour le coup, elle n'aurait pas mieux dit. L'été s'installait sur les terres, mais la chaleur était elle déjà bien présente. La journée avait été particulièrement belle et chaude, et le soleil avait brillé continuellement pendant les diverses rondes de la Sentinelle. Aussi, à présent, elle n'aspirait plus qu'à rentrer et se mettre au frais, voire se baigner dans l'étang... Elle était tellement fatiguée qu'elle s'était transformée après avoir éternué, c'est dire l'état misérable dans lequel elle se trouvait ! Si elle n'était même plus capable de se contrôler, c'est qu'il fallait vraiment qu'elle se repose...


La belle n'y croyait pas trop, ces derniers temps, la plupart de ses patrouilles avaient la fâcheuse tendance d'être perturbées par divers intrus, voire des compatriotes. Celle-ci n'avait aucune raison d'échapper à la règle, rien ne lui était épargné d'ordinaire, alors ce coup-ci... Une couleur inhabituelle dans la périphérie de son champ de vision fit stopper Daphné. Du bleu foncé !

Et hop ! En un instant, la voilà qui se décomposait dans un bruissement de feuilles, dérivant avec légèreté en direction de l'intrus sous l'impulsion du mouvement de surprise. Elle n'avait pourtant fait que remarquer ce qui devait être un loup bleu, et penser dans le même temps qu'il devait être un intrus, puisque le bleu n'entrait pas dans les coloris des loups automnaux - enfin pas avec autant de bleu, et aussi pétard que celui-là... Il est vrai qu'elle était quand même assez mal placée pour juger de ça.

Rapidement, la Sentinelle se recomposa sous sa forme lupine, décidée à aller voir celui qui était sûrement un intrus... Pour se trouver au final nez-à-nez avec lui ! Sous la surprise, elle ouvrit de grands yeux tandis qu'il tombait à la renverse en poussant un cri. La poussée d'adrénaline activa une fois de plus le pouvoir de la belle, qui fut encore une fois réduite à un tas de feuille, et dut se concentrer pour parvenir à retrouver sa forme d'origine. Comme c'était agaçant, ça n'allait pas cesser d'empirer jusqu'à ce qu'elle soit reposée !! Irritée par ce manque de contrôle et l'intrusion d'un loup punk sur ses terres, Daphné le toisa de son regard jaune acéré, lui jetant quelques agréables paroles.

- Qui es-tu ?? D'où viens-tu, que fais-tu ici ?? Tu n'es pas automnal, tu...

Elle prit le temps de s'assurer de son appartenance avant de continuer, et pencha soudainement la tête vers lui pour humer ses effluves. Elle se redressa ensuite tout aussi rapidement, raide et dissimulant à peine une grimace dédaigneuse. Encore un de ces squatteurs du froid... Avait-il vraiment le droit d'aller où bon leur semblait ??

- Un hivernal... Que faisais-tu ici, seul ?

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Automne et Hiver ne rimeront jamais !

Les sourcils froncés, la Sentinelle guettait la réaction de l'hivernal. A l'expression béate qu'il afficha pour toute réponse, la langue pendante, elle commença à croire qu'il était stupide, voir fou. Est-ce que tous les hivernaux avaient un problème mental ?? Le souvenir de la crise de somnambulisme d'Ezéckielle lui revint en mémoire, et ses mâchoires se contractèrent. Non, finalement c'est plutôt à Kaïne que lui faisait penser ce loup, avec son air de pure idiotie plaqué sur le visage. Kaïne, en moins imposant. Qu'est-ce qui pouvait bien le faire sourire comme ça ??

Daphné aurait souhaité lui intimer d'arrêter sur-le-champ de se jouer d'elle, mais voilà qu'il se mettait à sauter et cabrioler autour d'elle, et elle devait se tourner et retourner pour ne pas le perdre des yeux, poussant quelques grognements et l'invectivant régulièrement pour qu'il s'arrête. Voilà même qu'il s'approchait d'elle et osait se glisser dans ses cheveux !! Ulcérée, la belle rejeta la tête en arrière dans un ballet de longues boucles bleues, les repoussant dans son dos - hors de portée de l'hivernal.

