Nouveaux lieux, nouveaux clans et nouvelles espèces. A vous de vivre ... Ou de survivre !

Comme bien souvent Meneldil arpentait son territoire. Et comme toujours, ou presque, elle était seule. Seule avec ses pensées. Elle avançait d'un pas plus digne que quelques temps auparavant. Sa souffrance était toujours présente mais elle parvenait maintenant à l'enfouir au plus profond d'elle même, gardant la parfaite apparence du calme et de la sérénité. Elle trottinait dans le Désert Gelé. Elle ne s'attendait pas vraiment à voir d'intrus dans un tel endroit mais savait-on jamais. Elle préférait se montrer prudente et prévoyante. Ces derniers temps, pour s'occuper l'esprit, elle tentait de faire en sorte d'anticiper les moindres ordres de Papa. Elle y parvenait relativement bien, habituée qu'elle avait été à suivre Herenya partout. La louve retint ses larmes. La simple évocation de son nom, même en pensée seulement, menaçait de faire ressurgir un chagrin qui menaçait de l'engloutir toute entière. Elle secoua vivement la tête, chassant les perles salées de ses yeux de cristal. Le vent commençait à se faire froid aussi changea-t-elle de direction pour aller droit vers la Grotte de glace où, elle l'espérait, elle pourrait continuer de méditer tranquillement.

Elle posa les pattes dans la grande salle dans laquelle les cristaux de glace renvoyaient des lueurs doucement bleutées. Son territoire était vraiment le plus beau de tous songea-t-elle un instant avant que sa douce rêverie ne soit brisée par un son des plus déplaisant. Déjà que le moindre son l'avertissant d'un loup l'aurait agacée alors que cri strident ... Elle songea pendant quelques secondes au meilleur moyen de faire demi-tour sans que l'autre ne remarque sa présence.
La louve tricolore était donc en train de tourner les talons lorsqu'elle sentit quelque chose la heurter. Le quelque chose étant chaud et ayant des poils soyeux elle songeait que ce devait être l'autre du "Youuuu !" qu'elle avait entendu en entrant. La sous-chef hivernale se retint de pousser un profond soupir et préféra se retourner pour faire face à celui, ou plutôt celle, qui lui était rentré dedans.
Ses yeux de cristal rencontrèrent ceux d'un bleu rougis, d'une louve qu'elle connaissait bien. Enfin, bien n'était peut-être pas le mot mais elle savait qui elle était. De son étrange voix sans timbre et sans inflexions ce fut Meneldil qui engagea la discution :

- Bonjours Ness, ça faisait longtemps que je ne t'avais pas vue. Depuis la dernière mission que Kiba t'a confié à vrai dire.

Elle avait de moins en moins de mal à appeler Papa par son prénom lorsqu'elle parlait à d'autre. Ses manières presque infantiles n'était pas faites pour être révéler. Elles restaient cachées dans un recoin de son cœur. Un recoin que la tristesse et la détresse n'avaient pas encore atteint. Elle chassa ces pensées de son esprit. Elles n'avaient pas leur place ici. Elle savait que la louve qui se tenait face à elle savait exploiter la moindre faille chez chaque loup qu'elle pouvait rencontrer. Non pas que Meneldil la crut capable de trahir son clan mais tout de même ... Elle préférait garder secrètes certaines choses auxquelles elle ne pensait que lorsqu'elle était seule.

- Qu'est-ce qui t'amène par ici. Tu n'as pas la moindre ronde à effectuer. Ou simplement était-ce pour le plaisir de faire quelques glissades.

La louve ponctua son discours d'un petit sourire qui pouvait paraître sincère. Au petit jeu de la dissimulation Meneldil était en train de devenir très douée ...

Meneldil ne bougea pas d'un poil tandis que la Tueuse l'observait de la tête aux pattes. Son regard étrangement rougeâtre ne la dérangeait plus. Elle s'y était faite. Tout du moins, c'était ce qu'il pouvait sembler pour tout observateur extérieur. Intérieurement elle détestait cet examen. Elle se sentait dépossédée d'elle même, mise à nu. Mais elle ne sourcillait pas, elle ne s'en donnait pas le droit.