- Veux-tu bien rester tranquille !!


Quel âge pouvait avoir ce loup ?? Il n'était pas bien grand et son comportement tendait à le considérer comme un louveteau, mais il n'avait pourtant pas l'air d'en être un... En tout cas, il continuait à courir et se vautrer dans les feuilles mortes, dans un grand remue-ménage qui insupportait lourdement la Sentinelle.

- Toi t'es qui hein ?? Viende jouer avec moi !!

Révoltée par la familiarité avec laquelle il s'adressait à elle, Daphné ne prit pas garde à ses mouvements, et ne réalisa qu'il s'approchait qu'une fois qu'il eut sauté... et attrapé son oreille, la tirant vers lui !!

- Mais ! AÏE !!

Dans un réflexe bienheureux, elle activa son pouvoir de métamorphose et put dégager les feuilles de la gueule de l'hivernal avant qu'il n'en avale une - elle l'aurait éventré avec joie pour la récupérer s'il l'avait fait. Se redressant vivement avec son oreille recomposée, elle s'écarta de lui d'un bond souple et gracieux, se mettant hors de sa portée. Ce loup était décidément barjo !!

- Je ne suis pas là pour jouer !! Ne t'approche pas !

Qu'il tente seulement, et elle lui collerait une droite dont il se souviendrait sûrement pour le restant de ses jours. Les oreilles plaquées en arrière - la gauche étant encore un peu douloureuse - elle dénuda à demi ses crocs, jetant un regard lourd de mépris sur le loup bleu électrique.

- Pour qui tu te prends, misérable hivernal !! Tu penses avoir tous les droits ici ??

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Automne et Hiver sont-ils si différents..?

Ô surprise, alors qu'elle était persuadée que cette espèce de nabot bleu allait encore lui en faire baver jusqu'à la nuit tombée, voilà qu'il s'asseyait gentiment et calmement en face d'elle... Qu'est-ce qu'il mijotait, quel mauvais coup allait-il lui préparer ?? Avec un frisson, Daphné se remémora l'hivernal lui sautant dessus et attrapant son oreille, et elle en eut une boule au ventre. Ce contact si brusque et douloureux, elle ne l'avait certainement pas apprécié...

En tendant l'oreille, la Sentinelle se rendit compte que son vis-à-vis couinait... Mais tout doucement, si bien qu'en lui criant à nouveau dessus, elle aurait très bien pu ne rien entendre. A quoi jouait cet hivernal, il voulait donc l'amadouer, se faire prendre en pitié ?? Avec son expression et sa position, la louve aux cheveux bleus se demanda à nouveau quel âge il pouvait bien avoir, et s'il souffrait d'une déficience mentale. Qu'est-ce qu'elle allait bien pouvoir faire de lui ?!

Alors qu'elle se redressait, délaissant son masque hostile pour une expression austère et agacée, une brise vint se glisser dans les cheveux de l'automnale, et elle jeta un coup d’œil vers le ciel. La nuit approchait, déjà... Elle n'avait perdu que trop de temps avec ce mioche insupportable, qui en plus de ça couinait de plus en plus fort, à tel point que sa tête commençait à l'élancer. Avec un grognement, elle allait lui sommer de se taire, mais il sembla prendre brusquement peur et lança une demande plaintive dans sa direction.

- Tu...Tu veux bien amie avec moi ???

Daphné en fut remuée. Cet hivernal la faisait tourner en bourrique et retardait sa patrouille, mais le ton qu'il avait utilisé, et cette expression qu'il affichait... Se jouait-il encore d'elle ? Pendant un instant, elle l'avait vraiment vu effrayé, et se demandait pourquoi. S'il avait peur du noir, c'est que c'était vraiment un louveteau... En tout cas le voilà qui semblait au bord du désespoir, ou de la panique, elle ne savait pas trop... et il rejetait tous ses espoirs sur elle.

Elle, la Sentinelle asociale de l'Automne ? Que pourrait-elle bien lui apporter ? Elle n'avait aucun instinct maternel, bien que le bleu évoqua un écho de pitié en elle. De là à se le coltiner pour la nuit... Aurait-elle la patience ? D'autant que si elle le raccompagnait au clan - avec l'alliance Automne-Hiver, peut-être ne se feraient-ils pas jeter - ils risquaient en tout cas de se faire moquer. Et s'il y avait une chose qu'elle ne voulait pas, c'est qu'on trouve encore une raison de se moquer d'elle. Dale sûrement ne s'en priverait pas.


Argh, Irina qui se mettait à jouer les sentimentales... Elle n'avait plus trop le choix. De toute façon, le protocole indiquait qu'elle ne pouvait pas laisser l'hivernal seul, et elle devait finir sa ronde... Elle verrait bien ce qu'elle en ferait par la suite. Secouant sa crinière bleue, elle afficha un air revêche à l'égard du bleu, lui adressant la parole sur un ton ferme et pas vraiment aimable. Manquerait plus qu'il s'enflamme et recommencer à sauter partout !

- Bon, écoute-moi bien, l'hivernal. Tu vas me suivre et te tenir à carreau, sinon je t'abandonne tout seul dans le noir.

De ce qu'elle pouvait interpréter, c'était l'idée de rester seul dans cet endroit inconnu qui lui faisait peur... C'était peut-être un peu sadique, mais elle préféra en rajouter une couche, histoire d'être sûre qu'il ne l'embêterait pas pendant le reste de sa ronde.

- En plus il y a des ours sauvages qui rôdent par ici la nuit, ils pourraient venir te dévorer... Elle lui fit les gros yeux, puis se détourna. Aller, suis-moi, et en silence.

Ce n'était pas vraiment gentil de sa part, comme le lui fit remarquer Irina tandis qu'elle se remettait en route, mais elle s'en moquait bien. Elle n'avait pas pour vocation d'être nourrice d'hivernal, alors celui-ci avait intérêt à être sage ou elle le mangerait elle-même !

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Automne & Hiver

Voilà un moment que Daphné n'avait pas fini une ronde aussi tardivement... La nuit était déjà sur eux, et bientôt la lune se mit à illuminer le ciel, accompagnée de son habituelle cour d'étoiles scintillantes.  La belle laissa échapper un soupir. Il lui tardait de regagner ses pénates et de se reposer... Mais avant ça, elle devait trouver quoi faire de l'hivernal, et pour l'instant elle n'en avait aucune idée. Peut-être pourrait-elle se contenter de le raccompagner au camp des hivernaux, installés en Automne. C'était encore la solution la plus simple.

Elle pouvait entendre sans peine l'hivernal la suivre, et imaginait facilement son air réjoui, avec cette langue qui pendait sur le côté. La question de son âge demeurait un mystère pour la belle, aussi avait-elle décidé d'arrêter d'y réfléchir. S'il se comportait en gamin, elle le traiterait en gamin, voilà tout. Il n'était pas particulièrement discret en marchant, mais au moins avait-il enfin fermé sa ...

- Ton prénom c'est quoi ? Moi c'est LECTOR !

Arf, c'était trop beau pour être vrai. La Sentinelle soupira tandis que le bleu se portait à sa hauteur, se démenant pour rivaliser avec son allure. Si elle était vraiment mesquine, elle forcerait le pas, rien que pour la jouissance de le voir galoper sur ses petites pattes. Mais là, elle était trop fatiguée...

- Quel clan t'es toi ?