-Je m’ennuyais et je n’avais pas envie de faire une ronde, on ne croise presque personne sur nos terres, il fallait que je me trouve une autre occupation.

Meneldil ne pouvait que reconnaître qu'elle avait raison. Leurs terres n'attiraient pas vraiment les membres des autres clans. Même les solitaires se faisaient rare ces derniers temps. Mais la louve tricolore, elle, aimait ces étendues glacées qui étaient chez elle. Elle ne pouvait pas blâmer sa vis à vis de se chercher des occupations. Tant qu'elle ne s'attirait pas d'ennuis. Ou n'en attirait pas au clan elle pouvait bien faire ce que bon lui semblait. La tueuse poussa un léger soupir qui sortit la Sous-Chef de sa rêverie. Rêverie sans intérêt il fallait bien le dire.

- Tout est si ennuyeux. Il faudrait que j’aille faire un tour sur les terres ennemies, j’aurais sûrement quelques informations alléchantes à gagner. Et toi, que fais-tu là ? N’as-tu rien d’autre à faire ?

La louve haussa vaguement les épaules. Que pouvait-elle bien répondre à cette question ? Elle ne savait pas très bien. Elle pourrait se trouver quelque chose à faire si elle cherchait mais elle n'avait pas vraiment envie de trouver une occupation utile. Elle était lasse. Elle voulait simplement pouvoir être seule avec ses pensées. Tenter de faire le point et de trouver une bonne raison de ne pas plonger, une raison de vivre quelque qu'elle soit. Ce fut à elle de soupirer. Elle ne savait pas bien pourquoi. Peut-être était-ce un avertissement pour l'autre louve, lui demandant de ne pas insister. Peut-être était-ce simplement l'expression de ce vide qu'elle ressentait en son cœur. Elle avait dépassé le stade de la douleur aiguë et du désespoir.

- Si, j'aurai probablement des choses à faire si je cherchais bien. Mais, avec Kiba, il nous a fallu faire bien des choses en peu de temps après ... Après cet évènement.

Les mots "la mort d'Herenya" ne parvenaient toujours pas à franchir la barrière de ses lèvres. Elle avait déjà du mal à les penser ... Les faire résonner dans la grotte de glace matérialiserait d'une manière encore plus crue cette horreur. Elle dut faire appelle à toute la maîtrise d'elle même qu'elle possédait pour que les larmes ne lui montent pas aux yeux et qu'elle garde une attitude digne. Elle se racla doucement la gorge, tentant de dissiper le malaise qui continuait de monter en elle. Elle ne devait laisser personne percer les secrets de son cœur. Surtout pas Ness, il était bien connu dans le clan que la petite louve était une commère hors pair.

- Et je pense qu'aller tenter le diable auprès des autres clans n'est pas une excellente idée. La trêve qui s'est installée après les combats contre les monstres nous permet de nous remettre sans craindre leurs complots. Il n'est pas nécessaire que tous soient au courant de la tristesse qui nous afflige.

Peut-être qu la Tueuse prendrait ses paroles comme celles d'une couarde mais qu'importe. Le bien de tous les loups du clan passaient avant son image. Elle posa sur elle un regard de cristal impénétrable. Il n'était pas le moment de sembler faible.

La Tueuse ne sembla pas vraiment prendre en compte ce que la Sous-Chef venait de lui dire. Cette dernière savait que la louve bleue et rouge n'obéissait réellement qu'à elle même et à ses impulsions. Tenter de la raisonner ne serait qu'épuiser sa salive pour rien. Elle ne pouvait qu'espérer qu'elle respecterait les directives données. Meneldil se reprit, elle n'avait nulle raison de craindre les réactions ou les actions de la louve qui lui faisait face. C'était peut-être une incorrigible commère mais elle respectait toujours les ordres donnés.

-Il faut espérer que les loups des autres clans pensent comme toi et qu’ils n’auront pas l’idée de venir infiltrer nos terres alors que nous sommes affaiblis après tout ce qu’il passait. Il va quand même falloir faire appel au don de Angeals pour nous soigner au cas où.


En entendant le nom de la guérisseuse du clan la louve tricolore se raidit. Elle s'efforçait de ne rien laisser paraître mais elle n'arrivait pas à accepter que Papa passe aussi vite à autre chose. A ses yeux la mort de Maman n'était survenue que quelques jours auparavant. Elle savait qu'il n'en était rien mais tout de même ... Dans un sens elle voulait qu'il retrouve le bonheur mais, dans un autre, elle ressentait cet amour qu'il avait pour la louve blanche comme une trahison. Comment pouvait-il oublier si vite celle qui avait mis au monde ses quatre enfants ? Parce que pour elle ce n'était pas autre chose qu'une trahison. Elle s'efforça de reprendre un attitude plus neutre. Elle ne souhaitait pas que Ness lui pose des questions gênantes pour elle.

-Je dis nous mais en fait moi je vais très bien. Je ne me suis pas battue contre les monstres, j’avais des choses plus intéressantes à faire, de toute façon j’aurais refusé de me battre aux côtés de ces satanés estivaux. Et toi ? Tu es allée te battre je suppose.


Meneldil eut une petite grimace. Cette nouvelle question chassa de son esprit les inquiétudes liées aux relations de Kiba. Elle était rassurée de ne pas être la seule à avoir évité la confrontation. Mais si elle disait qu'elle n'y avait pas été elle s'exposait à la question du "Pourquoi". Une question à laquelle elle ne voulait pas vraiment répondre. Pas du tout répondre même. Elle ne voulait pas qu'on la questionne sur ses faiblesses passées et présentes. Elle n'avait été qu'une couarde et elle le savait. Il fallait qu'elle se trouve une bonne raison. Quelque chose à dire que ferait taire la curiosité de la louve qui lui faisait face. Le silence ne dura pas trop longtemps. Juste assez pour qu'on remarque son doute mais pas assez pour qu'on songe à l'interrompre.

- Non, je n'ai pas non plus pris part aux combats. Je crois que peu d'hivernaux ont été prêter main forte aux autres clans. Mais qu'importe. Qu'ils nous en veuille à cause de ça ne sera qu'une source de dispute en plus. Pas de quoi s'affoler.

Mais, malgré ce qu'elle disait, elle savait que ce n'était pas rien de n'avoir eu qu'une intervention mineure dans un problème concernant leur monde dans son ensemble. Mais elle ne montrait en rien ces doutes à sa vis à vis. Elle préférerait être écorchée vive que de perdre cette toute nouvelle façade qu'elle avait tant de mal à se forger. Cette jolie façade d'indifférence quelle avait tant de mal à conserver. Mais il fallait qu'elle y arrive, que cela devienne naturel pour elle. Elle eut un petit sourire sans grande signification avant de reprendre :

- Je pense donc que, vu notre abstention, nous sommes grosso modo les moins touchés par ce que les monstres ont pu causer comme dégâts. Nous n'auront pas vraiment besoin d'Angeals.

Elle ne put empêcher sa voix de prendre une notre plus sinistre lorsqu'elle prononça sa dernière phrase. Non, elle ne se faisait pas au fait que cette louve puisse tenter de remplacer sa mère. Jamais elle n'arriverait à la cheville d'Herenya. Jamais ! Quoiqu'elle pu en penser ! La Sous-Chef hivernale se força à calmer le feu qui couvait dans son esprit. Elle ne devait pas en vouloir à la guérisseuse pour la mort de Maman. Mais elle ne parvenait tout de même pas à regarder sa relation avec Kiba d'un bon œil.

-En parlant d’Angeals, je ne l’ai pas vu depuis un petit moment, elle se fait de plus en plus rare, c’est dommage, avoir une guérisseuse dans le clan est un atout. D’ailleurs, ton père aussi se fait rare ces derniers temps. J’ai cru voir qu’ils étaient assez proches tous les deux, surtout depuis….