Il embrayait sans se laisser abattre par le mutisme de la belle, et de peur qu'il ne lui pose encore une question, elle se redressa et lui jeta un coup d'oeil. Autant lui répondre maintenant, elle serait au moins débarrassée de ça.

- Daphné, et je suis automnale. Si tu n'avais pas remarqué, tu te trouves dans la Forêt Orientale de l'Automne, les Champs Orangés plus précisément.

Pourquoi se fatiguait-elle à lui dire tout ça ? La Sentinelle était persuadée qu'il n'intégrerait pas la moitié des informations qu'elle venait de lui donner. En plus elle lui avait demandé de la boucler... Poursuivant sa route en regardant droit devant elle, Daphné fit un mouvement de tête - et de buste - pour envoyer la plupart de ses cheveux sur son dos. L'hivernal trottant à côté d'elle, elle n'avait aucune idée qu'il vienne à nouveau se glisser dedans.

- Silence maintenant, je vais te ramener au camp des hivernaux.

Et c'était pas la porte à côté, donc s'il pouvait lui faire le plaisir de la mettre en veilleuse un moment, elle aurait peut-être mois mal à la tête, et le voyage se déroulerait pacifiquement...

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Automne & Hiver

Le silence. Le calme. La tranquillité. Ce n'était pas trop demander, quand-même, n'est-ce pas ? Elle en demandait trop ? C'était SI difficile que ça à réaliser ??

Il fallait croire. Pourtant, une fois de plus, il y eut quelques secondes bénies après que Daphné ait intimé à l'hivernal de la boucler, une pure jouissance auditive au cours de laquelle justement elle n'entendit RIEN. Rien de plus que les bruits habituels de la nuit, qui lui firent miroiter l'espoir de pouvoir se concentrer enfin, et peut-être même finir la ronde sans une migraine atroce. Mais non, il fallait que LECTOR vienne tout ruiner avec sa petite voix criarde et ses manières tout sauf discrètes. D'ailleurs, discrète, sa question ne l'était pas vraiment non plus dans le sens figuré ; qu'allait-il s'imaginer, qu'elle allait lui révéler son pouvoir comme ça, au détour de la conversation ? NON. Ni à lui, ni à personne, ça ne concernait qu'elle. Grinçant des dents, elle ignora donc la demande, tâchant même de faire abstraction de la créature bleue qui n'avait de cesse de gigoter à côté d'elle. Comme c'était agaçant, elle allait bientôt se retrouver avec les nerfs en pelote... La sentinelle en profita pour accélérer le pas, histoire d'échapper un peu à l'agitation débordante de l'hivernal - et ses trop nombreuses questions.

D'ailleurs, il en posait beaucoup, de questions, il se montrait bien curieux... trop, à son goût. Et si au final, il était un espion ?? Un espion estival par exemple, dissimulé en hivernal - c'était tellement tordu et improbable que ça pouvait passer, en vrai - et qui soit là en quête d'informations confidentielles ! Et elle le menait en plein cœur du territoire ?? Devait-elle l'abandonner là ? Était-il un expert de la comédie..? S'il se jouait d'elle depuis le début et la faisait tourner en bourrique exprès, la belle se chargerait en personne de son cas, et lui ferait payer chaque atteinte à sa dignité et sa patience très cher...

Mais pas de jugement hâtif, elle devait s'assurer de ce qu'elle avançait avant d'entreprendre quoi que ce soit. Tout en poursuivant sa route, elle glissa un regard en coin, observant discrètement le nain dans l'ombre de son abondante chevelure. Il avait ses grands yeux ébahis dardés sur elle, et elle lui trouva un air parfaitement stupide. Soit c'était un acteur remarquable, soit...

L'hivernal venait de s'étaler de tout son long, déséquilibré par une racine. Blasée, Daphné s'arrêta en poussant un soupir de désespoir. Au moins, elle avait la confirmation qu'il n'était ni un espion, ni une menace. Par contre, un fameux boulet...