Meneldil fit de son mieux pour rester impassible. Devant Ness plus encore que devant quiconque elle devait garder ce masque de glace. Elle ne devait pas lui laisser voir la tempête de sentiments qu'elle venait de déclencher sous son crâne. Haine, amour, envie, peine se disputaient âprement le terrain. Haine envers Angeals qui la privait du dernier soutient qui lui restait. Amour pour ce père qu'elle aimait tant et qu'elle aurait aimé voir de nouveau heureux. Envie parce qu'elle aussi aspirait au bonheur. Un bonheur qui lui avait été à jamais retiré. Peine lorsqu'elle repensait à ce corps désarticulé comme celui d'un pantin. Son sang carmin tâchant la glace et la neige. Sa vie à jamais enfuie et leurs espoirs à jamais tués. L'hivernale dut se faire violence pour ne pas céder. Pour ne pas laisser le mur de glace dont elle s'entourait s'effondrer. Ne pas céder, ne rien laisser paraitre, sembler forte et sûre de soi. Ne pas laisser les autres douter de cela ne serait-ce qu'une seule seconde. La louve tricolore n'osait prendre la parole. Parler était un effort de trop. On ne pouvait l'exiger d'elle. Elle aurait perdu toute contenance. Le silence plana donc entre les louves pendant un temps que Meneldil aurait été incapable de définir. Pour elle, ce silence était aussi long que des heures tout en passant comme seulement quelques secondes. Ness dut donc couper cette chape qui s'était étendue sur elles :

-Bref…je te trouve bien lasse… Tu devrais oublier ton rôle de sous chef un instant et faire le vide de tes pensées pour allé t’amuser un peu. Vas rejoindre tes amis, vas sur les territoires ennemis pour mettre un peu la pagaille discrètement, vas où tu veux mais fais quelque chose, ne reste pas toute seule. Tu vas finir séchée comme une momie à trainer sur le territoire comme un fantôme délaissé.

Les paroles de la Tueuse lui laissèrent un goût de cendre dans la bouche. Elle laissa échapper un petit rire, l'un de ces rires sans joie qui peut se muer en un son dément si l'on n'y prend garde. Elle laissa ses yeux de cristal courir derrière la louve qui lui faisait face. Elle ne savait trop que répondre. Elle n'avait pas tort. Elle avait même plutôt raison. Mais Meneldil ne pouvait se résoudre à faire toutes ces choses. Elle planta de nouveau ses prunelles si bleues dans celle de sa vis à vis. Sa voix était assurée lorsqu'elle reprit la parole. Nulle trace de cet abattement et de cette détresse qui l'avait tenaillé quelques minutes plus tôt.

- Comment veux-tu que je puisse délaisser les responsabilités qui me tombent dessus sans crier gare ? Comme tu l'as dit Kiba se fait absent ces temps derniers. De même qu'il ne reste plus personne pour assurer la survie du clan. Depuis l'incident à l'abîme il ne reste que moi. Midnight et Maedhros restent introuvables, quant à Melinya elle coule des jours heureux en temps que neutre. Qui reste-t-il entre nous et le chaos si ce n'est moi ? Comment fuir mes responsabilités dans ce cas ?

Dans ses yeux de cristal brillait une lueur presque folle. Oui, il n'y avait plus rien entre ce moment et la décadence du clan. Elle était presque seule maître à bord. C'était à peine si Papa daignait recevoir les loups voulant entrer au service des hivernaux. Elle en hurlerait de dépit si elle s'en laissait le loisir. Mais elle s'imposait une stricte impassibilité, même lorsqu'elle était seule. Personne ne devait surprendre ses moments de détresse. Et on pouvait avoir besoin d'elle à tout moment. Elle devait rester sur ses gardes.

- Et puis, de quels amis parles-tu ? Je n'ai jamais fait que suivre l'enseignement de ma mère. Je n'ai pas d'amis. Les seuls que j'ai sont ces flocons qui tourbillonnent et qui sillonnent notre terre. Les loups ont le cœur trop changeant pour qu'on puisse leur accorder notre affection, notre amitié.

Ces paroles étaient dures. Enfin on pouvait apercevoir du ressentiment derrière ce mur sans failles. Elle ne laissait voir que ce qu'elle voulait. Enfin, presque. Elle ne doutait pas que Ness n'en avait pas fini avec elle. Elle ferait tout pour lui faire perdre le contrôle de ses nerfs, voilà une chose qui était sûre et certaine.

Meneldil regarda sans sourciller la Tueuse baisser les yeux et soupirer. Elle avait l'air de vouloir être partout mais pas ici. La Sous-Chef s'en fichait. Ness avait voulu la mettre mal à l'aise avec ses questions et maintenant c'était elle qui s'en repentait. Elle releva alors la tête et planta son regard dans celui de la louve tricolore. Ah, pas si mal à l'aise que ça finalement. Dommage.

-Je suis d’accord, les loups ont le cœur très changeant voir des fois trop. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas essayer de leur accorder ta confiance. Quand on y pense, si nous étions toujours les mêmes, ça ne serait pas drôle, ça ferait de nous des êtres sans vie. Et puis si tu n’aime pas les loups, tu n’as qu’à trouver d’autres êtres vivants à qui tu peux parler et en qui tu peux avoir confiance...

Des êtres sans vie ... Peut-être. Peut-être que ce serait moins drôle. Moins drôle mais au combien moins douloureux. Si on n'aime pas on ne souffre pas. Elle en était arrivée à cette conclusion. Et puis, elle ne voyait pas en quels autres êtres faisait référence la Tueuse. Elle, elle ne connaissait que les loups. Et les renards. Mais il était de notoriété publique que leur deux espèces ne se portaient pas dans le cœur l'un de l'autre. Elle était donc assez sceptique tandis que l'autre continuait de babiller, son regard tinté de sang toujours planté dans le sien.

-Si tu continu sur cette voix, tu vas finir vieille et aigrie encore plus vite que la normal. Tu vivras seule au fin fond d’une grotte de glace et tu ne connaîtras jamais la joie. Bouge-toi vite avant qu’il ne soit trop tard, trouve toi un compagnon qui t’aidera, fais-toi des amis…..Si tu préfère être seule jusqu’à la fin de tes jours, c’est ton problème, mais moi, je n’accepterai pas d’avoir pour chef quelqu’un comme toi….

La patte de la Sous-Chef vola en direction de la gorge de la Tueuse. Elle s'arrêta juste avant de la blesser. Elle s'était assez rapprocher en attaquant pour que leurs truffes se touchent presque. Dans ses yeux de cristal on pouvait lire une rage froide. Ses mâchoires serrées montraient clairement que, cette fois-ci, Ness avait été trop loin. Meneldil la tint sous le feu de son regard encore une poignée de secondes avant de se reculer et de s'assoir, comme si rien ne venait de se passer. Elle savait pertinemment qu'elle n'avait pu s'approcher ainsi de la louve noire que grâce à l'effet de surprise. En combat singulier elle n'avait aucune chance. Lorsqu'elle parlât sa voix était encore teintée de colère. D'une colère mal contenue qu'elle ne pensait plus pouvoir ressentir. Elle se sentait soudainement vivante. Etrangement vivante ...

- "Quelqu'un comme toi" tu ne sais pas qui je suis .... Ness. Je ne te donne pas le droit de me juger. Tu penses savoir ce que je suis mais tu ne sais rien. Personne ne sait rien. Personne ne cherche à savoir. Des amis ? Non, ils ne cherchent pas à voir derrière les apparences. Pour eux je ne suis qu'un moyen d'obtenir les faveurs de mon père. Tu ne me connais pas !

Elle avait crié ces derniers mots qui résonnèrent dans la grotte. La louve tricolore se remit debout avec agilité. La colère lui faisait plus de bien qu'elle ne voulait bien se l'admettre. Elle aurait voulu continuer d'en vouloir à Ness encore longtemps. Aussi longtemps qu'il l'aurait fallu. Jusqu'à ce que son cœur parvienne de nouveau à battre de lui même. Mais, malgré tous ses efforts, sa colère retomba lentement. Comme un soufflet qui sort du four. Elle eut un petit rire sec en détournant les yeux. Ne pouvant soutenir le regard de la Tueuse. Le tout fut suivi par un murmure.