- JE ME SUIS FAIS MAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAL !

Et un boulet bruyant, avec ça, elle avait tout gagné. Cette fois, sa patience était mise à trop rude épreuve. Elle voulait bien se montrer tolérante et essayer d'aider, mais elle n'était pas non plus un exemple de charité ou de générosité. Cet espèce d'inutilité de la nature était plus que désespérant, à changer d'humeur en un battement de cils, tomber tout seul, geindre, hurler et... Eh mais !!

Ce foutu nain bleu était décidément beaucoup trop tactile et familier, voilà qu'il se permettait de venir chouiner contre elle ! Contre son propre flanc, ses pattes gesticulantes posées sur elle !! Daphné nourrissait une sainte horreur à l'endroit des enfants, et l'hivernal y ressemblait trop pour qu'elle tolère une fois de plus ses caprices. D'ailleurs, elle ne tolérait aucun contact, de qui que ce soit, et encore moins de sa part ! Elle n'était ni sa mère, ni sa nourrice bon sang !! Ignorant les sanglots de Lector, elle le repoussa avec colère et fit un pas en arrière, ses yeux jaunes brillants de fureur. Un grondement menaçant s'échappa de sa gorge, et ses crocs se dévoilèrent à nouveau à la lumière de la lune, dangereux poignards brillants.

- En voilà ASSEZ !! Je n'en peux plus de tes caprices, tu m'entends ??

Elle avait beau ne pas être sa mère, l'automnale se sentait tout comme en lui administrant ce savon. Et puis zut à la fin, pourquoi avait-elle pris cet idiot avec elle ?? Elle aurait mieux fait d'ignorer ses gémissements et le laisser planté là-bas, ça lui aurait servi de leçon.

- Il serait temps que tu grandisses et que tu apprennes à te débrouiller seul !! Chouiner pour un oui ou pour un non... c'est proprement PITOYABLE !!

La sentinelle s'était mise à hurler à son tour, évacuant sa rage, et elle mit du temps à entendre la voix d'Irina qui l'invitait diplomatiquement à se calmer. Tous les loups des environs avaient dû profiter de la joyeuse bande-sonore de cette mascarade, et à cette idée, le ventre de la belle se contracta, à un tel point qu'elle crut qu'elle allait rendre son dernier repas. La peur de se faire remarquer, avec ses nerfs à vif, était plus forte que jamais, et Daphné réalisa qu'elle était terrifiée. Sa colère venait de s'évanouir, remplacée comme en un coup de vent par la crainte. L'hivernal ne devait pas assister à ce changement, à cette expression d'horreur qui devait à présent se peindre sur son visage. D'un mouvement vif, elle lui tourna le dos, droite et la tête baissée, ses cheveux virevoltant autour de son visage avant de venir le dissimuler. Il lui fallut un peu de temps pour redevenir maîtresse d'elle-même, maîtriser le tremblement de ses pattes. Quelques battements de cœur, et elle put articuler de nouveau quelques mots, d'une voix blanche.

- Assez avec les idioties et les retardements. Maintenant tu avances sagement et sans bruit, sinon tu feras le reste du chemin tout seul. Dernier avertissement.

Et qu'il ne s'inquiète pas : le moindre faux pas, et cette fois elle n'aurait aucun mal à mettre sa menace à exécution. Au contraire, il deviendrait une excuse pour qu'elle prenne la fuite et s'en aille trouver un coin tranquille pour pleurer et décharger son trop-plein d'émotions. Comme un automate, la sentinelle reprit son chemin, sa démarche raidie par le passage successif de la haine et de la peur. Pourvu qu'ils arrivent bientôt, elle se sentait sur le point de craquer...