- Personne ne me connait. Pas même moi ...

Elle s'ébroua pour relever les yeux. La colère s'était envolée. Le vide et la tristesse étaient de nouveau là. Sa froide détermination aussi. Personne ne la briserait. Non, personne. Et sûrement pas quelqu'un de son propre clan.

- De toute manière je ne suis pas prête de devenir Alpha. Kiba est encore en vie et en bonne santé. Il néglige un peu ses devoirs mais, tant qu'il vivra, tu n'auras pas à souffrir ma présence à la tête du clan.

Les mots étaient durs, assénés d'un ton n'admettant aucune réplique. Elle ne voulait pas qu'on croit qu'elle veuille briguer le rang d'Alpha. Sous-Chef était bien assez éreintant.

Meneldil sentit que quelque chose se passait mais elle n'aurait su dire quoi. L'autre était assise dans la neige, l'air totalement égarée. Elle ne semblait pas vraiment remarquer que sa position n'avait absolument rien de digne. La Sous-Chef fronça vaguement les sourcils. Que faisait donc la Tueuse ? La Sous-Chef la regarda venir vers elle mais sans vraiment la voir. Elle ne savait quelle attitude elle devait avoir. Son cerveau tournait, cherchant en vain une solution au milieu des nombreuses leçons que sa mère lui avait données. Mais rien ne vint. Alors elle ne fit rien. Elle ne comprit absolument rien à ce qu'il pouvait se passer lorsque les lèvres de la louve rouge et noire se posèrent sur les siennes. Meneldil se tétanisa, les yeux écarquillés de surprise. Qu'est-ce qu'il se passait ?! Qu'est-ce que Ness pouvait bien lui vouloir ?! Lorsque la Tueuse se recula, une grimace plaquée sur le visage, ses mots la blessèrent bien plus qu'elle ne l'aurait pensé :

-Aaaah ! Beurk ! Tu es folle ! Déjà tu me sautes dessus pour essayer de me donner un coup de patte et en plus tu profites que je sois complètement sonnée pour m’embrasser ! huuurk…

Mais mais mais ... Ce n'était pas de sa faute ! Elle n'avait rien fait ! Des larmes de détresse commencèrent à perler aux coins de ses paupières. Elle ne voulait pas pleurer. Elle n'en avait pas le droit. Mais elle ne comprenait pas. Elle haïssait ne pas comprendre. Son innocence avait poussé maman au fond de l'abîme. Si elle avait pu, si elle avait su ... De telles pensées firent monter de nouvelles larmes qui n'avaient rien à voir avec la situation présente. Les paroles de Ness l'achevèrent, tombant comme un couperet :

-Je t’ai dis de t’amuser mais pas à ce point là ! Bref…

S'amuser ? Parce que pour elle embrasser ainsi quelqu'un n'était qu'un jeu ? Non pas que Meneldil ait pensé être aimée d'amour par l'autre louve mais elle ne songeait pas non plus que cela ne put être qu'un jeu. On ne jouait pas avec les coeur des autres. Sa tristesse sur mua en une dure colère, froide, dure, quelque chose qu'elle ne pouvait contrôler. Elle sentait qu'elle perdait pied sans savoir vraiment pourquoi. Trahie avant même d'avoir réellement donné sa confiance.

-J’ai l’impression que tu ne veux pas de mon aide alors reste seule et va te morfondre loin de moi.

Les émotions se bousculaient dans la tête de la louve tricolore. Si elle ne pouvait pas même se fier aux loups de son clan alors qui pourrait être là pour elle ? Qui saurait la protéger et ne pas la blesser ? Sa froide colère ne s'était pas envolée. Elle enflait à mesure qu'elle pensait à tout ce que la Tueuse venait de lui dire. Elle n'avait été qu'un jouet. La louve noire et rouge n'avait que faire de ses sentiments. Tout ce qu'elle voulait était récolter des informations. Bien sûr, elle aurait du s'en douter. Qu'elle était naïve. Son coeur s'endurcissait tandis que, dans ses yeux, des larmes brûlantes affluaient sans qu'elle ne leur laissa le loisir de couler. Elle laissa échapper un petit rire sec et parla d'une voix rauque, quelque peu altérée par les émotions qui se bousculaient en elle :

- Non, en effet, je n'ai pas besoin de toi. Je n'ai pas besoin d'une menteuse aux humeurs changeantes qui ne songe qu'à servir ses propres intérêts. Tu me demandes de faire confiance ? Quelle blague !

Les derniers mots avaient été crachés. La Tueuse avait perdu tout crédit à ses yeux. Ses yeux de cristal toujours emplis de larmes. Elle avait perdu. Le masque s'était fendillé. La glace s'était éparpillée. Tout ça à cause d'une louve ne sachant pas tenir convenablement sa langue. Meneldil déglutit avec difficulté. Les mots qui suivirent étaient tout aussi durs :

- Je ne comprends pas ce que Papa peut bien te trouver. Il m'a dit que tu étais quelqu'un de droit malgré ton amour pour les secret. Quelqu'un qui ne trahissait pas. Je crains qu'il ait eu tort. Tu ne veux pas d'une Alpha telle que moi ? Moi je vois mal ce que je peux attendre de toi. Je ne prends pas en compte les paroles de quelqu'un n'assumant pas ses actes.

La louve tricolore avait envie de fuir. De courir loin, très loin. Elle en avait mare de souffrir. Elle voulait pouvoir être seule en comprendre ce qu'il se passait dans sa tête. Elle ne se comprenait plus. Pas plus qu'elle ne comprenait Ness et ses bizarres impulsions.

La réponse est pas top, désolée.

- Comment oses-tu douter de ma loyauté ! En aucun cas je ne pourrais trahir ce clan. Si Kiba m’a toujours gardée dans son estime c’est pour une bonne raison...

Ce n'est pas la trahison envers le clan que craignait Meneldil. Elle craignait qu'on ne la trahisse elle. Les êtres étaient si changeants. Elle voulait pouvoir compter sur les siens. Être certaine d'être écoutée. Elle ne voulait pas d'un règne de la terreur. Elle voulait être respectée. Respectée pour ce qu'elle était et pour ce qu'elle faisait. Mais elle n'était pas respectée. La Sous-Chef n'était pris que pour une enfant. Une enfant sans cervelle ne sachant pas ce qu'elle faisait ni ce qu'elle disait. Dans les yeux de la Tueuse la mort brillait. La louve tricolore ne bougea pas un muscle. Elle était prête à affronter Ness si cette dernière se jetait sur elle. Elle savait se battre, papa et maman y avaient veillé. Mais, finalement, sa vis à vis se releva en soupirant et commença à s'éloigner. Meneldil ne fit pas le moindre geste pour la retenir. Elle n'avait pas envie de la retenir. Elle n'avait pas envie de poursuivre ce dialogue de sourd dans lequel personne n'écoutait personne. Peut-être que le temps ferait taire leur animosité respective. Ou peut-être pas. Seul l'avenir le leur dirait. Alors qu'elle même était en train de se relever, prête à partir dans une autre direction elle entendit la voix de la Tueuse.

-J’espère qu’un jour tu regretteras ce que tu as dis…. Ce jour là, je serais prête à dire que je te respecterai en tant qu’Alpha…

Elle eut un sourire amère. Si elle savait ... Bien sûr qu'elle regrettait ses paroles. Elle ne voulait pas être en conflit avec les membres de son propre clan. Mais comment pouvait-elle faire ? Elle n'avait pas la réponse. Papa l'aurait eu mais il restait introuvable ou alors toujours en compagnie d'Angeals. Tout était si difficile ... Elle ne savait plus que penser. Elle baissa la tête et la queue, elle avait l'air pitoyable ainsi. Mais peu importait lorsque personne ne la voyait. Lorsqu'elle était seule elle pouvait montrer ses faiblesses.

- Si tu savais toutes les choses que je regrette Ness ...

[RP terminé]