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Automne & Hiver

Le calme qui suivit leur méprisable scène de ménage fut bénéfique à Daphné. Avançant rapidement, tête basse, elle espérait presque semer son désagréable invité et se retrouver enfin seule. Mais quelque part au fond d'elle-même, Irina et son sens du devoir coupaient court à toute tentative de fuite. Elle affrontait donc la situation emmurée dans un silence lourd, se hâtant seulement de larguer son colis à l'endroit convenu. Et après ça, hasta luego. Voire adiós...

Elle fut reconnaissante au nain bleu de retenir sa langue pendant ces quelques instants. A force d'inspirer puis expirer lentement, elle parvint à retrouver un semblant de calme - bien que la colère soit encore bien présente en elle, de même que la peur. Mais au moins elle reprenait le contrôle d'elle-même, et éprouva pour la peine une pointe de regret pour son emportement. Ce comportement était loin d'être professionnel, elle n'aurait pas dû réagir avec autant d'ampleur... Même s'il le méritait largement, et qu'au final ç'avait été assez efficace pour le brider. Momentanément, du moins.

- Quand qu'on arrive ?

Daphné soupira. Elle devait maîtriser sa colère, bien qu'elle ait envie de secouer l'hivernal comme un prunier, ce n'était certainement pas la meilleure chose à faire, et ça ne ferait aucunement progresser leur situation.


Sous l'influence d'Irina, la Sentinelle releva les yeux pour étudier les environs. Effectivement, ils ne tarderaient pas à rejoindre le campement hivernal installé en Automne... Elle serait donc bientôt débarrassée de son parasite, et cette idée lui remit un peu de baume au cœur. Ce qui n'empêcha pas sa voix de fuser comme une gifle glacée lorsqu'elle répondit...

- Dans trois minutes.

Iinconsciemment, elle pressa encore le pas. Pour les grandes pattes dont elle était dotée, ce n'était pas grand-chose, mais le nabot derrière elle allait sûrement remarquer le changement de cadence. Qu'il tombe encore, Daphné n'en avait cure, elle n'y songeait même pas. Elle ne s'arrêterait plus tant qu'ils ne seraient pas arrivés à destination. Elle se concentrait sur les secondes qui défilaient dans sa tête, une à une, et ça lui donnait l'impression qu'elle approchait plus vite de son but...


Daphné n'y avait absolument pas prêté attention. La seule chose qui avait surgi dans son esprit en entendant la voix du bleu, c'est qu'il était décidément incapable de la boucler cinq minutes... elle n'était pas allée jusqu'à analyser son ton, son timbre ou quoi que ce soit d'autre. A la réflexion, sa voit avait sonné aussi pitoyable qu'à l'ordinaire, si ce n'est plus. Une voix de petite chose faiblarde. Mais peut-être qu'Irina avait raison, et qu'il y avait vraiment un peu de regret dedans... Bah, qu'importe.

La sentinelle se redressa sans un regard en arrière, et ralentit l'allure. La nuit était avancée, mais on percevait tout de même un léger brouhaha et de l'agitation plus loin, droit devant eux. Ils arrivaient à bon port, et cette idée apporta un peu plus de soulagement à la belle... Encore quelques pas, et elle fit halte, se tournant à moitié vers le nabot. Son regard jaune descendit sur lui, perçant, pareil à deux lanternes dans l'obscurité.

- Voilà. C'est le camp des hivernaux. Tu peux rentrer.

Et surtout, pars et ne reviens jamais... Elle n'avait vraiment aucune envie de le revoir. Cette soirée avait été bien trop éprouvante, le baby-sitting n'était décidément pas fait pour elle.

- Tu n'as qu'à marcher tout droit jusque là-bas, même un crétin sans cervelle en serait capable.

C'est bien la dernière chose qu'elle lui dirait. Elle ne voulait aucunement subir une scène d'adieux larmoyants ou de remerciements... Elle avait fait son travail, et tout ce à quoi elle aspirait à présent, c'était de se reposer et retrouver un peu de paix intérieure...

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